La mort d'une vieille femme, quelques heures avant l'expiration de son assurance vie, éveille les soupçons de l'avocat des assurances. Pour tenter d'éclaircir cette affaire douteuse, il décide d'enquêter. Il entre en contact avec la famille et se rapproche de Cinzia, l’une des filles de la défunte. Leur relation va alors prendre un tour inattendu.
Le réalisateur Italien Luigi Comencini, est certain l’un des moins populaires de sa corporation, il a pourtant signé des petits de bijoux comme « Pain Amour et Fantaisie » en 1953 ou encore une version baroque du célèbre conte de Carlo Collodi : « Pinocchio » et certainement l’une des plus fidèle adaptations. Pourtant Comencini ne semble pas avoir le rayonnement d’un Fellini (La Strada) ou d’un Pasolini (Le Décaméron). Pourtant le réalisateur avec « Sans Rien Savoir d’elle » nous prouve sa capacité à être minutieux dans sa mise en scène et dans sa capacité à jouer avec les styles pour les faire s’imbriquer sans jamais sortir du cadre de sa narration.
Car, ici, il va nous embraquer dans les pas d’un avocat travaillant pour compagnie d’assurance qui soupçonne une fraude à l’assurance, après la mort étrangement subite d’une vieille dame fortunée. Le magistrat va alors enquêter et croiser la route de l’une des héritières, peut-être la plus inattendue de la fratrie et la plus rebelle aussi. Le film va lors virer à l’histoire d’amour complexe où chacun se laisse aller à ses sentiments, en oubliant presque, les origines de leur rencontre. Luigi Comencini qui a signé le scénario avec Suso Cecchi d’Amico (Le Guépard), Raffaele La Capria (La Belle et le Cavalier) et Antonio Leonviola (Maciste, l’homme le plus fort du monde), va ainsi explorer les méandres de l’amour et particulièrement son impossibilité dans un univers de suspicion, où l’on en vient à se demander qui manipule qui et qui est amoureux de l’autre.
Avec de multiples rebondissements, mais, surtout, avec une mise en scène précise qui va constamment opposer des décors aux formes géométriques tranchées et la complexité des personnages et de leurs sentiments. C’est aussi, un magnifique portrait de femme, qui, au frémissement des années 70 d’une prise de conscience et d’une lutte pour l’égalité des femmes qui se fait plus présente, va épouser son parcours et sa liberté de ton et de mouvement. A travers le regard de l’avocat, habitué à séduire les femmes, il va ici, se retrouver entrainer dans une histoire d’amour qu’il croyait maitriser mais qui lui échappe constamment. Par cette ronde des sentiments mêlée à une enquête sur la mort de la riche aïeule, Comencini signe ici, une œuvre majeure qui ne met la femme dans la sécurité des bras d’un homme, mais au contraire, une femme libre et affranchie du patriarcat qui lutte pour son identité.
Pour conclure, saluons, la prestation remarquable de justesse et de retenue de Paola Pitagora (Le Serpent). L’actrice, assez peu connue en France, porte le film sur ses épaules et capte la lumière et l’image comme rarement à cette époque. Elle inscrit son jeu dans la veine dans ce qui se fera de mieux dans le mouvement de « La Nouvelle Vague ». Face à elle l’acteur Français Philippe Leroy (Nikita) impose un style qui s’inspire largement de Bogart et de Belmondo version A bout de Souffle, avec à la fois un charisme présent et une douceur de jeu presque à minima pour donner plus de crédit à son personnage. Le duo fonctionne remarquablement et l’on se laisse porter par leur dualité et leur attraction. « Sans Rien Savoir d’elle » est un film inédit en France, malgré toute ses qualités, qui est à découvrir d’urgence.