Série B, blockbuster, film de genre, film bis & série Z
Sortie:
28/08/2005
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Min
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Série B, blockbuster, film de genre, film bis & série Z

par: Julien Sabatier



Avant-propos

Sans verser dans une quelconque forme de purisme pseudo-élitiste, force est de constater qu’il est tout de même assez irritant de voir que certains n’hésitent pas à parler de série B en évoquant un film à cinquante millions de dollars ou qu’un titre comme Shaun of the dead se voit parfois taxé de série Z. Un petit retour terminologique s’impose donc et permettra de clarifier les choses, même auprès de ceux qui pensent user de certaines expressions à bon escient. Etant donné que le travail serait rébarbatif à lire et nécessairement non-exhaustif, nous n’entreprendrons pas de définir tous les qualificatifs applicables à un film (court-métrage, moyen-métrage, long-métrage, prequel, séquelle, remake, crossover, spin-off, etc.). Nous nous attarderons seulement sur quelques termes très usités et souvent galvaudés. Nous en avons sélectionné cinq pour ce dossier : série B, blockbuster, film de genre, film bis, série Z.

La série B

Si l’on s’en tient à la définition de Vincent Pinel, la série B désigne « un film à petit budget conçu dans le cadre du système de production hollywoodien des années 1930 à 1950 pour servir de première partie au double programme alors proposé par les salles américaines ». Un premier constat s’impose. Stricto sensu, la série B s’est éteinte il y a plus de cinquante ans.


Expression d’origine française (la distinction américaine s’opère entre le A picture et le B picture), la série B ne fait pas référence au contenu du film (tel son genre) mais à son mode de production. Le B picture est un film au budget restreint, de courte durée (généralement de 50 à 70 minutes), doté d’un scénario rapidement écrit et d’un temps de tournage réduit.
Depuis les années 50, l’expression série B subsiste étant donné qu’elle désigne aussi, par extension, un film de fiction tourné avec de faibles moyens. Plus large, cette seconde acception est donc toute relative, nous y reviendrons.


C’est au moment de la grande dépression que les cinémas américains lancent le double programme (deux films pour le prix d’un seul ticket) afin de pallier une baisse alarmante de la fréquentation. La tendance s’inversant assez rapidement, l’opération porte ses fruits. Pour les exploitants de salles, les séries B sont une aubaine car, moyennant un prix modique pour la location des bobines, ils empochent l’intégralité des recettes générées par ces métrages quand, sur les films A, ils ne touchent qu’un pourcentage des recettes. Dans l’optique d’amortir des équipements onéreux et des techniciens sous contrat, les major companies créent leur département B. Parallèlement, des sociétés indépendantes (Monogram, PRC, Republic, ...), spécialisées dans le B, fleurissent à Hollywood. C’est alors que sortiront en masse des films fantastiques ou de science-fiction, des polars, des comédies, des westerns, des serials (films d’aventures à épisodes), ...


La donne changera en 1949 avec une loi antitrust qui contraint les grandes firmes cinématographiques à abandonner leurs réseaux de salles. Par conséquent, elles se concentrent sur le A et laissent le B aux indépendants. Avec l’abandon progressif du double programme et l’avènement de la télévision, la série B décline. Elle aura pour derniers avatars des films comme L’homme qui rétrécit (adaptation de Richard Matheson par Jack Arnold) et Rendez-vous avec la peur, deux métrages sortis sur les écrans la même année (1957).
Reléguée un temps dans les drive-ins, la « pure » série B connaît encore régulièrement les honneurs du grand écran et subsiste aussi via le direct to video avec des petites sociétés comme Full moon ou Nu image. Anciens ou récents, les titres ne manquent pas (Zombie, Prince des ténèbres, Fog, Nuits de terreur, Saw, Shaun of the dead, ...) et les grands noms s’appellent Roger Corman, John Carpenter ou Larry Cohen.


A l’heure où les budgets ont connu une hausse spectaculaire (avec un bon prodigieux dans les années 90), on peut, proportionnellement, et paradoxalement (!), parler de séries B pour des films dont les budgets dépassent les dix millions de billets verts. Il va sans dire que la notion est devenue de plus en plus ardue à manipuler et qu’elle doit, aujourd’hui, l’être de façon raisonnable (faute de pouvoir proposer un barème budgétaire en la matière).
Quoi qu’il en soit, l’expression série B ne saurait être entachée d’une connotation péjorative, contrairement à ce que peuvent penser certains indélicats pour qui le budget d’un film détermine intrinsèquement sa qualité.

Le blockbuster

Généralement plus proche du cinéma en tant qu’industrie que du cinéma en tant qu’art à part entière, le blockbuster est un produit très onéreux (le budget peut dépasser les 200 millions de dollars !), élaboré puis lancé avec soin par un major company dans le but de ratisser le public le plus large possible et d’engranger des recettes pharaoniques. Souvent film catastrophe, d’action ou de science-fiction, le blockbuster est un véritable produit marketing (avec matraquage publicitaire et autres procédés hautement mercantiles à la clé) de qualité variable. Force est de constater que ces productions manquent souvent de personnalité dans la mesure où elles se contentent de reprendre encore et toujours des formules éculées pourtant garantes d’un certain profit (explosions spectaculaires, destructions de monuments célèbres, message niais exhalant un patriotisme décérébré, soupçon de sexe, ...). Sortant souvent l’été aux Etats-Unis (le week-end du 4 juillet rimant souvent avec des recettes significatives), le blockbuster peut être un film pop-corn (Independance day, Armageddon, Godzilla, ...) emballé par un réalisateur sans talent (Roland Emerich, Michael Bay, ...) comme une oeuvre puissante et inspirée (Terminator 2, Titanic, La guerre des mondes, ...) mise en scène par un grand cinéaste (James Cameron, Steven Spielberg, ...). C’est au détour de ce dernier constat que le blockbuster trouve d’ailleurs toute son ambivalence.

Le film de genre

Le film de genre est une notion assez facile à définir même si, dans les faits, elle peut susciter d’âpres débats entre cinéphiles. Aussi sûrement que l’on distingue la littérature « générale » de la littérature de genre (essentiellement policier et science-fiction), on peut dissocier film « général » et film de genre dès lors que le film en question (dit « de genre » donc) appartient clairement à un genre identifié. Si, au départ, on parlait de cinéma de genre pour désigner le policier et la science-fiction, on peut également employer le terme film de genre pour un métrage fantastique, d’horreur, d’arts martiaux, ... C’est d’ailleurs l’absence d’un véritable consensus sur une liste exhaustive de tous les genres qui génère des désaccords sur la notion.

Le film bis

Le cinéma bis est difficile à définir précisément car l’expression est souvent employée à tort. Basiquement, le film bis est la reprise d’un titre américain ayant bien fonctionné au box-office, un décalque (d’où l’expression « bis ») indigent mais parfois inspiré. En effet, le terme cinéma bis n’est pas nécessairement synonyme de mauvaise qualité.
On notera que la majorité des films bis sont des titres italiens. Lorsque L’exorciste de William Friedkin fait sensation, les Italiens livrent Lisa et le diable ou La maison de l’exorcisme (Mario Bava). Quand Zombie (Dawn of the dead) de George A. Romero s’avère fructueux pour ses producteurs, Lucio Fulci et ses pairs orchestrent la réponse transalpine avec des titres comme Frayeurs, L’au-delà ou L’enfer des zombies. Le western spaghetti commence à battre de l’aile tandis que le film de kung-fu se popularise lorsqu’arrive la vague du western soja (ou western chop suey), à grands renforts de Mon nom est Shangaï Joe et autres La brute, le colt et le karaté. Lorsque la firme britannique Hammer fait recette, les Italiens et les Espagnols (avec L’horrible docteur Orloff, Opération peur et consorts) s’approprient l’horreur gothique. Ainsi va le bis, toujours à l’affût de formules qui ont le vent en poupe afin de les recycler sans le moindre scrupule.

La série Z

Invention de la critique française l’expression série Z désigne de façon infamante le degré zéro de la création cinématographique. La plupart du temps, la série Z est l’oeuvre d’une équipe n’ayant aucune compétence en matière cinématographique, un titre sans le sou (budget littéralement inexistant), bricolé lors d’un tournage précipité et bâclé qui tente de mettre en scène un scénario lamentable desservi par des acteurs qui feraient mieux d’abandonner tout de suite leurs rêves de gloire. Ridicule et foncièrement mauvaise (inutile de chercher la perle rare, les chances d’en trouver une sont beaucoup trop infimes), la série Z est une friandise de choix pour les amateurs de navets, paix à leurs âmes.

En conclusion

Certaines définitions pouvant apparaître comme quelque peu « litigieuses » pour certains, n’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires.

Principales sources :

- « Ecoles, genres et mouvements au cinéma » Vincent Pinel, collection Comprendre reconnaître – éditions Larousse.

- « Quelques définitions utiles » KaijuChris, site Cinébis.