Michel Racine est un Président de cour d'assises redouté. Aussi dur avec lui qu'avec les autres, on l'appelle " le Président à deux chiffres ". Avec lui, on en prend toujours pour plus de dix ans. Tout bascule le jour où Racine retrouve Ditte Lorensen-Coteret. Elle fait partie du jury qui va devoir juger un homme accusé d'homicide. Six ans auparavant, Racine a aimé cette femme. Presque en secret. Peut-être la seule femme qu'il ait jamais aimée.
Un film avec Fabrice Luchini c’est presque l’assurance d’avoir un film qui sait parfaitement aborder un sujet tout ayant la profondeur d’un scénario qui se veut à la fois léger et tranchant. Avec « L’hermine », l’acteur ne change pas forcément de registre, on reconnait la mise en valeur du phrasé, cette capacité du comédien à dire, même sans parler. Toujours précis dans ses gestes, dans ses postures et dans ses regards, Fabrice Luchini est certainement l’un, si ce n’est le plus grand acteur français. Un amoureux des mots et de la chanson qu’ils peuvent provoquer, qu’elle soit triste, mélancolique ou joyeuse et entraînante.
Et Christian Vincent, prouve, avec ce film, qu’il sait mettre en valeur le travail de ses acteurs. Et plus qu’une succession de répliques, c’est le charisme dans la simplicité qui fait toute la nuance de son talent de metteur en scène. Comme il l’avait fait dans « Les saveurs du Palais » avec Catherine Frot, le réalisateur ne cherche pas la complexité, il utilise la nature de ses comédiens pour mieux mettre en valeur son sujet. Dans ce cas précis, les coulisses d’une cour d’assise avec à la tête son président, que l’on présente austère, distant, et froid. En y greffant une histoire d’amour, et une galerie de personnages qui viennent, au contraire faire opposition au personnage principal, Christian Vincent parvient à le rendre attachant, touchant et d’un seul coup toutes les rumeurs qui foisonnent autour de lui apparaissent bien fades au regard de son professionnalisme et de l’attachement qu’il porte à ses audiences, pour que le procès soit mené à son terme dans la plus stricte règle d’un tribunal.
Et c’est d’ailleurs toute la force de ce scénario que de nous plonger dans les coulisses d’un tribunal d’assise, avec ses contradictions, ses doutes et sa violence qui transpire à chaque témoignage ou à chaque exposition des faits. On suit le parcours de ce procès à travers le regard des jurés, on s’interroge, on se fait notre idée, et au détour d’un témoignage ou d’un autre, on doute, et surtout on apprend à quel point rendre la justice peut-être frustrant autant que valorisant, parce que ces hommes et ces femmes qui ne sont que des êtres humains doivent décider du sort d’un autre par une faute qui lui est reprochée. Ils doivent effacer le doute, étudier les preuves, malmener les témoins sans en avoir l’air, pour mieux répondre aux questions qui amèneront les jurés à la conclusion définitive. Et puis il y a le jugement en son âme et conscience, les règles de la justice, les préjugés, les assurances et les doutes.
Et puis « L’hermine » c’est aussi une distribution, on a parlé de Fabrice Luchini, sans surprise, constant et grandiose dans un film taillé pour lui, et puis il y a Sidse Babett Knudsen (The Duke of Burgundy) qui fut couronnée du césar de la meilleure actrice dans un second rôle. Sans vouloir polémiquer, ni remettre en question le talent de l’actrice, au demeurant impeccable dans sa prestation, à la fois rayonnante et intrigante, ne vient tout de même pas surpasser le travail d’une Sara Forestier dans « La tête haute » ou encore d'une Noémie Lvovsky dans « La belle saison ». L’actrice danoise impose, un magnétisme crédible et offre à Luchini l’occasion de jouer dans toute sa nuance.
En conclusion, « L’hermine » de Christian Vincent est film qui donne une nouvelle fois l’occasion à Fabrice Luchini de faire preuve de tout son talent dans un rôle, où les mots sont aussi importants que les silences. Ou la manière de dire est aussi importante que celle d’écouter. Porté par un scénario impeccable de précision et une mise en scène parfaitement maîtrisée, le film est une véritable immersion dans les coulisses d’un procès d’assise.