L'expansif Maxime, dirige d'une main de fer sa lutherie avec son ami de toujours, Stéphane, un maître artisan assez solitaire. Un jour, le riche propriétaire tombe follement amoureux d'une violoniste, Camille. Mais alors qu'ils sont sur le point d'emménager ensemble, contre toute attente, Stéphane sort de sa tanière et décide de séduire la jeune femme, au grand dam de son meilleur ami.
Certains réalisateurs français ont marqué durablement le cinéma avec des œuvres simples et parfois sombres qui posaient un regard fin et sans concession sur les sentiments. Nous pouvons logiquement penser à Claude Lelouch avec « Un homme et une femme » ou encore Claude Miller et son ultime « Thérèse Desqueyroux », sans oublier Techiné avec « Les Témoins » qui touchait le premier au dur sujet du Sida. Mais celui qui nous vient immédiatement à l'esprit lorsque l'on parle de la valse des sentiments, qu'ils soient amoureux ou amicaux c'est évidemment Claude Sautet.
Le réalisateur aura, sur une grande partie de sa carrière, cherché à comprendre ce qui motive les gens, ce qui les lie ou les sépare. Avec des œuvres majeures telles que « César et Rosalie » avec Romy Schneider et Yves Montand, ou encore « Vincent François Paul et les autres » toujours avec Yves Montand et Michel Piccoli, le réalisateur, surtout dans sa dernière partie de carrière, se sera beaucoup interrogé sur les relations qui lient les humains entre eux. Touche à tout de génie : Le Policier « Borsalino », la comédie « Les mariés de l'an deux », ou encore le drame « Une histoire simple ».
Avec « Un cœur en hiver », c'est autour d'un trio, cette fois-ci que le film va s'articuler. Et pas de la manière la plus classique, celle où un homme et une femme s'aiment mais voient leur couple mis en danger par la présence d'un ami qui va bousculer les sentiments des deux amants. Cette fois-ci, Claude Sautet qui signe le scénario avec ses comparses Jacques Fieschi, Yves Ulmann et Jérôme Tonnerre va explorer toute cette tornade sentimentale, dans laquelle une femme va tomber amoureuse du collègue de son amant, mais comme les auteurs en ont conscience, rien n'est jamais simple, en matière de sentiments et les chemins balisés ne sont jamais totalement suivis. Avec une finesse propre à sa réalisation, Claude Sautet livre une histoire forte et touchante sur fond de musique classique douce et parfois violente qui vient illustrer avec beaucoup de subtilité un propos intelligemment tenu.
Se reposant sur une mise en scène sobre et en même temps complexe dans laquelle les environnements sont là pour étayer le propos, Claude Sautet livre une œuvre maîtrisée et complexe qui plonge le spectateur dans une valse sombre des sentiments contrariés. Pour cela il va se reposer sur les compositions maîtrisées et nuancées de son trio d'acteur : Emmanuelle Béart (Manon des Sources), Daniel Auteuil (Quai des Orfèvres) et André Dussolier (3 hommes et un couffin). Le trio d'acteurs est d'une cohérence rare, et Daniel Auteuil, qui vient confirmer après « Jean de Florette » de Claude Berri son virage dans sa carrière pour des rôles plus profonds, impose un personnage tout en mystère et en séduction qui viendra faire tourner la tête de la belle Emmanuel Béart, elle aussi issue de la fresque pagnolesque et qui joue toujours avec autant de perfection ces femmes perturbées dans leurs sentiments.
« Un cœur en hiver » fait partie des derniers films de Claude Sautet, l'occasion de voir le travail du maître dans ce qu'il a su faire de meilleur. Le trio d'acteur fonctionne à merveille et il est difficile de ne pas se laisser porter par l'intrigue soignée et intelligente de ce film