Mariée à Ivano, Delia, mère de trois enfants, vit à Rome dans la seconde moitié des années 40. La ville est alors partagée entre l’espoir né de la Libération et les difficultés matérielles engendrées par la guerre qui vient à peine de s’achever. Face à son mari autoritaire et violent, Delia ne trouve du réconfort qu’auprès de son amie Marisa avec qui elle partage des moments de légèreté et des confidences intimes. Leur routine morose prend fin au printemps, lorsque toute la famille en émoi s’apprête à célébrer les fiançailles imminentes de leur fille aînée, Marcella. Mais l’arrivée d’une lettre mystérieuse va tout bouleverser et pousser Delia à trouver le courage d’imaginer un avenir meilleur, et pas seulement pour elle-même.
Dés que l’on parle de plus de 5 Millions d’entrées, même si c’est en Italie et qu’en France, le film s’est contenté d’un peu plus de 600 000 entrées, il est bon de prêter l’oreille et les yeux à cette histoire qui surprend par la tonalité et le mélange des genres. Car la réalisatrice Paola Cortellesi , qui passe ici pour la première derrière la caméra, elle qui nous avait déjà touché dans la série « Petra », a décidé de parler des femmes, à une époque où la libération ouvrait des envies d’émancipation, de liberté tout simplement, face à des hommes qui ne voulaient pas les faire travailler ailleurs que chez eux, qui ne les considéraient comme des bonnes à tout faire et dont la violence était quotidienne.
Et pour mieux ancrer son récit dans une part de l’histoire Italienne, la réalisatrice a décidé d’utiliser un Noir et Blanc puissant et marquant qui rappelle le néoréalisme qui fit les grandes heures du cinéma Italien dans les années 50, et qui se voulait une peinture sans concessions de la condition des hommes et des femmes en Italie. Ici, Paola Cortellesi, s’intéresse surtout à la condition des femmes dans l’immédiate après-guerre, et de leur place dans cette société patriarcale qui ne leur laissait aucune place, mais qu’elles sont parvenues à casser en s’imposant comme les véritables natures fortes de cette société qui pansait ses blessures d’une dictature fasciste qui laissa des traces chez les plus pauvres. La mise en scène de la réalisatrice est sobre, mais pourtant particulièrement inventive, pour mieux marquer les esprits, comme lors de cette scène où l’héroïne se fait battre par son mari et qui se transforme en pas de 2.
Par une écriture fine et parfaitement maitrisée, la réalisatrice va alors nous emmener dans plusieurs pistes pour mettre en ligne les différentes façons que les femmes ont eu de prendre le pouvoir et comment elles ont dit se battre pour se défaire de la pince patriarcale, qui n’est, malheureusement, pas encore totalement desserrée en Italie, aux vues des débats que suscita le film de l’autre côté des Alpes. Il n’en demeure pas moins que « Il Reste encore demain » de Paola Cortellesi, reste un film majeur, un premier film d’une incroyable maturité qui ne se laisse pas impressionner par son sujet et a l’intelligence de ne pas s’écarter de son but ultime : Montrer l’importance de la place de la femme dans la société. Alors, bien sûr, le film est italien, il parle donc de la société en Italie, et plus particulièrement de l’après-guerre, mais, à bien y réfléchir, le film parle de nos sociétés actuelles, dans une majorité de notre globe, où les femmes continuent d’être remisées à la seconde place, alors qu’elle porte les clés de notre humanité.
Pour conclure, impossible de ne pas parler des prestations justes, touchantes et précises des deux acteurs principaux : Paola Cortellesi, bien sûr qui joue constamment entre force, peur et soumission dans une palette de jeu absolument remarquable. Et puis Valerio Mastandrea, que l’on avait déjà remarqué dans « Pasolini » d’Abel Ferrara en 2014, et qui signe, ici, une de ses plus belles compositions tout en fureur contenue, ou pas, et en froideur.