Haute-définition : somme nous ready ?



Que signifie réellement « TV HD » ? S'agit-il d'un nouveau standard ou d'un tour de passepasse marketing ? Est-ce la condition sine qua none pour un passage réel au numérique et à tous ses avantages induits ? Les émissions en HD ont-elles commencé, ou la Coupe du Monde de football en Allemagne va-t-elle marquer le vrai départ ? Mon matériel est il compatible ? Devrais-je changer mon équipement - lecteur de DVD, magnétoscope, média center, console ?

 

Billet d’humeur par Gérard Clech (lavinumerique.com)

 

Car aujourd'hui, après le CeBIT qui vient de consacrer l'année 2006 comme celle de la naissance de la TV HD en Europe, et singulièrement en France, le domaine offre un large panel de bonnes questions et face à celles-ci des réponses qui ne sont pas toujours les bonnes.

Pourquoi ? Parce que les fabricants n'ont pas – loin s'en faut – la même vision (un comble) des choses … Parce que pour certains, plus pressés d'écouler leurs stocks d'écrans, y compris cathodiques, il s'agissait d'entretenir un certain flou… Puis il y eut l'apparition de la vraie-fausse norme « HD Ready » censée servir de référence pour les consommateurs mais qui, techniquement parlant, est pour le moins sujette à caution.


Le culte du petit écran … devenu grand !

Il faut dire que plus que jamais la lucarne est magique … Objet de culte quotidien, le téléviseur se trouve à la croisée des chemins, au coeur de la convergence et de la migration du marché vers le tout numérique – l'abandon de l'analogique étant programmé suivant les pays entre 2010 et 2012 (la France luttera pour la place de lanterne rouge, faute de décisions politiques suffisamment rapides dans les 10 dernières années…). Adieu donc standards PAL et SECAM,575 ou 625 petites lignes horizontales et trames… Adieu monde analogique, qui aura donc tenu un demi-siècle. Bienvenue dans le 21ème !

Seul problème : les consommateurs et la société toute entière entrent dans le numérique et dans la « haute définition » sans avoir de certitude. A preuve : les guerres entre différentes normes, un grand classique de l'industrie moderne. Les annonces successives puis la présentation des premiers produits Blu-Ray et HD-DVD – Toshiba lançant par exemple le premier ordinateur portable équipé d'un lecteur-enregistreur HD-DVD - rappellent étrangement les premiers pas des magnétoscopes à la fin des années 70 et la bataille Betacam vs VHS – avec le V2000 européen en embuscade qui n'aura jamais réussi à percer. Derrière le combat de standards pour l'enregistrement vidéo se profile d'autres combats, comme celui pour la cassette vidéo qui a été suivi par la lutte entre DVD + R/RW et - R/RW. Outre le HD-DVD et le Blu-Ray (l'un également adopté par Sony pour sa console de jeux Playstation 3, l'autre adoubé par Microsoft pour sa Xbox 360), d'autres concurrents pointent déjà le bout du nez. A commencer par l'EVD (Enhanced Versatile Disc), une technologie chinoise qui dit vouloir se concentrer sur le seul Empire du Milieu, mais qui pourrait bien se sentir des ailes mondiales en cas de succès commercial sur son marché intérieur de plusieurs centaines de millions de consommateurs potentiels ! Et l'on peut également compter sur le VMD (Versatile Multilayer Disc), une technologie britannique dédiée aux « marchés émergents », décidément dans tous les esprits (comme en témoigne l'ordinateur bon marché de Nicolas Negroponte ou les mobiles à prix plancher présentés récemment à l'occasion du salon 3GSM de Barcelone).

Deux de sortie …

Les premiers lecteurs Blu-Ray seront disponibles le 23 mai 2006. Seul le marché américain sera dans un premier temps concerné. Ils ont été précédés de quelques semaines par les lecteurs HD-DVD, aussi bien en OEM qu'en retail. En Europe et en France, le coude à coude entre lecteurs Blu-Ray et lecteurs HDDVD va être serré… A quel prix ? Le CeBIT n'aura pas été très instructif de ce point de vue. Les premiers films HD-DVD sont proposés aux USA entre 30 ou 40 dollars, suivant la « fraîcheur » des films. Une somme rondelette si on la compare au prix actuel des DVD-Vidéo …

Avec la Coupe du Monde, le mouvement vers la TV HD s'accélère

Que conseiller aux consommateurs désireux de s'équiper en prévision de la Coupe du Monde de football (mais déjà les JO de Turin étaient pour partie retransmis en HD simultanément à la retransmission SD, et bientôt ce sera le cas de Roland Garros) ? D'être prudents et de réunir le maximum de conseils avisés (vendeurs, amis, forums et sites Web sur le Net, magazines spécialisés, etc.). Vu le prix d'acquisition d'un écran plasma ou LCD – voire DLP, quand bien même celui-ci a chuté ces derniers mois, l'acte d'achat ne peut être d'impulsion mais raisonné et ne s'appuyant pas uniquement sur la variable prix …

Le label HD-Ready a une utilité : rassurer le consommateur et simplifier l'approche de l'achat par la garantie constructeurs et distributeurs d'une compatibilité minimum. Certains distributeurs, comme Boulanger ou la Fnac, vont plus loin en donnant dans la pédagogie et dans l'anti-jargon via d'excellents guides pour choisir en connaissance de cause l'écran qui trônera au salon pour les 3 ans à venir, au moins …

Un point s'avère primordial : la définition offerte par la dalle. La définition standard des émissions que la plupart d'entre nous regardent aujourd'hui possède 575 lignes de détail en PAL tandis que théoriquement la télévision haute définition en possède 1080, soit presque deux fois plus ! Mais il faut aller un peu plus loin pour mieux choisir. La TVHD se décline en effet actuellement en deux « résolutions » appelées respectivement 1080i et 720p. Le 1080i offre plus de lignes et de pixels à l'écran, tandis que le 720p joue sur la technique dite du « balayage progressif », censée offrir une image plus homogène demeurant nette même quand il y a beaucoup de mouvements à l'écran. Le 1080i affiche 1920 x 1080 pixels alors que le 720p se « contente » de 1280 x 720.


Il y a encore loin de la coupe aux lèvres …

Les vidéastes le savent déjà, les modèles de téléviseurs HD Ready ne sont pas forcément en mesure d'afficher la pleine résolution d'une émission tournée en HD. Pour l'heure, à l'exception de quelques modèles plats et cathodiques fort onéreux, et de quelques vidéoprojecteurs haut de gamme, impossible de tirer un parti maximal de la «norme »1080i. En effet, les écrans plasma comme les LCD, les écrans DLP et les futurs SED ont un nombre de pixels fixe, baptisé « résolution native ». Et plus ce nombre est élevé, plus le niveau de détails est bon, impressionnant même ...

Et si l'émission est fournie en qualité « normale » (SD) ? Et bien qui peut le plus peut le moins, un téléviseur HD améliorera à la marge l'image fournie. La quasi-totalité des modèles TVHD possèdent en effet un processeur capable de convertir à grande vitesse l'image standard en balayage progressif afin d'en améliorer sensiblement la stabilité. N'attendez pas cela dit un miracle, même avec une image provenant par exemple de la TNT, par définition en qualité numérique… D'autant que la diagonale imposante des grands écrans a tendance à accroître « à vue d'oeil » les « artefacts » et autres petits défauts d'affichages… En revanche, les TV HD représentent d'emblée une véritable aubaine pour les gros consommateurs de DVD « ancienne norme » (l'actuelle en fait). Surtout pour ceux qui possèdent un lecteur ou un enregistreur DVD doté du « balayage progressif » (ou Progressive Scan). Un bon premier aperçu de la qualité HD, en attendant l'arrivée du HD-DVD et du Blu-Ray !

Quid de l'obsolescence ?

Acheter un téléviseur HD, qu'il soit simplement « HD Ready » ou « Full HD » (encore très rare), n'est pas à proprement parler un achat risqué en termes d'obsolescence. Seul risque encouru : que les Majors du cinéma (et les récentes décisions de la loi DADVSI devraient les encourager à le faire) se décident unilatéralement à appliquer une protection, un verrou numérique dans le but de protéger leurs films d'un risque de copie « analogique ». Cette menace est liée à la présence sur les connecteurs les plus récents et les plus puissants, DVI et HDMI d'un protocole de protection baptisé HDCP. Un protocole qui pourrait par exemple interdire la visualisation sur un écran HD de films précédemment stockés dans un format « non agréé » tel que le DivX. Quoi qu'il en soit, et pour garantir la pérennité à plus de trois ans de l'écran, il faut nécessairement opter pour un téléviseur muni d'une connexion HDMI (ou DVI dans le cas d'écrans hybrides micro/TV).