Marseille, juillet 1905. Le jeune Marcel Pagnol vient d'achever ses études primaires. Dans trois mois, il entrera au « lycée ». Trois mois... une éternité quand on a cet âge. Car voici le temps des vacances, les vraies, les grandes ! Enfant de la ville, ce retour tant attendu à ses chères collines d'Aubagne et d’Allauch, celles de « La Gloire de mon père » et « Le Château de ma mère » le transporte de bonheur. Il y retrouve la nature, les grands espaces et surtout son ami Lili toujours prêt à partager de nouvelles aventures, à l’âge où le temps de l’insouciance laisse place à celui des secrets.
Dernier opus d’une trilogie littéraire débutée en 1957 avec « La gloire de Mon père », puis « Le Château de ma mère » en 1958 et enfin ce troisième opus en 1960. Dans cette trilogie, Pagnol raconte ses souvenirs d’enfance, il pose un regard sur ses parents, ses amis et sur la Provence. Véritable carte postale de l’enfance et de son évolution au fil des aventures enfantines et de la découverte du monde qui entoure, des parents jusqu’à l’adolescence qui ouvre la porte vers les Secrets, ceux des parents que l’on découvre avec leurs faiblesses et leurs beautés, l’amitié et l’amour qui ont bien du mal a coexister. Pagnol décrit en trois romans, la légèreté et la profondeur de l’esprit d’un enfant et d’un adolescent avec une simplicité désarmante, qui prend soudainement plus de hauteur avec « Le Temps des Secrets ».
La rencontre entre le cinéaste et écrivain Marseillais et le réalisateur des « Choristes » était inévitable. Notamment parce que ce dernier, qui s’est fait une spécialité de mettre en scène des enfants et de mettre en lumière des histoires simples mais à la dramaturgie constamment sous-jacente, ne pouvait qu’être tenté de mettre en scène cet ultime volet qui ne fut jamais adapté à l’écran. Un projet proposé au réalisateur par la productrice Hélène Cases, qui souhaitait porter à l’écran ce troisième volume, dans lequel Marcel Pagnol parle se son adolescence, et de la manière dont il découvre les secrets cachés de ses parents. Des parents moins parfaits qu’il ne le pensait, il y dépeint également les premiers émois amoureux et l’amitié qui pousse aux aventures dans une Provence qui offre tellement de possibilité d’histoires réelles ou inventées.
Mais Christophe Barratier, qui avait réussit à nous embarque dans son précédent film « Envole moi » (2020), par une retenue plus visible, revient ici à ses défauts qui ont donné un résultat plus mitigé lors de son adaptation de « La Guerre des Boutons ». Parfois, la simplicité d’n roman se suffit à lui-même, et le réalisateur ne semble jamais vouloir l’accepter et se sent constamment obligé d’en rajouter ^plus dans la dramaturgie. Alors certes, il est allé puiser dans les interviews de l’auteur, dans tout ce qu’il pu raconter sur son adolescence qui puisse venir compléter une œuvre un peu décousue. Mais cela vient alourdir le propos et manque cruellement de légèreté pour rester à hauteur d’enfant. Car toute la force des « Temps des Secrets » de Pagnol est la faiblesse de celui de Barratier : Il lui manque ce regard à hauteur d’enfant, par envie de trop en mettre pour coller aux discours du moment. Du coup, le réalisateur reste trop à distance de ses héros, et le spectateur manque de surprise pour être marqué dans cette aventure tendre et légère.
Et puis, il y a la prestation des acteurs. Si Mélanie Doutey (Donne-moi des Ailes) remporte les suffrages, par une composition toute en douceur et en force, ce sont les acteurs François-Xavier Demaison (L’Outsider) et Guillaume de Tonquédec (Délicieux) qui rate leurs prestations. D’abord parce que les acteurs en font trop mais surtout, il y a cet accent beaucoup trop forcé qui ramène à cette question que l’on se posait déjà du temps de l’adaptation de « Marius » et « Fanny » par Daniel Auteuil en 2012 et 2013 : Pourquoi prendre des acteurs Parisiens pour jouer des personnages de Pagnol tellement marqué par cet accent chantant ? Cela provoque inévitablement des déséquilibres dans le jeu des acteurs, et peut même parfois pousser au ridicule plus qu’à la réussite.
En conclusion, « Le Temps des Secrets » de Christophe Barratier manque définitivement de fraicheur et de simplicité, ce qui fait pourtant la signature de Pagnol : Aborder par la simplicité des sujets liés aux liens familiaux et à la société. Et puis surtout, adapter Pagnol, le plus grand représentant et défenseur de la Provence, en faisant interpréter ses personnages par des acteurs parisiens est un non-sens absolu !