Qui a tué
Laura Hunt, une ravissante jeune femme qui doit une partie de sa notoriété au
chroniqueur Waldo Lydecker ? L'inspecteur Mark McPherson mène l'enquête et
interroge notamment Lydecker, qui considère Laura non seulement comme sa
création, mais aussi comme un être lui appartenant.
« Laura »
est certainement l’un des films les plus réussit d’Otto Preminger, d’abord
parce qu’il s’est battu « bec et ongle » pour imposer ses choix,
notamment autour des décors, du style du film qui se veut un mélange de
plusieurs styles de narration policière, avec une dominante inspirée d’Agatha
Christie. Le réalisateur a voulu des décors chargés qui rappelle un peu
l’univers des romans policiers anglo-saxons comme dans la description de
l’univers d’Hercule Poirot. Les décors fourmillent d’éléments et chacun ont une place bien
précise dans l’histoire jusqu’à la clé de l’énigme qui passe de manière récurrente
devant les yeux des spectateurs, sans pour autant susciter un intérêt direct.
Mais la
réussite de « Laura » ne s’arrête pas là, elle perdure dans
l’approche des personnages avec une peinture jouant sur les ambiguïtés des uns
et des autres, à l’image de Waldo Lydecker, écrivain, journaliste riche et
amoureux fou de Laura, premier suspect, dans l’affaire de ce meurtre par
l’exclusivité parfois obsessionnelle qu’il entretenait avec la victime, une
obsession qui l’obligeait à évincer chacun de ses amants, tout en laissant
planer un doute sur les raisons de ce combat acharné. Et puis il y a
l’inspecteur Mark McPherson, qui n’est
pas sans rappeler bien évidemment Humphrey Bogart avec cet air rugueux, un brin
mystérieux, dont l’ambiguïté joue sur les rapports qu’il entretient avec la
victime, dont il ne connait au départ que le portrait, mais qui semble le
fasciner comme une obsession.
Mais Otto
Preminger ne s’est pas arrêter à simplement réaliser un nouveau film, il en a
réinventer les codes , en jouant en permanence sur les ambiances, renouvelant
les codes du huit clos, pour donner cet atmosphère si particulière au film,
quasiment obsessionnel pour le spectateur. Le film se construit en toute
simplicité, avec des indices disséminés tout au long du film pour un final renversant.
On finit avec le pari d’Otto Preminger d’avoir imposé Gene Tierney, déjà en lutte contre la maladie qui mettait en péril sa santé mentale. L’actrice
est rayonnante et hypnotise radicalement l’écran. Ses apparitions sont
quasiment fantasmagoriques. Le talent n’a jamais été aussi présent, le trait le
plus sensiblement effacé est celui de la tragédie théâtrale dont les acteurs
abusaient à l’époque. Pourtant le réalisateur joue clairement la carte du théâtre
dans sa mise en scène, avec des décors soignés et mise en valeur pour mettre en
lumière l’histoire et devenir l’une des clés de la mise en scène.
En conclusion,
« Laura » est certainement l’un des plus grands chef-d’œuvres d’Otto
Preminger, qui permet à Gene Tierney de littéralement rayonner dans un film qui
se permet au passage de renouveler le genre du film noir.