Coureur de jupons alcoolique et narcissique, Patrick Melrose est un pur produit de l'aristocratie britannique. Cet homme aux tendances schizophrènes et suicidaires a connu une enfance privilégiée mais profondément traumatisante, au sein d'une famille pour le moins dysfonctionnelle. Le décès de son père tyrannique va très vite faire remonter à la surface de pénibles souvenirs...
Voilà une série redoutablement intrigante menée tambour battant par un Benedict Cumberbatch, littéralement habité par ce personnage hors du commun qu’est Patrick Melrose. Avec un CV Pathologique aussi terrifiant que : Alcoolique, Narcissique, Schizophrène, Suicidaire et Junkie, autant le dire la composition d’un tel personnage est un exploit pour l’acteur qui le prendrait à bras le corps. Des mots même de Benedict Cumberbatch Melrose partage bien des points communs avec « Hamlet» de Shakespeare notamment cette déconstruction de la figure paternelle avec cette souffrance interne et physique. Adapté de la saga littéraire d’Edward St Aubyn, journaliste et écrivain britannique, dont chaque volume correspond à un épisode de la série : « On the Edge », « Some Hope A Trilogy », « Mother’s Milk », « At Last » et « Lost For Words », la série a relevé le défi de mettre en image une histoire en partie auto biographique.
Et autant le dire, avec l’aide du scénariste David Nicholls (Loin de la Foule déchaînée) qui signe là un scénario puissant aux multiples inspirations, et Edward Berger (Deutschland 83) à la réalisation, le projet d’adaptation promettait de grandes choses. Et nous ne sommes pas déçu ! Avec des épisodes qui possèdent leur propre existence, notamment provenant d’une matière propre, la série ne ressemble à aucune autre. Par exemple fait penser à « Trainspotting » de Danny Boyle, avec un personnage qui lutte contre son addiction et plonge dans une série d’hallucinations dévastatrices tout autant que salvatrices, ou encore le deuxième qui fait penser « Call Me By Your Name » de Luca Guadagnino, avec cette atmosphère de vacances de liberté et en même temps de grandes confusions. On l’aura compris, les épisodes ont chacun une peinture différente qui se réfère à différentes inspirations du réalisateur et de son scénariste.
D’ailleurs la série est une réussite, d’abord car le réalisateur aborde un sujet tellement confus et sensible qu’il fallait une mise en scène intelligente et sensible pour pouvoir l’aborder sans rentrer dans le voyeurisme. Notamment, Lorsque l’enfant subit les agressions sexuelles de son père, il suffit d’un plan sur un lit parfaitement fait avant que le garçon ne rentre, une porte qui se ferme ensuite, une caméra qui s’éloigne dans un silence presque assourdissant, puis un plan suivant montrant le lit défait et l’on comprend toute l’horreur du drame qui s’est joué dans cette pièce. Ou alors une superposition psychédélique de plans pour laisser transparaître à l’écran toute la confusion qui règne dans l’esprit de Patrick Melrose. Pour la déconstruction de la figure paternelle, il suffit d’une scène, où le fils tente de détruire dans un aspect de fureur l’urne qui contient les cendres de son père.
Dans la série Benedict Cumberbatch (La Désolation de Smaug) y est grandiose en puissance et en folie. Littéralement habité par le personnage qu’il porte au panthéon des plus grandes compositions de personnages torturés. Et puis il y a
Hugo Weaving (Matrix), terrifiant, repoussant mais grandiose et incroyablement juste dans sa prestation. Et puis bien sûr
Jennifer Jason Leigh (Jeune Femme Partagerait Appartement) somptueuse en femme alcoolique et dépendante aux médicaments.