À Delhi, le hasard réunit Mansi et Marc, deux âmes perdues qui ont fui la réalité de leur vie. Une romance aussi interdite qu’inattendue, le temps d’un voyage improvisé, fragile et lumineux, des rives du Gange à la route de Rishikesh.
Réalisateur de Court-métrages et de films, notamment documentaires, comme « Maurice Tourneur, Tisseur de Rêves » en 2023, Pierre Filmon se lance pour la seconde fois dans un long métrage de fiction, et pour sujet, il va s’intéresser à la rencontre improbable entre un occidental qui semble fuir sa vie et une femme Indienne qui semble fuir un mari et une société patriarcal. Une rencontre fortuite qui va déboucher sur une romance tout autant interdite que soudaine. C’est aussi l’occasion pour le réalisateur de nous plonger dans des décors de l’Inde que l’on n’a pas souvent l’occasion de découvrir. Une immersion dans une société régie par ses codes, ses castes et sa domination patriarcale. Car c’est bien de cela qu’il s’agit dans un premier temps. Car, à travers le personnage de Mansi, magnifiquement interprété par Sonal Sehgal (Mantostaan), on découvre la condition féminine au cœur d’un système qui semble vouloir s’ouvrir au monde, à l’occident, mais qui cache sous le tapis la saleté de ce traitement réservé aux femmes, avec la violence, la soumission et le non-droit à lever le poing, à faire valoir son droit à la paix.
Si le scénario peut paraître inégal, notamment sur le traitement de la romance entre les deux personnages principaux, il touche juste lorsqu’il s’agit de lever un voile sur ce sujet que toutes les sociétés du monde commencent à prendre à bras le corps, mais si certains de l’autre côté de l’atlantique, ou même sur les bancs de notre assemblée, aimeraient bien revenir en arrière. Les femmes se lèvent, se révoltent, pacifiquement ou non, elles revendiquent une place, un ordre, une égalité morale et sociétale que notre XXIème siècle semble avoir encore du mal à leur accorder. Et Pierre Filmon en tire une mise en scène en double vision, à la fois le sujet central, développé par l’actrice principale Sonal Sehgal, mais également une magnifique de l’Inde et de ses croyances autant que ses valeurs. Et même si de notre siège nous pouvons apporter un jugement sévère, tout en mettant un voile sur nos propres dérives et sur les féminicides qui continuent de s’accumuler dans nos lointaines contrées, sur le rapport des hommes aux femmes, l’Inde n’en demeure pas moins l’un des berceaux de la sagesse bouddhiste avec un regard porté sur l’autre et sur le chemin à suivre pour trouver la paix.
Avec « The Great Departure », Pierre Filmon s’empare d’un scenario qui met en lumière la condition féminine en Inde, mais ne parvient pas à traiter avec justesse la romance entre Marc l’occidental, qui, lui, aussi, fuit un passé, dont on apprendra un peu plus tard, les raisons de cette fuite, et Mansi. Une maladresse qui a tendance à ralentir le film et à a presque lui faire le fil de l’essence même de son intrigue. Par pudeur ou par prudence, le film reste toujours un peu à distance, et même si l’on comprend rapidement les dessous de la fuite de Mansi, il manque peut-être un peu de noirceur pour mieux se laisser imprégner par la douleur de Mansi et ainsi mieux réfléchir à ce que l’on vient de nous montrer. Ajoutez à cela, un manque de justesse parfois de Xavier Samuel (Elvis), surtout lorsqu’il interagit avec le jeune garçon. L’acteur ne semble pas à l’aise avec son corps.