Un riche industriel, tué lors d'un accident de voiture, revient sur terre pendant douze heures, afin de réparer ses fautes commises.
Nous sommes 6 ans après la fin de la guerre, l’Italie a tourné la page du fascisme, pendant que la France continue de panser ses plaies. Deux studios majeurs Pathé d’un côté et Cines de l’autre, s’associent pour produire un film avec la star Jean Gabin en tête d’affiche. Ce dernier trouve, ici dans cette production, la possibilité de revenir sur le devant de la scène avec un physique qui après-guerre a changé, il a vieilli, ses cheveux sont devenus blancs, et il ne peut plus jouer les héros comme dans le passé. Ici, il trouve un rôle à sa hauteur et une possibilité de participer également à panser les plaies de son pays, à sa manière.
Mais voilà, « Pour l’amour du Ciel » est un film qui décevra pour bien des raisons. D’abord par ses résultats, puisque le film dépassera, à sa sortie en salle, assez péniblement les 600 000 entrées. Un échec qui est notamment dû, certainement à plusieurs facteurs, dont le premier est évidemment, le changement d’apparence et de style de la star Jean Gabin, qui, ici, ne va plus jouer les jeunes premiers, baroudeurs et représentant d’une génération. Ensuite il y a, bien sûr le choc de deux styles, le classicisme d’un cinéma Français qui aime toujours rester dans ses rails (quelques années plus tard, le mouvement de la nouvelle Vague, viendra, plus ou moins justement le lui reprocher) et le néo réalisme Italien toujours présent dans les œuvres produits par le studio latin. Beaucoup d’éléments qui n’iront pas en la faveur du film, d’autant que les stigmates de la guerre sont toujours bien présents et bien ancrés dans les esprits.
Pourtant le film de Luigi Zampa, malgré des façons de travailler différentes et des visions artistiques divergents, va finir par faire un joli numéro d’équilibriste. Le film n’est pas une réussite totale, mais il a le bon goût de trouver une sorte point de croisière entre les deux styles et offre parfois de très bons moments, comme lorsque Santini relate ses déboires qui l’ont mené à l’hôpital et dont il impute la responsabilité directement à Carlo Bacchi. On retrouve toute la folie, l’énergie d’un cinéma Italien qui fera sa réputation dans une vision, parfois burlesque, mais qui s’articule toujours sur un regard très proche socialement de la société. Cela donne des passes d’armes particulièrement savoureuses entre les deux personnages, qui ne se comprennent pas et ont tous les deux des ambitions bien différentes l’un de l’autre.
Jean Gabin 'Quai des Brumes) est à l’orée d’une nouvelle carrière dont il ne cessera, par la suite, de forger son personnage, de patriarche à la verve bien particulière et dont les tirades resteront dans les mémoires collectives. Face à lui Julien Carette (La Grande Illusion) n’est pas un débutant et l’acteur, qui rencontrera Gabin dans d’autres production, ne se laisse pas voler la vedette et parvient à s’imposer dans ce personnage qui va se situer entre dépression et envie innocente de vengeance. Le duo fonction parfaitement, et même si la réalisation peut paraître, parfois, un peu trop théâtrale, notamment dans les scènes d’intérieur, le film n’en demeure pas moins une agréable satire sur les distensions dans cette société d’après-guerre entre les industriels fortunés qui profitent allègrement de la reconstruction en oubliant inévitablement, les masses plus populaires qui continuent de souffrir d’une société qui les laisse en marge.