La Vie des Autres
Das Leben der Anderen
Sortie:
31/01/2007
Pays:
Allemagne
Genre:
Durée:
2h 17 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

La Vie des Autres

par: Olivier Sandoval

Gros succès en Allemagne, "La Vie des Autres" est un drame-étude réussi sur l'espionnage constant de la Stasi sur les intellectuels en RDA.

L'histoire
Dans la RDA des années 80, un officier de la Stasi doit espionner l'auteur Georg Dreyman et sa compagne, l'actrice Christa-Maria Siebland. Trop honnêtes pour être vrais, leur appartement est mis sur écoute par ordre du ministre de la Culture, épris de la comédienne et qui voit là un moyen d'élminer son rival. Pour le capitaine Wiesler qui est en charge de l'affaire, le temps de la mise en doute du bien-fondé de sa mission arrive avec les premières écoutes...


La critique
Le cinéma contemporain allemand s'exporte moins bien, ou plutôt moins souvent, que ses glorieux aînés. Il faut bien avouer que si l'on ne retrouve plus régulièrement à l'affiche les films d'un Wenders ou d'un Fassbinder, une sorte de buzz précède l'arrivée d'une production germanique : c'était le cas de Goodbye Lenin par exemple, et la situation se présente à nouveau pour La Vie des Autres.
Grand succès outre-Rhin et bardé de récompense européennes, ce premier film de Florian Henckel von Donnersmarck replonge dans la proche histoire de la RDA et de certains de ses aspects les plus sombres, l'espionnage constant d'un maximum de citoyens par la sécurité d'Etat, la Stasi. Le thème n'est pas très gai, son traitement non plus : atmosphère lourde, dénuement du décor, rues désertes, bâtiments austères... La réalisation fait également dans le sobre pour coller à son sujet, et c'est tant mieux.

La mise en situation se fait vite : on assiste donc, médusé, à l'écoute d'intellectuels est-allemand, pas franchement pro-ouest, par la police secrète. Habilement, le film dévoile les méthodes policièes, les usages bureaucratiques, les craintes des intellectuels, la vie quotidienne durant des dizaines d'années d'allemands de l'Est finalement, par des détails distillés sans trop lourdeur, mais dont la somme permet finalement de contribuer à l'installation d'une ambiance pesante. La Vie des Autres est remarquablement documenté de ce point de vue.
Allant au-delà de la simple description des menaces planant sur les intellectuels, le film met aussi en scène des réalités plus terre-à-terre : faveurs, interdiction de travail, filatures, chantage aux coucheries... La sécurité de l'Etat se confond vite avec la vie privée des membres influents du Parti.
Mais le point principal du film reste la position quasi centrale du capitaine de la Stasi chargé d'espionner les deux artistes. Passant de la théorie (il enseigne des cours d'interrogatoire) à la pratique (les écoutes des jours durants), il est confronté de plein fouet à la vie ordinaire de ses concitoyens qui ne sont plus dans le cadre inquiétants des bâtiments de la police.


C'est en abordant cette situation que La Vie des Autres est très habile, mais aussi parfois un peu moins. La difficulté réside en effet dans la sorte de revirement que doit opérer l'officier de sécurité, dans sa sympahtie, sa compréhension croissante envers ceux qu'il espionne, tout en remettant presque en cause le système dont il est au coeur. On croit modérément au policier zélé qui découvre l'art par l'espionnage d'intellectuels... En revanche la mise en abyme de l'auteur de théâtre manipulé comme un de ses personnages par une sorte de marionnetiste invisible au dessus de lui est particulièrement interessante. Les acteurs, tous excellents, servis par une photographie juste et une musique s'effaçant quand il faut, permettent d'adhérer à ces histoires parallèles les faisant se croiser, s'interroger, se soupçonner...
Le scénario est plein de finesse, et on ne sombre pas dans un suspense hollywoodien qui aurait été franchement décalé. A ce titre, cohérente avec l'ensemble du film, la fin est judiceusement choisie : en évitant bien des écueils et sans sombrer ni dans le mélodrame, ni dans l'action pure, La Vie des Autres réussit tout à fait son entreprise.


A voir : car les films allemands sont rares sur nos écrans...et quand ils parlent de leur Histoire trouble de façon réussie, ils n'en sont que meilleurs
Le score presque objectif : 7,5
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +3, habile, fin, documentaire, un film à voir