Depuis ses 16 ans, entre Paris et Rome, Chloé a filmé ses amours. Coup de cœur adolescent, relation à distance, passion charnelle... alors qu’elle vivait une histoire, elle en fabriquait déjà le souvenir. Mais de quoi se souviennent ces ex ? Quelle est leur version des faits ? Douze d’entre eux se livrent pour reconstituer un parcours sentimental aussi singulier qu’universel.
Comment parler de l'amour autrement que par son propre jugement ou sa propre perception ? La réalisatrice Chloé Barreau nous offre sa propre réponse en faisant parler ceux avec qui elle a eu une relation amoureuse que ce soit avec sentiment ou juste pour le plaisir d'un soir. Depuis l’âge de 16 ans elle a vécu, avec une caméra quasiment vissée dans ses mains. Elle a ainsi filmé ou photographié ses amours d’un jour ou de plus longtemps, mais également ses amis, ses rencontres et tout ce qui l’a construit. Mais Eux, comment ont-ils vécu ces amours et ces ruptures ? Car ce qu’elle ressort de ces images volées ou consenties, ce sont ses propres visions de ces sentiments, une vision presque narcissique de son parcours amoureux.
Alors, avec pudeur et impudeur, mais toujours avec la volonté de comprendre la différence de perception que peuvent avoir les deux éléments d'un couple, la réalisatrice va questionner ses anciens et anciennes partenaires, comme si elle n’était plus là, afin qu’ils et elles parlent de cette relation. Pour arriver à ses fins, Chloé Barreau a demandé à 12 personnes, avec qui elle a eu une relation, de venir parler d'elle, de ce qu'ils ou elles ont ressenti pendant ce moment partagé. Mais pour que la parole se libère, elle a confié les interviews de ses témoins à Astrid Desmousseaux, une documentaliste, qui a eu à charge de faire parler les amant(e)s et conjoint(e)s. Et cela fonctionne, dans un dosage subtil qui permet d'éviter un discours trop narcissique ou trop ennuyeux, la réalisatrice nous plonge dans une sorte de jeu de miroir, où chacun parle de sa relation à l'autre, de la rencontre, de l'ivresse de la passion et surtout de la perception de la fin.
Et pour ne pas fausser son discours ou, tout du moins, sa recherche de vérité, elle a même demandé à certains avec qui les choses ne se sont pas forcément bien passés, dont une femme à qui elle n’avait pas parlé depuis 25 ans. Cela donne un instant de vérité, mais, plus étonnant également, de la poésie et de la douceur. Car souvent, les personnes témoignent avec une certaine nostalgie, et quelque fois avec un détachement, qui vient rendre l’ensemble aussi fluide que touchant. Chloé Barreau, très loin de faire une œuvre ennuyeuse et autocentrée, livre ici, un montage léger qui vient constamment capter l’attention du spectateur et ne jamais le mettre dans la position du voyeur, mais vient, au contraire, le questionner, lui-même, sur son rapport à l’autre, sa manière de ressentir l’amour en s’interrogeant sur ce que ressent l’autre.
Car effectivement, et c’est toute l’intelligence de « Fragments d’un Parcours Amoureux », la relation amoureux est souvent nombriliste, elle vient souvent toucher l’égo, mais il est rare qu’elle s’intéresse à l’autre. On se demande si nous avons été à la hauteur, si l’autre a prit du plaisir, mais plus pour se rassurer que pour la satisfaction d’avoir donné ce que son partenaire voulait. La démarche de Chloé Barreau est intéressante et touchante, car à travers ses propres vidéos et ses photos, elle s’est soudainement posé la question : Mais eux qu’ont-ils pensé ? « Fragments d’un parcours amoureux » est un documentaire touchant qui nous emmène de l’autre côté du miroir pour mieux capter les deux faces d’une relation amoureuse qu’elle soit longue ou juste pour un soir.