Peu de temps après les événements relatés dans Split, David Dunn - l’homme incassable - poursuit sa traque de La Bête, surnom donné à Kevin Crumb depuis qu’on le sait capable d’endosser 23 personnalités différentes. De son côté, le mystérieux homme souffrant du syndrome des os de verre Elijah Price suscite à nouveau l’intérêt des forces de l’ordre en affirmant détenir des informations capitales sur les deux hommes…
Après des années d’errances un peu forcées par des échecs commerciaux et critiques comme « La Jeune fille de l’Eau », « The Last Airbender » ou encore « After Earth », le réalisateur M. Night Shyamalan a retrouvé le chemin du succès en croisant la route du producteur Jason Blum, grand maître de l’horreur à petit budget qui rapporte des sacs entiers de billets verts dans ses caisses. Un choix de minimiser les budgets au maximum pour pousser les réalisateurs à aller plus loin dans leurs recherches artistiques et à ne pas se reposer trop systématiquement sur les effets spéciaux devenus quasiment inévitables dans les productions de genre. Et pour un réalisateur comme Shyamalan, toujours à la recherche d’une structure narrative complexe, qui puisse chaque fois surprendre son auditoire, une telle démarche ne pouvait que l’amener à reprendre effectivement la route du succès en mettant en avant ses talents de narrateur et nouveau maître de l’ambiance oppressante. Avec « The Visit », où il reprenait le mythe du conte « Hansel et Gretel » avec un brio toujours aussi désarmant, le réalisateur retrouva le succès, et put ensuite prendre tout le monde par surprise avec « Split », l’histoire d’un psychopathe souffrant d’un dédoublement de 23 personnalités.
Si la fin était, comme bien souvent avec le réalisateur, un peu frustrante, parce que trop facile, M Night Shyamalan, nous prenait par surprise avec une scène post générique, qui nous révélait que ce film était en fait le deuxième volume d’une trilogie engagée vingt ans plus tôt avec « Incassable » dans lequel un homme, spécialiste de comics, tentait de faire prendre conscience à un autre, qu’il était un super-héros. Sans vouloir révéler le contenu du film, pour tous ceux qui n’auraient pas eu le loisir de le découvrir, comme d’habitude le réalisateur avait soigné son scénario et s’amuser à prendre le mythe du super héros dans le sens inverse, de ce qu’il se fait maintenant. Et avec « Glass », donc il pousse la logique encore plus loin, en ne sacralisant pas les personnages, bien au contraire mais en les confrontant à un monde réel qui vit de fantasmes mais ne veut pas les assumer s’ils se révèlent réels. Ici, donc Elijah Price, qui se fait appeler Mr Glass, en rapport avec sa maladie des os de verres, David Dunn, l’homme incassable, et Kevin Crumb et ses multiples personnalités vont se retrouver pour un affrontement qui se veut plus compliquer qu’il n’y parait. Notamment parce qu’ils sont enfermés dans un hôpital psychiatrique qui n’a pas vraiment l’intention de les laisser sortir.
Et le scénario va donc enfoncer le clou de ce qui avait déjà été le principe d’« Incassable », avec une trame qui va se centrer sur les nuances de ces personnages, les plonger entre folie et détermination. Les rendre humains avant de les sacraliser, pour ensuite les pousser dans leur retranchement pour pouvoir prendre à revers le principe de lecture d’un comics. Ici le réalisateur insiste sur leurs fêlures, leurs traumas, ce qui les a rendus associables, pour ensuite mieux mettre en lumière les tensions qui vont naître inévitablement, d’abord d’un Kevin Crumb, dont la bête (Sa personnalité la plus redoutable) n’accepte pas que David Dunn ait pu vouloir le combattre et se sentir capable de le détruire et un Elijah Price en chef d’orchestre. Alors bien sûr, comme à chaque fois le scénario cache dans des tiroirs des secrets qui ne seront révélés qu’à la toute fin, mais le réalisateur se laisse, encore une fois, aller à la facilité, lorsqu’il s’agit de passer à la conclusion. Et comme avec « Split », le spectateur assiste à un film dont la tension est tenue à son maximum, malgré des conversations un peu bavardes en milieu de film. Mais dés lors qu’il s’agit de conclure son film, Shyamalan semble ne plus avoir l’idée de génie qui avait rendu son « Sixième sens » si incroyable.
En conclusion, « Glass » est une conclusion d’une trilogie commencée en 2000, avec « Incassable ». Si le film est, une fois de plus une réussite dans la plus grande partie de son intrigue, c’est à nouveau la conclusion qui laisse le spectateur dubitatif et ne convainc pas forcément, notamment pas un excès de facilité. Et si le principe de prendre à revers le film de super-héros pour se démarquer d’une production comics de masse, est parfaitement louable et bien tenu, son final laisse sur une touche amère qui pourrait rester trop insistante dans l’esprit du spectateur.