Lonesome Jim
Lonesome Jim
Sortie:
16/11/2005
Pays:
Etats-Unis
Genre:
Durée:
1h30 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Lonesome Jim

par: Arnaud Weil-Lancry

Etonnant Steve Buscemi… Etonnant acteur, et aujourd’hui, étonnant réalisateur, avec Lonesome Jim, chronique d’une Amérique perdue et oubliée… Et en toute cohérence avec un acteur de ce talent, un film empreint de qualités propres à un cinéma américain indépendant si précieux et ces derniers temps si lointain…

L’histoire
Déçu par sa vie de promeneur de chiens à New-York, Jim revient à contrecoeur dans son Indiana natal. Il y retrouve une ville qu’il déteste, et une famille, à peine moins… Néanmoins, sa rencontre avec une ravissante infirmière et le rejeton de cette dernière va lui apporter un peu de bonheur…
La critique

Le miroir d’une Amérique oubliée…
Pas si facile d’être Steve Buscemi… Le génial acteur fétiche des frères Coen a toujours su, à l’image d’un Johnny Depp, choisir judicieusement ses œuvres en tant qu’interprète ou réalisateur. Déjà, dans Animal Factory, il décide d’exposer le portrait d’une Amérique sale et déchue, et aujourd’hui, il rend à nouveau hommage à cette Amérique pâle et oubliée, très éloignée du rêve américain. Exit les belles voitures hollywoodiennes, exit les rêves de Golden Boys, non… dans Lonesome Jim, uniquement une Amérique sans foi, sans rêve et sans croyance aucune. Une contrée si représentative de l’Amérique telle qu’elle existe, si éloignée des dérives mégalomaniaques de ses dirigeants. Cette Amérique-là ne fait nullement rêver : elle n’a rien à offrir, si ce n’est qu’une existence morne et suicidaire dont notre fameux Jim en est le digne symbole. Un individu presque complètement raté cherchant désespérément un sens à ses journées tristes et indifférentes. Souhaiterions-nous prendre sa place ? Pas le moins du monde… Normal quand on symbolise à l’extrême une Amérique ratée et sans concession.
Punch-Drunk-Jim
Dans cet esprit d’un cinéma indépendant reposant sur le postulat de l’Amour comme échappatoire aux moins fortunés, Punch-Drunk-Love de Paul Thomas Anderson était une réussite exemplaire. Lonesome Jim ne l’est pas moins, poussant même le bouchon de la marginalisation de ses personnages en adoptant un style visuel particulièrement granuleux. On apprendra que cet aspect (caméra numérique) ne fut nullement souhaité, lié à des impératifs financiers extrêmement restreints (500 000 dollars de budget pour 16 jours de tournage). La restitution graphique, si elle est réussie, en ressort toutefois un peu fatigante et ponctuellement laborieuse.

La vie n’est pas un long fleuve tranquille…
Lonesome Jim, à travers sa galette de personnages pittoresques et ratés, est loin d’être réjouissant et les renvois à sa propre existence sont inévitables. Steve Buscemi évite toutefois la complaisance et la pitié par des dialogues ingénieux et des séquences fortes ou hilarantes (l’oncle drogué, la mère obsédante et omniprésente, le frère raté…). Cette galerie de personnages demeure attachante, un exploit compte tenu de la durée très courte du film (une heure trente), en étant porté par Liv Tyler et Casey Affleck dans les rôles principaux. Le couple y est poignant et touchant dans sa tentative de dépasser sa condition végétative vers une existence plus méritante. Le frère cadet de Ben Affleck se révèle finalement bien plus doué que son frère, le rôle principal de Lonesome Jim donnant l’étrange sentiment d’avoir été créé pour lui.

Parfaite métaphore cinématographique du personnage en marge qu’est Steve Buscemi, Lonesome Jim confirme la carrière déjà richement jalonnée de cet acteur américain hors norme. Ce film humaniste est finalement à l’image de son réalisateur : sobre, discret et exemplaire de pudeur… Bref, une réussite.
 
A voir : un peu, beaucoup…
Le score presque objectif : 8/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +2, un beau film, empli de tout ce que le cinéma offre de plus attachant...