Dans les années 50, attirée par la promesse d'un avenir meilleur, la jeune Eilis Lacey quitte son Irlande natale et sa famille pour tenter sa chance de l'autre côté de l'Atlantique. À New York, sa rencontre avec un jeune homme lui fait vite oublier le mal du pays... Mais lorsque son passé vient troubler son nouveau bonheur, Eilis se retrouve écartelée entre deux pays... et entre deux hommes.
Déjà à l’origine de « Boy A » un magnifique film sur le droit à l’oubli après avoir purgé une peine de prison, John Crowley s’associe au jeune réalisateur Paul Tsan pour nous livrer une autre vision de son pays Irlandais. Celui des valeurs, de la rigueur mais aussi de la détermination et du déracinement en nous parlant d’une jeune femme décidée à réussir sa vie et qui voit dans les Etats-Unis l’unique échappatoire à la pauvreté et l’enfermement des valeurs sociétale qui régisse sa famille. Jamais dans le mélo de base mais au contraire dans un film ouvert presque respirant, ils nous exposent les obstacles et les ambitions de cette jeune femme dans une intrigue redoutablement simple mais exposée avec beaucoup de finesse, d’amour et de connaissance.
Car la réussite de ce film tient majoritairement dans la capacité des réalisateur de nous imposer un style qui ne soit pas trop sombre ni trop lumineux pour ne pas tomber dans le piège des bonnes vieilles caricatures d’Hollywood. Ici on apprend la fierté de ces hommes et surtout de ces femmes à venir d’Irlande pour participer à la naissance d’un grand pays, mais on y voit également tous ceux qui ont aidé à la construction et qui au crépuscule de leur tombent dans l’oubli et dans la misère. Le scénariste Nick Hornby, qui avait déjà travaillé sur un film nominé aux Oscars « Wild », livre un scénario qui a su retenir toute la finesse du livre de Colm Toibin, notamment en conservant toute la fierté du personnage à travers toutes les étapes de sa transformation et tous les moments de son histoire, qui la feront douter ou la rendront encore plus belle.
D’une simple histoire d’amour, le scénariste signe une histoire brillante sur le déracinement et l’attachement à deux pays. On pourrait très bien y voir également, ce besoin vital de garder une part de ses racines en permanence dans notre cœur pour mieux en éprouver le besoin de s’y ressourcer. Ici, la jeune Eilis, part pour les Etats-Unis dans un objectif d’une vie meilleure, elle y découvre la dureté de s’adapter, le manque du pays dont elle vient, ses amis, sa famille, mais elle découvre aussi l’amour, la passion et ce goût si subtile de la séduction et parfois de la transgression, pour, au final, par nécessité retourner aux pays et retrouver ce qui faisait chavirer son cœur et se rendre compte de l’essence même de sa vie.
La mise en scène soignée, amène avec une subtilité remarquable chaque étape de ce périple émotionnel. En utilisant de grands plans lorsque la jeune fille est en Irlande ou des plans plus serrés, peut-être plus académique, lorsque qu’elle commence sa vie aux Etats-Unis, comme pour pieux illustrer l’enfermement dû à la découverte et à la peur de l’inconnu, les réalisateur parviennent à nous plonger sans aucun faux pas dans les méandres de cette histoire au romantisme fascinant qui fit les grandes heures d’un certain Hollywood, il y a bien longtemps de cela.
En conclusion, « Brooklyn » est un film grandiose, dont le sujet à première vue d’une grande simplicité, se révèle bien plus complexe et offre même à certain détour une double lecture sur l’immigration, et l’espoir de jours meilleurs. Un film à découvrir pour son interprétation impeccable et sa réalisation remarquable.