Jonathan Osborne, un garçon de 13 ans rêveur et orphelin de père, vit avec sa mère Anne. Il fait l’expérience de la cruauté au sein d’un club secret dirigé par un jeune despote sadique qui se fait appeler « Le Chef ». Lorsque sa mère s’éprend de Jim Cameron, un officier de marine fraîchement débarqué des États-Unis, l’adolescent développe progressivement une forme de jalousie envers lui. Sous l’influence de ses camarades, Jonathan entend se venger d’après les valeurs du groupe...
Lewis John Carlino fut d’abord l’un des scénaristes les plus en vue d’Hollywood. On l’a vu notamment chez John Frankenheimer (L’opération Diabolique) ou encore chez Martin Ritt (Les Frères Siciliens), C’est en 1976, que le scénariste va endosser pour la première fois le rôle de réalisateur pour adapter une œuvre remarquable de l’un des écrivains Japonais les plus célèbres : Yukio Mishima. Auteur vénéré et intouchable de la littérature nippone. Dans ce roman, l’auteur décrit un fossé toujours plus grandissant entre le monde de l’enfance et sa cruauté parfois gratuite et celui des adultes. Œuvre particulièrement sombre et nihiliste, qui n’hésite pas à aller jusqu’au bout d’une vision complexe et obscure de cette confrontation entre deux mondes, elle va trouver un écho, moins glaçant mais tout aussi sombre et inquiétante chez Carlino.
Car Lewis John Carlino, qui a également signé le scénario, va tisser une intrigue en se focalisant sur le personnage de Jonathan, un jeune garçon de 13 ans, introvertie qui cherche à trouver sa place, et se laisse influencer par « Le Chef », un camarade qui règne, tel un despote, sur sa bande de copains. Une influence néfaste qui va troubler encore plus l’adolescent lorsque celle-ci commence à fréquenter ce marin. Parallèlement, le garçon découvre son corps et le rapport à la sexualité qui vont exacerber ses pensées et ses doutes. Ses réactions ne sont pas toujours compréhensibles et c’est bien tout le sujet de ce film que de montrer une certaine vision pessimiste de l’enfance et de ce rapport complexe avec l’adulte. Rajoutez à cela une société anglaise très ancrée dans ses codes de fonctionnement, une mère dépassée depuis la mort de son mari, une aventure amoureuse qu’elle croyait impossible et les fantasmes parfois malsains de l’adolescence et vous aurez tous les ingrédients de cette œuvre sombre et inquiétante.
Le réalisateur cultive d’ailleurs cette ambiance inquiétante en jouant sur les contrastes de cette grande maison bourgeoise en borde de mer et la redoutable rigueur des marins qui font corps avec la mer qui ne cesse de les hanter. Les enfants évoluent dans des environnements épurés ou sombres qui rajoutent une sorte de distance entre les adultes et leur univers chargés avec la simplicité linéaire de la pensée des enfants. John Lewis Carlino va alors pousser le curseur en montrant la violence des enfants entre eux, as surtout envers les êtres qui les entourent, que ce soit le Chat ou les humains. Chacun répond aux codes du « Chef » qui se veut volontairement sadique et n’a aucune considération pour ses camarades, au point des nommer par le numéro qui correspond à sa place dans la hiérarchie. Une violence et un sadisme qui ne vont aller qu’en s’amplifiant.
Alors nous pourrions imaginer une fin des plus classiques, avec une conclusion qui ne laisse aucune place au doute, mais le réalisateur a l’intelligence de laisser le choix de la fin au spectateur. Il distille ses indices et laisse supposer d’une conclusion, à charge pour le public d’en choisir l’issue. Et outre le jeu des enfants particulièrement Jonathan Kane (The Chili Con Carne Club), qui joue Jonathan, le jeune héros du film et Earl Rhodes (Le Secret de la Pyramide) qui interprète « Le chef », dont les prestations mêlent innocence et précisions, « Le Marin qui abandonna la mer » est l’occasion de redécouvrir Kris Kistofferson (Les Routes du Paradis). L’acteur et chanteur de country, livre, ici l’une de ses plus belles prestations, tout en charme et en force, mais surtout en gardant une certaine douceur qui contraste avec la force qu’il dégage. Et puis évidemment, il y a bien sûr, Sarah Miles (La Fille de Ryan), icône du Swinging London, qui interprète avec puissance et douceur la mère de Jonathan, un brin, dépassée et très amoureuse.