Nouveau venu à la réalisation, François Favrat offre à Agnès Jaoui et Karin Viard deux superbes rôles, en star de cinéma pour la première et en admiratrice de la première pour la seconde. Dans un film réussi où les qualités d’écriture humaine sont évidentes.
France, 2004
Réalisateur : François Favrat
Acteurs : Agnès Jaoui, Karin Viard
Durée : 1h40
L’histoire
Claire croise par hasard Elisabeth Becker, star de cinéma. Les deux femme sympathisent, et Elisabeth engage Claire comme assistante personnelle. Tout va donc pour le mieux. Ou pas ?
Un film sur le milieu du cinéma a toujours un parfum particulier. D’abord parce qu’il faut éviter de trop rappeler comment on fait un film, quand justement on en regarde un, et parce qu’il donne tout de même l’impression de jeter un œil dans les coulisses, de nous laisser entrevoir ce qu’il y a avant, pendant, après et au-delà du film lui-même. Sur ce plan, le Rôle de sa vie est très réussi, à des années lumières des clichés à deux sous de Ma femme est une actrice. L’univers dépeint autour du personnage d’Agnès Jaoui apparaît totalement crédible, apportant des détails auxquels on n’aurait pas pensé mais qui s’inscrivent dans ce qu’on en connaît. Et le tout est également profondément ancré par la performance d’Agnès Jaoui.
En effet, les performances des deux comédiennes principales sont irréprochables, et leurs personnages apparaissent tout de suite vrais et crédibles. Comme ils sont de plus bien écrits, on peut vraiment tenter de comprendre cette actrice déstabilisée par son succès et cette jeune femme en adoration devant son idole (et là, je caricature beaucoup par rapport aux personnages, mais je ne vais pas tout vous raconter non plus). Agnès Jaoui donne à la fois son charme et son mordant, sa sensibilité et sa fragilité à son personnage, alors que Karin Viard compose avec toujours autant de talent une personne en retrait et qui se débrouille comme elle peut. A côté, les seconds rôles s’en sortent un peu moins bien, à cause de personnages plus survolés et moins bien écrits (on a tout de même que 1h40 pour raconter tout ça). On n’évite pas quelques clichés comme la mère envahissante mais pleine de sagesse au fond, ou le bon copain (ici coloc) gay et donc sensible et de bon conseil.
Plus gênant, l’homme qu’elles se disputent apparaît un peu transparent, et cette partie du scénario pêche par manque de crédibilité, d’originalité, et tout simplement d’intérêt. A part cette histoire, les rapports entre les deux femmes, sans révolutionner l’écriture humaine au cinéma, sont à la fois riches et plausibles, sans retournement de caractère inapproprié. L’histoire souffre un peu aussi du syndrome pas-vraiment-de-début-ni-de-fin, mais c’est le lot de ce genre de film. La réalisation est assez sage, sans les petites touches d’originalité qui accompagnent souvent un premier film. D’un autre côté, le film comporte très peu de poursuites en voitures à 300km/h ou de combats spatiaux, et la mise en scène tranquille permet de se concentrer sur les personnages. La musique est par contre au-dessus de la moyenne, avec pas mal de morceaux non originaux mais bien trouvés, comme par exemple Les Passantes (de Brassens), repris à la mode mariachi.
Au final, si le film ne révolutionne pas le genre, il se distingue par deux actrices et interprétations remarquables (et césarisables, c’est moi qui vous le dit), des dialogues très bien écrits et parfois très drôles, et de la bonne musique, le tout pour une histoire pas très originale mais très bien brossée, à part le triangle amoureux. Soit 3/4 de film très réussi, et l’occasion de voir du bon cinéma français.
A voir : pour les actrices, mais aussi pour le film
Le score presque objectif : 7,5/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +2, c’est juste un bon film, mais c’est déjà ça
Sébastien Keromen