Le Diable s'habille en Prada
The Devil Wears Prada
Sortie:
27/09/2006
Pays:
USA
Genre:
Durée:
1h 50 Min
Réalisateur(s):
Acteurs:

Le Diable s'habille en Prada

par: Olivier Sandoval

Adaptation du best-seller éponyme de Lauren Weisberger, "Le Diable s'habille en Prada" s'édulcore à l'écran pour devenir un sage blockbuster suivant tous les codes de la comédie tous publics hollywoodienne.


L'histoire
Andrea rêve de journalisme, mais se retrouve assistante de la légendaire rédactrice en chef du tout puissant magazine de mode Runway, Miranda Priestly. Job de rêve ou place au plus près du tyran ? L'apprentissage commence...

La critique
Le film est adapté du roman de Lauren Weisberger qui était lui-même tiré de l'expérience de l'écrivain auprès d'Anna Wintour, rédac-chef du Vogue américain. Après deux générations de transcription, l'histoire originelle est un peu passée, surtout quand il s'agit de pondre une comédie qui peut être regardée par toute la famille. Et Hollywood a la recette pour ce type de blockbuster, des codes bien réfléchis, qui sont ici suivis à la lettre.
Ca commence donc comme un récit initiatique : Andy (Anne Hathaway), le vilain petit canard, plongée dans le monde de la mode alors qu'elle se fiche pas mal de son accord chaussures-jupe-pull. Il y a les gentils (Nigel, le gentil gay), les méchants (Emily la première assistante arriviste)...et Miranda (Meryl Streep), sommet de pyramide inaccessible, envers qui il faut être dévoué corps et âme sous peine de renvoi dans la seconde. Mais voilà, on est dans la comédie familiale, donc les méchants ne le sont pas autant que le titre du film le laissait supposer. Pas vraiment de diable, plutôt une enfant pourrie-gâtée qui a aussi ses faiblesses et qui sait bien cacher sa reconnaissance sous des dehors cyniques.

Bref, rien de très grave dans les rues new-yorkaise, à part être à l'heure avec les cafés et les carrés Hermès. L'avantage des grosses productions américaines, c'est qu'au moins si l'histoire est archi formatée, on a droit à une technique propre : image, son, décor, costumes, montage...peu à redire, même du côté des comédiens qui font au moins ce qu'on leur demande. Du travail de pro, sans âme ni génie, mais ça se laisse regarder. Ce qui est plus pénible, ce sont ces codes qui ressortent : musique pop-FM omniprésente, passages "clipés" pour relancer le récit, changements de situation toutes les 20 minutes, déchirement du héros entre son travail et ses proches, apparition d'un chevalier blanc (sous la forme d'un journaliste connu qui peut offrir sa chance à Andy), morale américaine à deux dollars... Jusqu'à la dernière partie du film qui croûle sous un "hollywoodisme" du plus mauvais aloi. Remarquons ici qu'il s'agit d'une adaptation complètement fantaisiste de ce qui se passait dans le bouquin.
C'est un peu le problème d'ordre général du Diable s'habille en Prada : il est coincé entre un début et une fin mauvaise. Tout part d'un postulat bien peu probable : l'apprenti journaliste est candidate à un poste dans un magazine mondialement connu sans connaître le nom de sa légendaire rédactrice en chef...et sans même être intéressée par ce qui s'écrit dedans. On comprend qu'au cinéma il faille faire pas mal de raccourcis de l'oeuvre originale pour rester efficace, mais là c'est un peu osé. Et de l'autre côté, après un récit de type Cendrillon (le prince charmant diffère quand même), on a droit à une fin qui enlève tout doute quand à l'emploi du mot "diable" : ce n'en est absolument pas un. Juste une femme qui dirige une grand magazine, et qui forcément, a des préoccupations qui diffèrent du commun des mortels. La méchanceté présente dans le livre et l'absence totale de considération envers ses employés de la part de Miranda sont complètement édulcorées dans le film.

On regrettera aussi la quasi absence d'enjeu dans la relation entre Andy et ses proches. Certes il y a son petit ami. Mais au niveau familial, ça sent les scènes coupées à plein nez : une seule minuscule scène avec son père. Et on nous sert quand même du discours "je me suis coupée avec ma famille". On n'y croit pas une minute. Comme le côté ignoble de son travail qu'elle serait prête à quitter à tout moment (mais l'enjeu est de tenir, car 1 an chez Runway est sensé ouvrir toutes les portes) : on n'a pas vraiment cette impression. Andy semble au contraire parfaitement s'épanouir en tant que femme, et au lieu d'être phagocytée par sa patronne, elle reconnaît en elle une sorte de figure maternelle qui comblerait l'absence de la sienne (comme le prouve son unique vision sous forme de photo dans une séquence nostalgie-en-regardant-les-vieilles-photos-de-famille). Bon, c'est pousser peut-être un peu l'analyse psychanalityque du film, mais il y a tout de même un peu de vrai dans cette hypothèse.
Finalement l'adaptation du bouquin, le scénario formaté, les petits arrangements avec le récit original, semblent avoir été fait pour servir un film qui regrouperait le cocktail (gagnant ?) filles / fringues, des premières jusqu'au dernières secondes, mâtiné du glamour de New-York, de Paris, et de ce que le monde de la mode propose de pire et de meilleur.
A voir : éventuellement, car le film reste un blockbuster distrayant et pas pire que d'autres.
Le score presque objectif : 6
Mon conseil perso (de -3 à +3) : 0, ce n'est ni 2 heures de perdues, ni 2 heures de gagnées.