1950. Anatole « Zsa-zsa » Korda, industriel énigmatique parmi les hommes les plus riches d’Europe, survit à une nouvelle tentative d’assassinat (son sixième accident d’avion). Ses activités commerciales aux multiples ramifications, complexes à l’extrême et d’une redoutable brutalité, ont fait de lui la cible non seulement de ses concurrents, mais aussi de gouvernements de toutes tendances idéologiques à travers le monde – et, par conséquent, des tueurs à gages qu’ils emploient. Korda est aujourd’hui engagé dans la phase ultime d’un projet aussi ambitieux que déterminant pour sa carrière : le Projet Korda d’infrastructure maritime et terrestre de Phénicie, vaste opération d’exploitation d’une région depuis longtemps laissée à l’abandon, mais au potentiel immense. Le risque financier personnel est désormais vertigineux. Les menaces contre sa vie, constantes. C’est à ce moment précis qu’il décide de nommer et de former sa successeure : Liesl, sa fille de vingt ans (aujourd’hui nonne), qu’il a perdue de vue depuis plusieurs années.
L’univers de Wes Anderson est toujours très coloré, bourré d’humour et si souvent décalé qu’on en oublierai presque qu’il est aussi un auteur important et que chacun de ses films lui vient d’une inspiration diverse et notamment de la société dans laquelle il évolue. Que ce soit dans des œuvres plus « grand public », comme le « A bord du Darjeeling Limited » (2007) ou « La Vie Aquatique » (2003) ou d’autres plus baroques telle que « Le Grand Budapest Hôtel » (2013à ou « The French Dispatch » (2021), le réalisateur a su insuffler ses questionnements, dans un style qu’il a toujours su conserver et faire évoluer, sans jamais, pourtant se départir d’un regard presque naïf sur ses personnages et les évènements qui les entourent.
Avec « The Phoenician Scheme », nous découvrons un Wes Anderson, plus sérieux, qui porte un regard sur la filiation tout en développant sa vision d’un richissime Industriel qui après une nouvelle tentative d’assassinat, va commencer à penser à l’après et particulièrement avec sa fille qu’il n’a pas vu depuis 6 ans et à qui il a décidé de donner l’intégralité de sa fortune. Inspiré par Onassis, Narchios et de biens d’autres industriels marquant des années 50, Wes Anderson a pensé également au « Citizen Kane » d’Orson Welles qui montre la solitude d’un magnat dans sa tour d’ivoire. Et c’est, ici que le réalisateur se fait plus sérieux. Car si la mise en scène est toujours aussi baroque, avec une scène d’ouverture qui fait penser à De Palma et une chorégraphie millimétrée, Wes Anderson va aborder un sujet plus personnel et son scénario, qu’il a toujours signé et dont il partage le mérite de l’idée avec Roman Coppola, il va, alors, faire se croiser des personnages plus sombres, particulièrement Korda et Liesl.
Seulement le réalisateur étant ce qu’il est, si son scénario est plus sombre que les précédents, il n’en demeure pas moins un faiseur d’histoire remarquable où le visuel est aussi soigné que les plans. Ainsi, on assite à une succession de chapitres filmé par-au-dessus, ou comme dans une maison de poupées faites avec des boites à chaussures, où chaque boite est un décor dans lequel vont évoluer les personnages. Il y a aussi les moments truculents qui nous emportent dans son univers, comme l’apparition de Tom Hanks (Seul au monde) et Bryan Cranston (Trumbo) qui se lancent dans une partie de basket surréaliste, et puis les scènes de bagarres verbales où chacun de met à hurler avec les autres dans une cacophonie hilarante.
« The Phoenician Scheme » de Wes Anderson, montre un réalisateur plus sérieux, mais qui n’a rien perdu de son talent et encore moins de sa façon burlesque et tendre de raconter des histoires. Le réalisateur tourne vite, mais toujours avec précision, car, comme à chaque le visuel est aussi important que les dialogues ou le jeu des acteurs.