Jean-Philippe

par: Sebastien Keromen



Une France sans Johnny, vous imaginez ? Pas la peine, Laurent Tuel l’a fait pour vous, en projetant Fabrice Luchini à la recherche du Johnny Hallyday perdu

Jean-Philippe
France, 2006
Réalisateur
 : Laurent Tuel
Acteurs : Fabrice Luchini, Johnny Hallyday, Jackie Berroyer, Antoine Duléry, Caroline Cellier, Barbara Schulz, Benoît Poelvoorde
Durée : 1h30

L’histoire
Fabrice est fan à mort de Johnny Hallyday. S’il n’en reste qu’un, il sera celui-là. Mais quand il se réveille dans un monde où personne ne connaît Johnny, il va devoir mettre la main sur Jean-Philippe Smet et réveiller le Johnny qui sommeille en lui


La critique


Y a des gars qu’ont de l’idée : et si Johnny n’était pas devenu Johnny ? Qu’en penserait un inconditionnel de la vedette ? Facile, il ferait tout pour que Johnny redevienne Johnny. En voilà une bonne idée. À moins que… parce qu’en fait, à part que c’est Johnny, qu’est-ce que ça change par rapport à tous les films sur un p’tit jeune (bon, pas si jeune ici) qui n’en veut et qui va finir par s’imposer par son talent ? Ben, juste Johnny, en fait. Ce qui suffira pour les fans, et pas vraiment pour les autres. Surtout, soit dit en passant, que dans ce monde parallèle, Johnny n’est pas Johnny parce qu’il n’a pas pu se rendre à une émission télé, et celui qui l’a remplacé est devenu Johnny à la place de Johnny. Pas sûr que ce soit très flatteur pour Johnny de raconter que n’importe qui aurait pu prendre sa place, et qu’en fait il avait juste été là au bon moment. Mais passons.
Jean-Philippe, c’est aussi Johnny et Luchini dans le même film. Ça, ça en jette sur l’affiche, à la télé, et aux avant-premières. Mais sur l’écran ? Autant Johnny s’en sort bien, avec un joli sens de l’autodérision, arrivant à nous faire croire à son personnage qui a Johnny en lui mais ne l’a pas laissé s’exprimer, autant Luchini non. Le réalisateur a dû oublier de le diriger, et on a droit un à Luchini qui fait quasiment de la caricature de Luchini tout du long. Avec une belle énergie et un bel enthousiaste, certes, mais entre les moments où il pense à jouer et baisse la tête l’air timide, et les moments où il se lâche et saute dans tous les sens en chantant (pas forcément juste), ça colle pas. Si vous êtes allergique à Luchini (moi je l’aime plutôt bien, mais…), n’allez pas voir le film sous peine d’en sortir sur une civière avec une luchinite aiguë.


À part l’idée de départ, le scénario n’est pas vraiment au top.
D’abord il allonge au-delà du raisonnable la (les) scène(s) où Luchini découvre la réalité alternative. Puis il l’envoie sur une chasse aux Jean-Philippe Smet qui brassera les clichés du genre " recherche de quelqu’un à partir de son nom " (un qui ressemble pas, un qui ressemble de dos, un vieux, un noir, une femme, je crois qu’on n’a rien oublié) pour finalement le faire tomber sur lui par un hasard qu’un bon scénariste devrait bannir. Après, l’histoire accumule les mauvaises idées de scènes et de suite de l’action (même si c’est peut-être à l’appréciation des goûts de chacun). Par contre, je craignais fortement la fin (retour à la réalité par des voies trop tordues pour être vraies ? ou, pire, ô pire, tout n’était-il qu’un rêve ?), et cette fin surprend très agréablement, à la fois réussie et inattendue.
Alors, qu’est-ce qu’il a de plus que les autres, ce film ? Pas autant qu’on aurait pu l’espérer. Quelques clins d’œil réussis (celui au film Podium, notamment), quelques scènes plaisantes où Luchini raconte au Johnny qui n’a pas réussi la vie de celui qui a réussi, une bonne humeur et de l’énergie à revendre (même si elle n’est parfois pas utilisée à bon escient). Mais il subit aussi le poids d’une histoire qui brasse les poncifs (leurs femmes sont sur le point de les quitter, mais comme ils vont devenir des winners, elles vont encore être amoureuses, c’est comme leurs enfants qui ne les estimaient pas…), de scènes drôles pas toujours très drôles, d’une exagération un peu générale du tout. Pas indispensable mais sympathique mais pas indispensable. Mais sympathique. Mais pas indispensable.
PS : jeu : combien de fois y a-t-il écrit " Johnny " dans cette critique ?

A voir : pour les fans de Johnny et de Luchini
Le score presque objectif : 6,5/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +/- 0, demandez à un fan de Johnny ce qu’il en pense

Sébastien Keromen