Le film suit l’ascension de la carrière d’Aretha Franklin, de ses débuts d’enfant de chœur dans l’église de son père à sa renommée internationale. RESPECT est la remarquable histoire retraçant le parcours de cette icône de la musique.
Il y a des destins qui, par leur singularité, leurs multiples angles de lecture et surtout l’importance qu’ils ont pu avoir dans la conscience collective, deviennent presque impossible à traiter dans un seul film. Et ce, quelle que soit sa longueur. C’est évidemment le cas d’Aretha Franklin dont la destinée synthétise quasiment tous les codes du genre et coche toutes les cases d’une existence d’exception, fille d’un pasteur proche de Martin Luther King, activiste pour les droits civiques et pour celui des femmes, orpheline de mère à l’âge de 10 ans, mère à 12 ans, et un début de carrière qui l’amèneront à devenir une icône soul incontestable recevant les plus hautes distinctions tout au long de sa carrière et de sa vie.
Prévu sortir fin 2020, le film « Respect » fut l’une des nombreuses victimes de la pandémie. Le film débarqua sur nos écrans en septembre 2021 et permit à bon ombre de spectateurs de découvrir ce destin hors du commun que fut celui de cette chanteuse hors norme. Rien que pour cela l’entreprise menée par les deux producteurs Scott Bernstein et Harvey Mason Jr (NWA : Straight Outta Compton) de produire un biopic sur la « Queen of Soul » est parfaitement louable. Mais voilà, les bonnes intentions ne suffisent pas à rendre l’entreprise intéressante et convaincante. Et « Respect », justement rate le coche, par un scénario et une mise en scène qui ne parviennent jamais à totalement trouver le bon angle de narration pour mettre en lumière et donner toute l’ampleur de la vie d’Aretha Franklin.
Les scénaristes Callie Khouri (Thelma et Louise) et Tracey Scott Wilson (Fosse/Verdon) sont partis sur deux pistes : La foi et les droits civiques comme passages obligés pour retracer le destin de la chanteuse. Et comme pour toute narration classique, ils se sont attelé à tout mettre pèle mêle dans un scénario pour pouvoir raconter cette personnalité majeure de la scène musicale et politique américaine. Seulement voilà le scénario ne parvient jamais à être là où on l’attend ! Perdu dans un trop plein d’informations, de choix aléatoires, à l’instar du viol dont la jeune Aretha fut victime dans son enfance et qui donna naissance à ses deux premiers enfants. L’information est donnée, mais devient subitement anecdotique. C’est d’ailleurs le même reproche que l’on peut faire avec le traitement de la relation Père Fille, les scénaristes ne traitent jamais ce côté lié au viol, mais préfère se centrer sur une guerre d’égo, et même lorsqu’ils abordent les violences familiales, semble-t-il fréquentes à cette époque-là, les scénaristes ne parviennent jamais à l’aborder avec finesse et subtilité. Du coup, nous nous retrouvons avec un biopic, sans âme et sans grandeur.
Et même si la mise en scène de la réalisatrice Liesl Tommy (Jessica Jones) tente parfois de trouver un plan ou une dynamique qui puisse être à la hauteur de la « Queen of Soul », comme la mise en scène des chansons et particulièrement de « Respect », ou encore cette mise en scène de la scène finale, notamment lors de l’enregistrement de l’album Gospel d’Aretha Franklin. Mais voilà, tout le reste sonne creux et sans signature. Lorsque le générique de fin débute, nous prenons plus de plaisir à voir et à entendre la véritable Aretha Franklin sur scène devant le président Obama et un parterre de célébrités émus devant le charisme et la puissance vocale de la diva, que devant tout le film. Car a trop vouloir ou pas assez dire sur la star, les scénaristes et la réalisatrice passent totalement à côté de toutes les nuances et toutes les facettes de cette artistes, bien plus nuancées et plus complexe que le film ne tente maladroitement de nous la révéler.
Et ce ne sont pas les efforts de Jennifer Hudson (Dreamgirls) qui viendront dire le contraire. Car si l’actrice chanteuse se révèle bouleversante dans le rôle d’Aretha Franklin, elle ne parvient pas à sauver le film, notamment à cause de scènes étonnamment ridicule comme lorsque Aretha tente un hommage sur scène à l’artiste qu’elle adule Dinah Washington et qu’elle se prend l’ire publique de cette dernière. La distribution est trop enfermée dans un carcan imposé par la réalisatrice et par es producteurs pour être totalement convaincants. Même Forest Whitaker (Good Morning Vietnam), pourtant impeccable dans le rôle du pasteur C.L. Franklin, ne parvient pas à sauver le film.