Fils de réfugiés, petit, pauvre, à la voix voilée, on disait de lui qu’il n’avait rien pour réussir. À force de travail, de persévérance et d’une volonté hors norme, Charles Aznavour est devenu un monument de la chanson, et un symbole de la culture française. Avec près de 1200 titres interprétés dans le monde entier et dans toutes les langues, il a inspiré des générations entières. Découvrez le parcours exceptionnel et intemporel de MONSIEUR AZNAVOUR.
Le Biopic est une figure de style bien compliquée, qui a parfois tendance à sombrer dans le bien lisse ou le trop des complaisances. Ils ne sont pas nombreux, ceux qui ont réussi à trouver la bonne formule. Nous pourrions trouver ici : « Bohemian Rhapsody» de Brian Singer ou encore « Rocketman » (2019) de Dexter Fletcher, ou encore « Tina » (193) de Brian Gibson, ou encore « Ray » (2004) de Taylor Hackford. Des succès qui sont, notamment dus à l’audace de leurs auteurs, qui ont su aborder la figure emblématique de l’artiste a qui est consacré le film, sans en effacer les défauts ou les apérités qui l’ont rendu si remarquable. S’attaquer à Charles Aznavour, c’était le risque de dénaturer son image encrée dans l’esprit de bons nombres de générations qui se sont retrouvées dans ses textes ou dans ses combats. C’est le duo de « Patients » et « La Vie Scolaire », Mehdi Idir et Grand Corps Malade qui a décidé de se lancer dans cette aventure. Un duo, qui a su se faire remarquer par une écriture très adepte du rythme, de la punchline et de l’humour dosé, tout en abordant des sujets de fonds. Il n’était, donc, pas inconvenant de voir le duo aux manettes d’une telle entreprise.
Mais voilà, par un excès d’amour envers le chanteur, ou par un manque d’envie, de prise de risque, le duo rate le coche. Le scénario qui nous vendait l’ascension de Charles Aznavour, enfile les différentes étapes comme les perles d’un collier sans aucune originalité. Presque scolaire la première partie du scénario nous montre la famille Aznavour, durant la seconde guerre mondiale, avec un chanteur dont on ne marque pas plus que cela l’implication. Le père de Charles Aznavour et ses amis étaient des résistants, dont une partie fut fusillée. Ok, mais Charles faisait quoi dans tout cas ? En pensait quoi ? Au détour d’une scène, on nous montre un petit détail, comme un indice, mais sans aller plus loin. Et tout le film sera comme cela, rien sur son combat pour faire reconnaître le génocide Arménien, dont il est tout de même fait part dans les tout débuts du film. Les auteurs vont s’attarder sur la relation entre Edith Piaf (Artiste capitale dans la vie d’Aznavour), mais ne vont pas creuser plus loin dans ce qui plaisait à la chanteuse chez Charles et vice versa, ce que sont apporté les deux artistes. Même chose avec le personnage de Charles Aznavour lui-même, le duo film le personnage sans aucune aspérité, avec une espèce de simplicité naïve, en ne se focalisant que sur le travail du chanteur. C’était un grand bosseur, au point d’y laisser sa vie de famille. A un tel point que nous avons l’impression d’entendre aussi les paroles d’une chanson de l’artiste. Et lorsque le duo s’aventure, un peu dans le côté sombre du chanteur, il apparaît toujours sous son meilleur profil, alors que ce sont ses parts d’ombres qui sont intéressantes.
Même Tahar Rahim, Acteur pourtant précis dans ses choix et dans ses compositions signe, ici, une prestation ou le mimétisme est poussé à l'extrême et aurait presque tendance à rendre son personnage, sinon ridicule, en tout cas presque hors sujet. A trop vouloir rendre justice au personnage visuel comme artistique de Charles Aznavour, Tahar Rahim n’en devient, d'un seul coup, qu'une simple ou modeste imitation que l'on pourrait retrouver dans n'importe quel cabaret obscur de Montmartre. C'est dommage, parce que l'intention était bonne d’autant que lorsque l'acteur commence à pousser un petit peu plus dans ses retranchements sa composition, il en devient touchant et parvient même à casser cette image lisse que les réalisateurs donnent de Charles Aznavour. Pour illustrer mon propos je dirais que l'acteur semble n'avoir gardé du personnage que l'image qu'il donnait sur scène et dans les interviews et a finalement donné très peu de sa propre vision qu'il se fait lui-même de la légende de la chanson française.
Pour en revenir au travail des deux Réalisateurs nous avons l'impression dans la deuxième partie du film, d'assister à une espèce de galerie de personnages célèbres qui commencerait par Édite Piaf et dans laquelle on retrouverait également, entre autres, Charles Trenet, Gilbert Bécaud ou encore Johnny Hallyday. Une distribution qui a bien du mal à trouver la bonne tonalité pour ne pas nous laisser hors de cette reconstitution d’ue vie qui fut riche en joies et en drames. Même chose sur l'intégralité du film et particulièrement dans cette deuxième partie nous avons l'impression d'assister à une sorte de best-of de luxe des plus grands succès de Charles Aznavour sans que cela soit forcément, ou en tout cas de manière plus subtile, bien amené dans le film.
Pour conclure, je dirais que Mehdi Idir et Grand Corps Malade on voulut rendre hommage à leur manière à Charles Aznavour. Il y a d'ailleurs des petits moments de génie, comme cette chanson peu connue d’Aznavour qui par le biais de la mise en scène se transforme subtilement en Slam, ou encore cet autre morceau en plein enregistrement dont les deux réalisateurs vont montrer à quel point Il a marqué la musique internationale, puisque le riff fut samplé dans un morceau de rap américain. Si l’intention était bonne, le résultat n’est malheureusement pas à la hauteur du personnage de Charles Aznavour et se retrouve subitement comme un biopic plutôt assez lice avec une interprétation de l'acteur principal qui ressemble plus à une pâle imitation, que la mise en scène vient constamment saluer par des effets de plan.