Gena, artiste queer incomparable, bouscule les codes grâce à des tenues vestimentaires venues d’un autre monde, le sien. Cet artiste se promène dans les rues de Moscou et fait face à ses pantins autoritaires. Ses performances radicales ne laissent personne indifférent. Dans un pays où la démocratie est en danger, où le rejet de l’autre devient la normalité, où la peur nourrit les discours haineux, Gena n’abandonne jamais la lutte et continue de clamer, à sa façon, le droit à la différence.
Gena Marvin est une artiste « Queer » et militante qui exprime sa pensée à travers de prestations qui ne peuvent laisser le public indifférent. A travers des costumes qui peuvent effrayer ou intriguer, mais qui sont fait pour susciter une réaction, l’artiste se produit et se met en scène dans les rues de Moscou. Et c’est que la donne change radicalement, car cette artiste fait face progressivement à une société qui devient de plus en plus hostile à la différence et se referme dans une idéologie minutieusement mise en scène et contrôlée par le Kremlin. De 2019 à 2023, la réalisatrice Agniia Galdanova (Out Of Place) a suivi cette artiste qui, à chaque prestation, remet sa vie et son intégrité physique en jeu. Face à l’hostilité rarement feinte, Gena apparaît forte et fragile en même temps.
Ce qui est tout de suite surprenant dans ce documentaire qui va suivre son quotidien sur 4 années marquées par l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la montée lente mais significative de la répression envers la contestation mais également envers la communauté LGBTQ+ qui sera l’une des premières victimes de ce changement de cap de la politique du gouvernement emmené par un Poutine qui ne cache plus ses appétences pour les mesures répressives venues du passé sombre de son pays, c’est toute la souffrance qui sort de ses prestations avec, chaque fois une porte ouverte vers la renaissance. L’artiste, s’appuie sur sa famille, mais garde les pieds sur terre grâce aux liens qu’elle entretien avec ses grands-Parents. Et particulièrement les débats avec son grand-père qui ne comprend les choix de l’artiste, mais laisse constamment transparaitre une inquiétude et un amour inconditionnel pour cette enfant qui se met en danger (Le final le montre bien !).
Agniia Galdanova, en suivant le quotidien de Gena Marvin, nous plonge au cœur de la société Moscovite et nous en montre une vision bien plus proche de la notre avec la montée constante du populisme, de la désinformation et du contrôle de la contestation. Derrière les prestations de l’artiste, nous découvrons, à son image, une société fragile, en souffrance qui sait que l’on ne peut pas tout dire et que le silence vaut mieux que l’expression. C’est également une société dont les paradoxes apparaissent au grand jour comme lorsque le grand-père à Gena si elle est payée pour ses prestations en assénant un : « C’est le capitalisme maintenant, on ne fait plus rien sans être payé ! ». La réalisatrice en a conscience et laisse certaines séquences s’éloigner provisoirement de son sujet pour mieux en planter le décor. Alors que le spectateur est en situation passive, à regarder sans savoir totalement comment se situer dans cet univers qui lui semble étranger, Agniia Galdanova nous amène doucement mais surement à comprendre le combat de l’artiste et à comprendre comment fonctionne la Russie de Poutine, et à quel point la liberté de s’assumer tel que l’on est, est une mise en danger.
Avec un final qui fait frissonner et aussi déchirant que la Russie s’est laissé voler sa liberté, « Queendom » est avant tout la mise en lumière de la souffrance d’une communauté autant que celle d’une société qui veut avancer mais porte un boulet à sa cheville.