Au cœur de l’Amazonie, un paléontologue découvre un fossile de main appartenant à une espèce inconnue. Persuadé qu’il s’agit du chaînon manquant entre l’homme et le poisson, il rassemble une expédition pour exhumer le reste du squelette. L’équipe décide alors de descendre le fleuve en bateau, s’enfonçant dans un territoire sauvage et poisseux, sans se douter que les eaux abritent encore l’étrange créature…
Sous l’impulsion de Carl Laemmle et Irving Thalberg, notamment avec la première adaptation du roman de Victor Hugo : « Notre Dame de Paris » en 1923, le Studio a créé tout un bestiaire de monstres qui a vu apparaître des icones du film d’horreur, tels que « Le Fantôme de L’Opéra » en 1925, sous la direction de Rupert Julian (Chevaux de Bois) ou encore « L’Homme qui rit » en 1928 par Paul Leni (The Cat and The canary), puis sous la direction de Carl Laemmle Jr. qui reprendra les productions pour le compte d’Universal : « Dracula » (1931) de George Melford et Enrique Tovar Avalos, « Frankenstein » (1931) de James Whale ou encore « La Momie » (1932) de Karl Freund et bien sûr « Le Loup-Garou » de George Wagner en 1941. Carl Laemmle Jr va donc permettre de garde le studio sur le devant en pleine période de Grande dépression et fit naitre des stars comme Bela Lugosi (Dracula), Boris Karloff (Frankenstein) ou encore Lan Chaney (Le Bossu de Notre Dame). Es acteurs qui seront, tout au long de leurs carrières marqués par ces rôles.
Depuis le début du cinéma, les réalisateurs et producteurs n’ont eu de cesse de vouloir présenter des films en relief pour mieux imprégner les spectateurs avides de sensations fortes et qui peut, également, dans une certaine mesure, rappeler que le cinéma fit ses débuts dans les foires du monde entier, et que « L’Arrivée du train en gare de La Ciota » des Frères Lumières en 1896, provoqua un mouvement de panique chez les spectateurs, persuadés que le train leur fonçait dessus. Ce besoin de sensations fortes fut à l’origine du succès des fims de Monstres chez Universal, dés 1923, nous l’avons vu, mais le studio se devait de provoquer de nouvelles sensations, et le Relief était l’argument de vente idéal. Le premier film à sortir en relief fut « Bwana Devil » (1952) de Arch Oboler pour le compte de la United Artists, suivi « House of Wax » (1953) d’André de Toth pour le compte de la Warner puis « « It Came From Outer Space » (1953) de Jack Arnold qui travaillait pour Universal. Et c’est l’année suivante, en 1954, que ce dernier Studio, en la personne de William Alland (Tarantula) demanda à Jack Arnold de réaliser « L’étrange créature du Lac Noir ».
L’idée est venue à William Alland d’une anecdote racontée par un réalisateur de documentaires en Amazonie, qui avait parlé de l’existence de créatures Préhistoriques dans les coins reculés de la forêt. Le producteur mélangea cette anecdote avec les écrits de H.P. Lovecraft (L’Appel de Cthulu) et cela donna naissance à une créature Mi-Poisson Mi-Humaine, qui vivrait dans les fonds d’un lagon au cœur de l’Amazonie, connu sous le nom de Lac Noir. Comme toujours à cette époque, les hommes sont courageux et avides et les femmes séduisantes, suscitant les émois de la créature. La liste est longue de monstres fondant pour les beaux yeux d’une belle, « King Kong » (1933) en premier. La mise en d’Arnold n’a d’ailleurs rien de surprenante, en ce sens qu’elle reprend tous les codes de la narration de l’époque. Mais alors, pourquoi « L’Etrange créature du Lac Noir » a-t-elle plus marqué les esprits que les autres productions de ce type ?
Et bien déjà nous pouvons avancer l’argument Relief, puisque le film fut tourné de manière à être projeté dans tous les cinémas avec cette technologie, mais aussi parce que le réalisateur a monté toute une équipe qui filma sous l’eau, la créature, y compris dans ses combats. Et puis il y a bien sûr l’histoire en elle-même ! Puisqu’ici, si les codes de narration sont les mêmes que dans bons nombres de films autour des monstres, « La Créature du Lac Noir » vit paisiblement dans son Lagon et ce sont les hommes qui viennent perturber son environnement, à la manière de quelqu’un qui entrerait chez vous sans y être invité. Le costume imaginé par Jack Arnold lui-même, confère à la créature, une espèce de sympathie voulue ou non, qui la rende à part dans tout le bestiaire d’Universal. Le jeu très visuel du coup, de l’acteur Ben Chapman (Shogun) va d’ailleurs dans ce sens en rendant la créature, effrayante, peut-être, mais surtout touchante.