Un monastère perché dans les montagnes du Maghreb, dans les années 1990. Huit moines chrétiens Français vivent en parfaite harmonie avec leurs frères musulmans. Quand une équipe de travailleurs étrangers est massacrée par un groupe islamiste, la terreur s’installe dans la région. Malgré la menace qui les entourent, les moines décident de rester coûte que coûte.
En ces temps troublés où la religion s’installe au cœur des débats, parfois avec une violence terrifiante, le réalisateur Xavier Beauvois s’est interressé au destin des moines de Tibhirine en Algérie qui furent enlevé en 1996 et retrouvés morts. Une histoire qui va bien au-delà des dogmes, mais qui au contraire plonge au cœur de l’ esprit humain. Ce film est avant tout une reflexion intelligente sur le don de soi, le sacrifice et la fraternité qui unit ces hommes. Le réalisateur explore cette question fascinante qui amena les moines a rester dans leur monastère : Partir pour aller où, quand tout ce qui les guide est entre ces murs ? Quand la terreur s’impose doit-on abandonner ses proches ou au contraire les soutenir dans l’epreuve ? Comment accepter le martyr ?
On pourra effectivement reproché au scénario de Xavier Beauvois et Etienne Comar, une certaine complaisance dans le propos, mais se limiter à cela serait beaucoup trop réducteur et l’on passerait à côté de la plus grande force de la trame, ce combat personnel et intime qui lie les moines, cette dévotion qui, peut-être les aveugles, mais leur offre involontairement une dimension presque prophétique. « Des hommes et de dieux » parvient à créer un monde commun où le spectateur participe à la refléxion des personnages, se laisse hypnotiser par le litturgie toujours présente, presque envahissante pour vivre au plus prêt la dualité permanente qui les petrifie jour après jour. Le scénario n’oppose pas deux religions entre elle, bien au contraire, d’une certaine il confronte deux type d’extrémismes pour mieux s’interroger sur l’un comme sur l’autre. Le premier qui consiste à utiliser la violence pour imposer une doctrine mensongère et l’autre qui consiste à faire don de sa vie par dévotion et par fascination de la charité.
Et Xavier Beauvois choisit une mise en scène pointilleuse qui met l’accent sur les silences du monastère et sur les chants religieux comme unique bande son pour mieux renforcer son propos. Le réalisateur partage sa fascination pour ses personnages atypiques avec des plans soignés, des perspectives travaillées au plus juste pour mieux laisser apparaitre l’oeucuménisme de l’instant, comme lors de cette scène monumentale au lyrisme flamboyant qui annonce l’épilogue tragique. Beauvois filme les visages au plus prets pour mieux laisser poindre l’illumination des protagonistes et donner ainsi à leur spiritualité tout son sens. Les émotions, le désarroi et pour finir l’érrance sont ainsi dépeint avec beaucoup de justesse et une intelligence de ton rarement atteinte.
Mais il serait injuste de ne pas souligner l’exceptionnelle interprétation des acteurs à commencer par Lambert Wilson (Hiver 54), Michael Lonsdale (Agora) et Olivier Rabourdin (Poupoupidou) dont les compositions sont d’une qualité rarement atteinte. Comme possédés par l’esprit divin de leurs personnages respectifs les trois acteurs illuminent littéralement l’écran d’un jeu fascinant de précision, où les sentiments sont exprimés avec maitrise et presqu’autant de dévotion. Les comédiens participent avec l’ensemble de la distribution à la fascinante retranscription d’une lutte involontaire contre toute forme de térrorisme.
En conclusion, « Des Hommes et des Dieux » est un film saisissant de maitrise, d’une beauté incroyable dont le discours, est certes, complaisant avec ses personnages mais donne une reflexion juste sur les doutes personnels de ce sacrifice. Un chef d’œuvre à (re)découvrir.