Second Tour
Sortie:
25/10/2023
Pays:
FR
Genre:
Durée:
97 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Second Tour

Verdict: Excellent

par: Emmanuel Galais



Journaliste politique en disgrâce placée à la rubrique football, Mlle Pove est sollicitée pour suivre l’entre-deux tours de la campagne présidentielle. Le favori est Pierre-Henry Mercier, héritier d'une puissante famille française et novice en politique. Troublée par ce candidat qu'elle a connu moins lisse, Mlle Pove se lance dans une enquête aussi étonnante que jubilatoire.


Depuis 2020 et son magnifique « Adieu Les Cons », Albert Dupontel préparait un nouveau film, mais cette fois-ci sur la politique. Une sorte de fable sur le monde de la politique, dans lequel le réalisateur va entrainer une journaliste en disgrâce et son caméraman à suivre les pas d’un politicien nouvellement venu, mais devenu le favori des élections, mais également la cible d’un potentiel attentat. Et comme à chaque fois avec Albert Dupontel, ce n’est pas le sujet, en soi, qui importe le plus, mais ce qu’il en fait. Car le réalisateur a su conserver un style bien à lui, dans lequel une galerie de personnages récurrents vient se confronter et donner sa vision du monde et de la société. Aucun film de sa carrière de réalisateur n’échappe à la règle, pas même « Au revoir Là-haut », unique film de commande de Dupontel.


Avec « Second Tour », le réalisateur nous entraine donc dans une campagne électorale peu ordinaire. Inspiré d’un documentaire sur Robert Kennedy, durant une campagne où le politicien apprend la mort de Martin Luther King, et où sa parole empreinte de sincérité et de tristesse, va toucher l’audience qui va passer de la stupeur aux larmes. Parti de là, Albert Dupontel va tisser une histoire sur la sincérité des politiques en confrontant des personnages diamétralement opposés, et qui vont évoluer dans un climat tendu et complexe. Pourtant le réalisateur ne va pas passer son temps à s’interroger avec passion et obscurité, il va garder son envie de distraire d’abord puis de s’amuser à parfaire son discours de réfuter le monde politique par son absence de considération et surtout par son manque de sincérité. Comme dans ses précédents films et particulièrement « Adieu les Cons », le réalisateur va associer un personnage en quête de réponses à ses questions, ici politiques, mais pas seulement, et un autre, complètement décalé qui sera l’élément comique et notamment Nicolas Marié (9 mois ferme), indissociable acteur de la carrière de Dupontel.


Et avec une mise en scène qui sait rester dynamique et pourtant jouer avec les codes de la comédie pour venir toucher le spectateur, à travers une réflexion sur la différence entre être éduqué et être aimé. Si les scènes drôles se succèdent, à un rythme soutenu, Albert Dupontel n’en demeure pas moins quelqu’un qui sait faire preuve d’une très grande tendresse, notamment pour ces personnages cabossés et parfois plus lisses, et passe par eux pour distiller son message. Toujours précis dans l’esthétique de son film, l’ambiance participe à nous sortir de notre quotidien et à nous isoler dans une œuvre drôle et précise dans sa photographie. Car le réalisateur soigne constamment sa photographie, comme dans les œuvres de Chaplin, le réalisateur aime illustrer son propos dans une image où chaque détail compte, y compris les couleurs. Inspiré par une multitude de réalisateurs et d’écrivains, Albert Dupontel est très loin de l’artiste naïf que pourrait laisser supposer son œuvre. Il sait jouer de ses personnages, il sait les associer ou les opposer pour rendre cohérent son propos sans jamais oublier d’amuser et s’ouvrir au plus grand monde.


Côté distribution, Cécile de France (L’Auberge Espagnole), comme Virgine Efira dans « Adieu les ons », est le personnage troublé, cabossé, une sorte de clown blanc qui va se retrouver associé, cette fois-ci, à Nicolas Marié en Auguste, qui fait mouche à chaque fois. L’actrice est à la fois touchante dans ce personnage qui veut se faire entendre et pouvoir poser les questions qu’elle se pose sans être censurée par sa hiérarchie, pour ne pas brusquer le candidat et ne pas poser les questions qui fâchent. Albert Dupontel se garde cette fois-ci le personnage le plus cynique et comme il a déjà fait dans sa carrière d’acteur, il sait jouer de cette nuance sombre et cabossée également mais dans une autre direction que ce qu’il a pu faire auparavant.