Blood Diamond : pour ou contre
Blood Diamond
Sortie:
31/01/2007
Pays:
USA
Genre:
Durée:
2h 22 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Blood Diamond : pour ou contre

par: Olivier Sandoval

"Blood Diamond" d'Edward Zwick aborde à la façon d'Hollywood la question des diamants de conflits en Afrique. Bien fait, mais formaté.

L'histoire
Danny Archer (Leonardo DiCaprio), ancien mercenaire devenu intermédiaire dans le marché du diamant en Afrique dans les années 2000, apprend lors d'un séjour dans une prison Sierra-Léonaise l'existence d'un énorme diamant caché par un ancien prisonnier des rebelles, Solomon (Djimon Hounsou). Danny veut le diamant, Solomon veut retrouver sa famille séparée par la guerre civile, et Maddy (Jennifer Connelly), une journaliste se greffant au duo, veut un scoop sur le trafic de diamant...



Pour, par Sébastien Keromen

Edward Zwick n’est pas un réalisateur irréprochable.
Si son Légendes d’automne a bien dû se faire pâmer un quarteron de jeunes filles grâce au beau Brad Pitt, il a aussi failli me faire mourir d’ennui. Et son Dernier samouraï alternait sans arrêt les scènes courageuses et intelligentes avec les clichés les plus éculés et ridicules. Pour Blood diamond, difficile de savoir à quelle sauce on allait être mangé. Surtout qu’il arrive après plusieurs films qui tentaient d’affronter de face les problèmes mondiaux actuels liés aux armes et à l’Afrique (notamment Lord of war, the Constant gardener), films qui n’hésitaient pas, à des degrés divers, à mettre les pieds dans le plat. Alors, Blood diamond, soupe hollywoodienne ou film courageux ?
Ben croyez-moi si vous voulez, mais film courageux. Pour deux raisons. D’abord il aborde de front le problème des diamants de guerre, celui des enfants endoctrinés dans les milices, et plus généralement celui des luttes sanglantes d’influence en Afrique, qui devraient vous faire perdre votre optimiste pour deux bons mois. Sans vraiment nous apprendre du nouveau, blasés que nous sommes par les JT, le film nous confronte directement à des mômes jouant avec des fusils mitrailleurs (puis ne jouant plus), à la violence gratuite et injuste qu’apporte la loi du plus fort. Ça ne fait pas un film, mais ça ancre déjà bien son histoire dans un cadre plus large et crédible, et peut même lancer le sujet et le débat, ça ne peut pas faire de mal.
Deuxième point courageux : le personnage de DiCaprio. C’était quoi le dernier film que vous avez vu où le héros est un salaud, et qui plus est un salaud qui ne s’amende pas ? Chapeau le scénariste, et surtout le mec qui a réussi à convaincre un studio de financer ça. Danny Archer est trafiquant de diamants, a la gâchette facile, et ne s’intéresse aux autres que pour les utiliser. Bien sûr, il a tout de même suffisamment de charisme et de bagout pour intéresser le spectateur, mais reste un " gentil " franchement pas très gentil (bon, c’est vrai que les " méchants " sont encore plus salauds que lui, mais pas beaucoup). On ne coupera pas tout à fait à la rédemption, mais celle-ci reste légère, et globalement cohérente avec son personnage, car ne changeant pas grand chose pour lui-même (difficile d’en dire plus sans raconter la fin). DiCaprio nous livre ici une prestation réussie, sans être toutefois exceptionnelle (sa nomination aux Oscars doit sans doute beaucoup au rôle lui-même).


Une autre bonne idée du film : Jennifer Connelly.
D’abord parce que c’est toujours une bonne idée d’avoir Jennifer Connelly dans un film, mais aussi parce que là elle est plus belle que jamais, tout en campant de façon vraiment très crédible un personnage pas simpliste. On regrettera juste que son personnage n’apparaisse pas pendant tout le film, ce qui vaudrait au scénariste d’être lynché sur l’heure, mais bon. Vraiment, chaque gros plan sur son visage vaut tous les paysages africains que le film dépeint. Pour clore le chapitre Acteurs, n’oublions pas Djimon Hounsou, toujours aussi beau et intense, et nous obtenons un trio d’acteurs qui vaut le déplacement à lui tout seul.
Concernant les autres aspects du film, il y a moins à dire. C’est dans l’ensemble du beau boulot, sans baisse de régime mais sans scène d’anthologie, avec des belles images de l’Afrique mais sans en faire une carte postale, une musique qui accompagne bien le film sans être inoubliable. Mais contentez-vous déjà de trois beaux acteurs, d’un scénario courageux qui mêle problèmes actuels et personnages non stéréotypés, c’est déjà pas si souvent…

A voir : pour les acteurs et l’histoire
Le score presque objectif : 7,5/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +2, ce n’est pas la grosse machine hollywoodienne que vous auriez pu craindre (mais c’est un peu dur et déprimant)

Sébastien Keromen


Contre, par Olivier Sandoval

Rien de surprenant dans ce film-produit de l'industrie hollywoodienne. Comme d'habitude, image, son, comédiens, rythme, action, décor (filmé en Afrique du Sud et au Mozambique)...tout est techniquement très au point. Le film nous emmène dans une Afrique en pleine guerre civile, mêlant trafic, lutte d'influence dans d'anciennes colonies, mission humanitaire et journalisme.
Dans la lignée des films récents comme Lord of War ou The Constant Gardener, le propos dénonce une situation africaine, ici le trafic de diamants. Mais comme on est dans un show hollywoodien, pas beaucoup de finesse dans le propos. Si on comprend bien les grandes lignes du problème, on a quand même droit a pas mal de philosophie de bazar et à de lourdes métaphores. Un peu dommage, car le scénario est bien documenté, et le film n'est pas à 100% dans le manichéisme. Mais entre l'idée et la façon de l'exprimer...

Alternant drame, thriller, aventure, guerre, mélo, Blood Diamond a le mérite de faire briller ses comédiens dans un scénario qui fonctionne, mais dont les articulations sont prévisibles depuis le départ. Difficile de faire pencher la balance, points forts et moments insipides se renvoyant constamment la balle : si l'action est impeccable, les scènes d'émotion se veulent trop larmoyantes, trop "à l'américaine" en fait.
Les personnages de DiCaprio, un salaud au grand coeur et de Connelly, une journaliste bercée d'idéaux mais qui ferait tout pour un scoop, sont très stéréotypés : leurs hésitations, leur revirements, leurs liens somme toute distants, font d'eux des héros un peu fadasses. Leur jeu n'est asolument pas en cause, ce serait plutôt les choix de montage (montrer la cruauté envers les civils sans ambage, mais plus que suggérer une relation amoureuse) qui affaiblissent l'histoire humaine.


Le sujet des diamants de guerre, enjeux des luttes entre gouvernements et rebelles manipulés par les occidentaux avides de pierres précieuses n'est pas trop mal traité, mais il méritait mieux que la fin pitoyable qu'Edward Zwick nous livre. Encore ce côté "à l'américaine" plutôt énervant : ils savent comment faire un film, mais dans le propos, il y a des efforts à faire... Et paradoxalement, on en arrive presque à une dénonciation politiquement correcte de la situation : tapant là où on s'y attend mais sans trop s'y attarder, ménageant la plupart des parties, dénonçant les injustices bien fort, l'ensemble reste malgré tout très lisse pour plaire à un maximum de publics.


A voir : pour une technique, des comédiens, des décors superbes
Le score presque objectif : 6
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +1, les fans de ces productions formatées ne seront pas déçus, les autres trouveront forcément à redire

Oliver Sandoval