Une petite ville des Etats-Unis à l'aube de la Première Guerre mondiale. Cal, jeune révolté, s'oppose, en faisant fortune, à son père qui lui préfère son frère.
Dans l’histoire du cinéma Américain, il n’y a pas d’équivalent à la carrière fulgurante de James Dean. L’acteur qui n’aura, au final connu que la présentation de son premier film, décéda d’un accident de voiture, alors qu’il achevait le tournage de son troisième. Pourtant, le mythe s’est inscrit dans le temps avec une sorte de frénésie qui n’a pas d’égale à ce jour. Et c’est en visionnant « A l’Est d’Eden » que l’on comprend mieux tout le gâchis d’une telle disparition, car le comédien, même inexpérimenté, apparait déjà avec une maturité de jeu qu’il est rare de voir. Instinctif, mais précis, méticuleux, y compris dans ses improvisations, James Dean ne se laisse pas impressionner par la présence à l’écran d’acteurs chevronnés tels que Raymond Massey (Sept hommes en colère). D’ailleurs le réalisateur Elia Kazan (Géant), qui fut celui qui repéra l’acteur, avait compris, que ce jeune homme, réputé difficile, pouvait utiliser toute sa colère intérieure pour donner à l’opposition entre le père et le fils toute la force nécessaire. Les deux acteurs entretenaient un rapport conflictuel qui transpire à l’écran comme dans cette scène culte où le père refuse l’argent que lui offre son fils. James Dean se laisse porter par ses sentiments et transporte son jeu au firmament des stars.
Côté scénario, il faut tout de même noter que le scénariste Paul Osborn (Madame Curie) et le réalisateur ont décidé de ne s’intéresser qu’à une petite partie du livre de Steinbeck, notamment celle où Cal et son père sont en opposition totale et qui permettait de refléter au mieux les conflits de générations. Toutefois l’équipe parvient à donner à l’œuvre du romancier américain toute l’intelligence et toute la subtilité de cette peinture d’une société en pleine mutation qui s’apprête à rentrer en guerre. Si Steinbeck savait parfaitement décrire les rapports avec toutes ses nuances et particulièrement toutes ses noirceurs, Elia Kazan donne une vision de l’Amérique traditionaliste qui ne parvient pas à accepter les changements. Une vision parfois idéaliste où les traditions et les valeurs sont parfois plus emprisonnantes que les volontés.
En conclusion, « A l’Est d’Eden » est une œuvre majeure dans l’histoire du cinéma Américain d’abord parce qu’elle est le symbole de la naissance d’un mythe, celui de James Dean, mais également parce que cette adaptation de Steinbeck, si elle ne fait pas l’unanimité, a le mérite de s’intéresser avec intelligence et finesse aux difficiles rapports entre un homme et son fils.