Approchez si vous n’avez pas peur ! Si vous n’avez pas peur de ce que Stephen Sommers vous a concocté. Si vous n’avez pas peur de Hugh Jackman en chasseur de vampire. Si vous n’avez pas peur de Kate Beckinsale tout de cuir vêtue. Si vous n’avez pas peur de la créature de Frankenstein, de Dracula et du loup-garou. Et surtout si vous n’avez pas peur d’un film qui aligne les scènes d’action sans les soutenir par une histoire ou des personnages.
Titre original : Van Helsing
USA, 2004
Réalisateur : Stephen Sommers
Acteurs : Hugh Jackman, Kate Beckinsale, Richard Roxburgh (Moulin Rouge, la Ligue des gentlemen extraordinaires), David Wenham (le Seigneur des anneaux 2 & 3)
Musique de : Alan Silvestri
Durée : 2h10
L’histoire
Van Helsing, après s’être débarrassé de Mr Hyde (que fait-il là ?), est envoyé par le Vatican en Transylvanie, où le comte Dracula s’apprête à décimer une famille qui le combat de génération en génération depuis, justement, des générations. Mais peut-être le péril est-il encore plus grand (rire sardonique) !
La recette étant pourtant plus qu’alléchante : une ambiance gothique, des effets spéciaux de pointe, un jeune héros charismatique, une jeune héroïne charismatique, trois des monstres les plus classiques, un budget lui aussi monstrueux (plus de 160 millions de $, rassemblés sans doute sans l’aide de l’office de tourisme de Transylvanie), secouez, secouez encore, et vous obtiendrez un film qui bouge et qui a toutes les chances de divertir son public. Partant de là, il va falloir faire deux groupes. Ceux qui veulent juste de l’action, de l’action, de l’action, avec des effets spéciaux à faire sortir les yeux de la tête, à ma gauche. Ceux qui sont tout de même un peu plus exigeants avec un film, même un divertissement, à ma droite, et je vous y rejoins (pas facile, d’ailleurs, de se placer à sa propre droite, mais c’est une autre histoire).
Commençons par ce qui réjouira le groupe de gauche. De l’action. Impossible de reprocher au film qu’il n’y ait pas assez d’action : il n’y a que ça, pendant 2h10. On lui reprocherait plutôt de ne pas nous laisser souffler, et de noyer chaque séquence d’action dans le flot continu de l’action, sans la mettre en valeur. Mais si vous êtes amateur, prenez une grande inspiration et lancez-vous. Prenez une inspiration d’autant plus grande que les effets spéciaux vont vous couper le souffle. S’ils ne sont pas tous toujours réussis esthétiquement, ils sont dans l’ensemble plus que convaincants. Toutes les séquences de transformation, notamment (mention spéciale aux transformations en loups-garous, aussi originales que réussies), sont parfaitement crédibles, et il est impossible de voir la différence entre les acteurs et leurs avatars en images de synthèse (à l’exception du Mr Hyde du début, plus réaliste que le roi scorpion du Retour de la momie, mais c’est pas encore ça). Du beau boulot dans l’ensemble, à peu près du niveau que l’on est en droit d’exiger dans un film maintenant, plutôt au-dessus de la moyenne ; et de plus ces effets spéciaux sont très nombreux. Vraiment très nombreux. Un petit mot également sur les décors, gothiques et impressionnants, à défaut d’être originaux, mais certains valent le déplacement (la salle de bal par exemple).
Plaçons en milieu de critique le côté du film qui peut, selon l’humeur, compter en bon ou en mauvais : ses deux mille milliards de clins d’œil et repompages. Je me dispense de vous citer tous les plans qui rappellent d’autres films, toutes les scènes recopiées sans vergogne, toutes les idées reproduites à l’identique. Le tout vous permet, au choix, de jouer à chercher le film original, ou de désespérer de voir une seule idée propre au film. Et si vous désespérez à ce niveau-là, vous désespérerez aussi sans doute de la minceur très slim fast du scénario, de son histoire en général, et de la superficialité de ses personnages. Van Helsing a des cauchemars (dont l’explication sera assez fumeuse et pas vraiment convaincante), et à part ça il serre la mâchoire en dessoudant du monstre et ne permet même pas à Hugh Jackman de paraître cool. Anna vit pour venger sa famille, se tient bien droite en dessoudant du monstre et ne permet quasiment jamais à Kate Beckinsale de nous gratifier de son joli sourire. Carl le moine joue le quota de personnage maladroit et rigolo, sans qu’on sache ce qu’il cherche ou veut. Dracula a un costume un peu large pour que les épaules de Richard Roxburgh les remplisse, peinant à lui donner du charisme et échouant à le rendre inquiétant. Les autres rôles sont au mieux séduisants (les trois épouses de Dracula, dans leur version non-vampire), au pire ridicule (Igor, le serviteur de Frankenstein, maquillé à la truelle), et en général transparents. A cause de tout cela, les scènes d’action restent de l’action à l’état brut, sans enjeu et sans que le spectateur ne prenne cause pour les protagonistes.
Voilà. Je ne vais pas essayer de vous convaincre que même un divertissement pur doit avoir un scénario digne de ce nom, mais il manque ainsi la motivation pour les scènes d’action, en plus du manque de leur mise en valeur. Et j’en reviens donc à mon exergue : ceux qui cherchent de l’action bête et méchante et des effets spéciaux qui tuent se régaleront (tant mieux pour vous, je ne vous jette pas la pierre, Pierre), et ceux qui sont un peu plus exigeants resteront sur leur faim. Ce n’est pas vraiment qu’ils s’ennuieront, mais ils regretteront le gâchis que ce film a fait d’un principe de départ qui aurait pu donner un véritable feu d’artifice.
A voir : pour l’action ou les effets spéciaux, et c’est tout
Le score presque objectif : 6/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : -1, élevez votre niveau d’exigence, ou +1, mettez votre cerveau et votre sens critique en veilleuse.
Sébastien Keromen