L’histoire
Chauffeur passé maître dans l’art de faire échapper les braqueurs aux forces de police, le Driver est traqué par un inspecteur pugnace.
Critique
Sorti en 1978, soit trois ans après Le bagarreur (Hard Times), Driver est le deuxième long-métrage réalisé par Walter Hill. Œuvre méconnue, un peu oubliée, le film bénéficie aujourd’hui des honneurs de la haute définition.
C’est triste à dire mais Walter Hill, soixante-treize ans à l’écriture de ces lignes, fera sans doute partie de ces artistes dont on ne mesurera pleinement l’importance qu’à titre posthume (trop tard donc ...). Car force est de constater que Hill demeure un cinéaste mésestimé, loin d’être apprécié à sa juste valeur. Dénigré par une partie de la critique, le réalisateur est souvent considéré comme un basique entertainer incapable de la moindre psychologie (voir, par exemple, la notice que lui consacrent Tavernier et Coursodon dans leur ouvrage 50 ans de cinéma américain). Paradoxalement, le principal grief formulé à son encontre est justement ce qui fait la grande qualité de son cinéma : une certaine sécheresse, un style direct, dégraissé à l’extrême. Une vision « pure » de la mise en scène (Hill ne jure que par le western et le cinéma de Kurosawa) et une approche narrative qui font de lui une espèce de Dashiell Hammett du cinéma d’action. Un film de Walter Hill, c’est comme un verre de whisky avalé d’une seule traite. C’est rapide et ça claque. Certes, on pourra toujours rétorquer que le monsieur n’a pas fait que du bon et que sa filmographie est peu reluisante depuis les années 2000. C’est vrai. Cela étant, faut-il pour autant oublier que ce vieux briscard d’Hollywood a signé une série d’œuvres à la fois populaires et de qualité, où brillent au moins deux joyaux impérissables (Les guerriers de la nuit et Sans retour) ? Certainement pas.
S’il n’est pas son meilleur film, Driver incarne néanmoins le style de Walter Hill. Dans ce « thriller abstrait », tout passe par les visuels. L’esthétique y est primordiale. C’est l’image qui fait sens. Toujours. Old school au possible, Driver déploie une délicieuse patine seventies (image argentique texturée, visuels nocturnes très sombres), une superbe ambiance urbaine et ce fameux travail de mise en scène. Une réalisation carrée, directe, signifiante. La patte de Walter Hill, assurément. Sans fioritures, presque mutique (pas un mot de trop), le métrage se pose comme un bon vieux duel entre deux hommes : le Driver (Ryan O’Neal) et l’inspecteur (Bruce Dern). Deux personnages presque réduits à de simples figures universelles (on ne connaîtra d’ailleurs jamais leurs noms). Deux archétypes immuables. Le hors-la-loi et le justicier. Simple et rudement efficace, à l’image des séquences automobiles qui rythment le film avec brio (la longue poursuite d’ouverture, la démonstration dans le parking, la traque dans l’entrepôt).
Verdict
Près de quatre décennies après sa sorties en salles, Driver reste une série B grisante. Un certain Nicolas Winding Refn s’en est d’ailleurs bien souvenu, lui rendant un vibrant hommage avec Drive ... remake officieux du film de Walter Hill.