L’Américaine Daisy Miller voyage à travers l’Europe en compagnie de sa mère et de son jeune frère. En Suisse, elle fait la connaissance de Frederick Winterbourne, un compatriote depuis longtemps exilé sur le Vieux Continent. Son charme et sa candeur intriguent et séduisent le jeune aristocrate. Leurs chemins se croisent bientôt à Rome où l’excentricité de Daisy va rapidement choquer le cercle fermé des expatriés américains…
Longtemps considéré comme un petit génie du cinéma américain, Peter Bogdanovich eut une carrière la M. Night Shyamalan (Sixième sens), d’abord adulé pour son audace et son arrogance, il fut ensuite conspué pour son manque de régularité dans ses œuvres. Disparu en Janvier 2022, ce réalisateur, acteur et critique de cinéma n’en demeure pas moins un acteur majeur de la scène cinématographique américaine, notamment grâce à des films comme « La dernière séance » réalisé en 1971, ou alors « On s’Fait la valise, Docteur ? » l’année suivante. Adulé » ou détesté, Peter Bogdanovich n’en fut pas moins un cinéphile de grande envergure et un amoureux du cinéma qui n’eut de cesse de vouloir se mettre à son service et de mettre en lumière l’importance de certaines gloires passées du cinéma, comme Orson Welles a qui il consacra plusieurs ouvrages, ou encore Howard Hawks ou John Ford qui passèrent sous l’œil et la plume du réalisateur, ou encore Fritz Lang et Allan Dawn.
Seulement voilà, être la nouvelle coqueluche d’Hollywood ne préserve pas des échecs ! Peter Bogdanovich l’apprit à ses frais avec cette adaptation d’un nouvelle d’Henry James : « Daisy Miller ». Après avoir remplit les caisses des studios avec ses précédents films : « La Dernière séance » en 1971, déjà l’adaptation d’un roman, mais de Larry McMurtry, cete fois-ci, sur les ados des années 50, puis « On s’fait la valise, Docteur ? » en 1972, l’hommage du réalisateur à un autre géant d’Hollywood : Howard Hawks, avec Barbra Streisand, et enfin « Paper Moon » en 1973, où Bogdanovich revient sur la grande dépression, Peter Bogdanovich se lance alors dans l’adaptation de cette nouvelle d’Henry James qui dépeint une jeunesse illustrée en deux camps pour deux Amériques différentes. Une nouvelle écrite en 1878, qui dépeint une jeunesse américaine coupée en deux entre celle trop ancrée dans l’esprit de sa terre natale et une autre pas assez.
En se l’appropriant Peter Bogdanovich, en fait une opposition entre l’Amérique et l’Europe, notamment en opposant Daisy, libre et parfois inconvenante et Frederick Winterbourne, un personnage moins joyeux que l’héroïne, parce trop imprégné du cynisme et de l’esprit réactionnaire européen. Avec des idées remarquables, comme cette scène d’ouverture dans un Hôtel en Suisse dans une atmosphère quasi intemporel, où le réalisateur plante le décor et notamment ses personnages et les premières bases de cette réflexion qui sera le moteur de son film. L’héroïne qui ne cesse de souffler le chaud ou le froid avec son prétendant un peu plus terne : Frederick Winterbourne, ou encore la vieille dame qui ne cesse de déblatérer des répliques d’un snob confondant envers les habitants des pays qu’elle traverse, un ton presque méprisant qui se retrouve chez le gamin insupportable qui s’amuse à mettre le bazar devant les chambres d’hôtel.
Bogdanovich soigne sa mise en scène et ses personnages pour que l’œuvre d’Henry James devienne sa vision de l’Amérique et sa place dans un monde qu’elle regarde de loin. Mais voilà dans un contexte sociétale marqué par la guerre du Vietnam et le Watergate, l’Amérique n’est pas prête à une vision trop moderne et à une forme d’œuvre introspective. « Daisy Miller » sera un « Flop » considérable et mettra un frein durable à la carrière du réalisateur qui aura bien du mal à s’en remettre.