Bruno et Malik vivent depuis 20 ans dans un monde à part, celui des enfants et adolescents autistes. Au sein de leurs deux associations respectives, ils forment des jeunes issus des quartiers difficiles pour encadrer ces cas qualifiés "d'hyper complexes". Une alliance hors du commun pour des personnalités hors normes.
Rarement un film aura aussi bien porté son nom, tant ce nouveau long métrage du duo Toledano Nakache l'est. D'abord parce qu'il aborde un sujet difficile à traiter au cinéma sans sombrer dans les clichés d'usage, mais également parce que qu'ils confrontent deux mondes radicalement opposés : celui du cinéma et sa superficialité et celui du handicap. Et pour mieux comprendre comment ces deux mondes se sont à nouveaux croisé, il faut remonter quelques années en arrière lorsque le duo réalise un documentaire sur une association qui accueille les handicapés dit les plus difficiles et développe une gestion alternative de leur pathologie, quasiment sans médicaments. Le titre est évocateur : "On devrait en faire un film". Une idée qui finit par germer, sans jamais inquiéter les deux acolytes. Ne restait plus qu'à mettre des mots puis des images et des corps sur cette idée.
Et comme ils en ont pris l'habitude depuis le début de leur carrière, les deux réalisateurs vont s'imprégner du réel et le retransmettre sans trop appuyer le trait.Car elle est là la véritable réussite du scénario, celle de s'adapter au personnage et non l'inverse. En s'inspirant des différentes personnes handicapées qu'ils ont pu croiser (chaque personnage fut réellement présent dans le documentaire qu'ils ont réalisé), Eric Toledano et Olivier Nakache ont donner une patine particulière à leur histoire. On ne rit pas de ces personnes, on ne se moque pas non plus, on éprouve, au contraire beaucoup de respect et de tendresse. Chaque victoire que gagne Joseph par exemple, est une bouffée d'air frais pour le spectateur. De même que les rapprochements entre Valentin et son accompagnateur Dylan permettent de mieux changer notre regard sur l'autisme.
Et justement ces accompagnateurs, ce sont eux aussi les héros de l'histoire, eux dont la dévotion, la force et la patience sont chaque fois poussées dans leur limite par des patients, évidemment, mais aussi pas les intervenant extérieurs, et notamment l'administration, qui ne jugent pas forcément à sa juste valeur la grandeur du travail de ces volontaires. Et justement la mise en scène du duo, comme d'habitude, ne manque aucun des détails, souple et efficace elle sait se faire discrète pour mieux se mettre au service de son histoire. Pas de plans compliqués ou trop artistique, le duo a compris que la simplicité était la clé de voûte de cette ambition de changer le regard à la fois sur le handicap moteur mais également sur le travail de ceux qui les accompagnent au quotidien. Jamais en manque se rythme, évitant chaque fois le mélo, les réalisateurs nous livrent une fois de plus une comédie tendre et attachante.
Et puis, il faut bien le dire aussi, la réussite tient également au fait d'une distribution très inspirée qui sait également se faire discrète pour mieux-être présente. A commencer par
Vincent Cassel (Mesrine) qui, pour une fois, fait dans l'humilité, dans la douceur même. Il adapte son jeu à ses partenaires pour ne pas venir les cannibaliser et offre ainsi sa meilleure prestation, toute en simplicité et en sobriété. Reda Kateb (Hippocrate) continue d’ajouter des prestations remarquables de précisions et de finesse. Mais la véritable grande surprise de ce nouveau film du duo Toledano Nakache, c’est bien sûr
Benjamin Lesieur, jeune handicapé qui vole littéralement la vedette au duo d’acteurs, mais également le jeune
Marco Locatelli, seul acteur à jouer un adolescent autiste, impossible à faire jouer par celui qui a inspiré le rôle, qui a su capter tous les mouvements, les déplacements et les attitudes nécessaires à son personnage. Pour finir sur la distribution, il faut tout de même rajouter que quasiment tous les accompagnateurs qui jouent dans le film, le sont réellement dans la vie et leur est d’un naturel désarment et participe, évidemment à la réussite du film.
En conclusion, « Hors Norme » vient, une nouvelle fois confirmer que le duo formé d’Eric Tolédano et Olivier Nakache est capable, non seulement d’ancrer une histoire en s’inspirant d’une réalité, mais est surtout dans la capacité d’utiliser l’outil cinéma pour transmettre des émotions et faire passer un message d’humanité et de tolérance sans jamais sombrer dans l’outrance, mais au contraire en se mettant au service de son sujet pour mieux le porter. Et cela fonctionne !