Chili, 1973. Le Général Pinochet s'empare du pouvoir par la force. Les opposants au coup d'Etat descendent dans la rue. Parmi les manifestants, un jeune couple, Daniel photographe et son ami Lena. Daniel est arrêté par la nouvelle police politique. Il est conduit dans un camp secret, caché dans un lieu reculé au sein d'une secte dirigée par un ancien nazi. Une prison dont personne n'est jamais sorti. Pour retrouver son amant, Lena va pourtant rentrer dans la Colonia Dignidad.
Difficile de rester insensible à une histoire aussi dure et violente que celle de ce couple, qui sombra dans l’horreur de la dictature Chilienne et y découvrit les pires atrocités commises par un ancien dirigeant nazis réfugié en Amérique du Sud, et qui y pratiqua ce qu’il savait le mieux faire détruire des vies par la torture physique, mentale ou génétique. Car ce Dr Shaffer, en plus d’être un nazis en fuite qui propose ses services à un dictateur sanguinaire et vicieux, s’octroya le droit de manipuler la génétique en retirant les enfants des femmes qu’il avait sous sa coupe, dés leur naissance afin de les élever à l’écart, pour ensuite devenir des objets de soulagement sexuels et ensuite des membres de sa prétendue secte. Une secte qu’il dirigeait par la violence et la souffrance !
Et durant son temps libre, le Dr se voyait confier par le régime des dissidents, à qui il faisait subir les pires tortures pouvant aller jusqu’à l’essai de nouvelles techniques de meurtres. Tout cela avec l’approbation d’un régime qui fit mine de ne pas savoir. Avec des ramifications un peu partout dans le pays qui lui conférait une impunité quais totale, Shaffer trouva un terrain de jeu idéal pour ses abjectes desseins, jusqu’à son arrestation en 2005.
Le réalisateur signe d’ailleurs une œuvre, qui peut paraitre inégale dans son rythme mais qui, au final se révèle particulièrement efficace dans sa construction, notamment dans son dénouement puisqu’il signe une mise en scène comme le fit en son temps Alan Parker avec son « Midnight Express », avec tout d’abord une présentation rapide et presque superflue des personnages pour ensuite plonger quasiment immédiatement dans l’enfer de cette colonie. De cette partie du film, on ne peut pas en sortit indemne, car la mise en scène, si elle garde une certaine sobriété, sait surtout plonger le spectateur dans un enfer dont il ne parvient pas à imaginer ce qui est faux ou vrai. Jamais dans le voyeurisme dégoulinant mais plutôt dans la retenue, dans la suggestion, le réalisateur signe un scénario et un mise en scène précise qui n’a de but que celui de mettre ne lumière l’horreur de camps dont on veut nous faire croire qu’ils ne sont qu’une simple affabulation.
Côté distribution, Emma Watson (Harry Potter) et Daniel Brühl (Goodbye Lenine) campent un couple cohérent. Jamais dans la caricature ni dans le trop d’émotion, les deux comédiens se laissent porter par des compositions habitées ou chacun doit jouer un rôle dans le rôle pour mieux comprendre ce qui se passe autour d’eux. Du début à la fin, le couple porte le film sur ses épaules et s’en sort à merveille, avec une justesse de ton assez rare chez des acteurs si jeune. Emma Watson confirme qu’il y a bien une vie après « Harry Potter » et que son engagement pour le droit des femmes est en train de trouver un sens à sa carrière.
En conclusion, « Colonia » fait partie de ces films qui ne peuvent vous laisser indifférents tant ils portent un message de devoir de mémoire pour toutes les victimes du régime Pinochet qui ne verront jamais leurs mémoires lavées de ces horreurs.