Titre original : Kill Bill vol. 2
USA, 2004
Réalisateur : Quentin Tarantino
Acteurs : Uma Thurman, David Carradine, Michael Madsen, Daryl Hannah, Gordon Liu
Durée : 2h15
L’histoire
5 personnes à abattre sur la liste de la mariée. 5 personnes qui l'ont laissée pour morte le jour de son mariage. 2 down, 3 to go. Le déchu Budd, la furieuse Elle, et Bill, le Bill du titre, celui qu’elle doit tuer. Où la conduira cette vengeance ?
Enfin, l’attente est terminée ! Après un premier volume déconcertant à la première séance, mais qui se bonifiait à chaque nouvelle vision, on attendait de pied ferme le volume 2. Serait-il à la hauteur ? Répondrait-il aux questions que posait le volume 1 ? Serait-il aussi jubilatoire ? Ne cachons pas plus longtemps la réponse : le volume 2 déconcerte autant (même par rapport au volume 1) que le premier opus, mais semble avoir les mêmes armes pour devenir aussi excitant à voir et revoir que le volume 1. En fait assez différent, mais provoquant la même réaction. Pas facile à expliquer, mais tentons tout de même.
Tout d’abord, on retrouve très vite ses marques (pour mémoire, mieux vaut avoir vu le volume 1, d’abord pour suivre le 2, mais aussi parce qu’il est excellent et qu’il vaut mieux le voir en premier). On reprend les personnages où on les avait laissés, en tout cas pour les scènes postérieures à l’histoire du premier, le volume 2 ne se gênant pas pour continuer à raconter dans le désordre, y compris des bouts antérieurs au volume 1. Les pièces s’emboîtent avec celles que l’on avait déjà, même si la vision du volume 2 n’offre pas vraiment de nouvel éclairage sur le volume 1, mais plutôt sur l’histoire dans son ensemble. Car le volume 2 n’est pas plus long que le 1 à cause de scènes d’action (il en a plutôt moins), mais parce qu’il ajoute un background important aux principaux protagonistes. En clair, en plus de la forme, on a enfin le fond. Ne vous attendez donc pas à une redite du 1, mais plutôt à son étayage, aux fondations qui ont mené à sa débauche de violence.
Le film est donc plus bavard que sa première partie, mais sans que cela ne soit ennuyeux. On aimerait bien parfois avancer un peu plus vite vers une scène d’action, mais dans l’ensemble la qualité du dialogue et son interprétation suffisent à rendre chaque scène intéressante, sinon passionnante. Par qualité du dialogue et de l’interprétation, je ne parle pas de performance hors du commun ou de dialogues jamais entendus, mais ce ton bien particulier qu’ont les dialogues de Tarantino, entre le premier degré un peu exagéré et le second degré complice. Il fallait un peu de temps pour s’habituer dans le 1, mais là, on est chaud, et chaque scène est un délice. Surtout que les acteurs font tout de même de très belles prestations, Uma Thurman moins monolithique que la première fois, David Carradine aussi charismatique qu’effrayant, Michael Madsen tout en déchéance, et Daryl Hannah (revenue d’entre les has-been) tout en furie. Tous surjouent juste ce qu’il faut pour ne pas plomber leurs personnages et pour décupler le plaisir du spectateur.
Et n’oublions pas la réalisation, encore meilleure si possible que le premier opus. L’image est dans l’ensemble parfaitement soignée, peut-être même un peu trop, et les plans serrés, dynamiques et originaux rappellent par moment la mise en scène d’une BD. Pour éviter l’effet catalogue, je passe sur les différents traitements d’image pour ressembler à tel ou tel type de film, mais c’est assez varié. Certaines séquences sont absolument scotchantes, à l’image de celle de la tombe, juste avec les bruitages, un tour de force. Et à propos de son, la musique reste toujours un point fort de Tarantino, même si elle semble un peu moins éclatante que la géniale bande son du volume 1. Tarantino joue à nouveau sur le décalage, et après avoir mis en scène un combat au katana sur musique latino, passe de la techno pour une scène de combat au Mexique, avec toujours autant de réussite.
On a pourtant une petite inquiétude, au début, quand on ne retrouve que peu le ton du volume 1. Et effectivement, le volume 2 est assez différent, comme le deuxième épisode d’une série transportant les mêmes personnages dans des environnements différents. Niveau 1 : le Japon, niveau 2 : le désert sud-américain. A chaque fois Tarantino se réapproprie les codes du genre, pour les détourner ou les mettre en valeur, selon son humeur. Ce qui permet au volume 2 d’être aussi passionnant que le 1, sans l’impression de redite. Le genre est même un peu différent, avec un volume 1 porté quasiment uniquement sur l’action, alors que le 2 se permet quelques scènes de comédie, et d’autres scènes beaucoup plus graves. Par rapport aux interrogations sur le volume 1, le volume 2 n’apporte pas toujours des réponses très convaincantes, notamment sur la narration en désordre, ou la nécessité de cacher le nom de la mariée. Mais à vrai dire, on s’y était fait dans le 1, et on n’en a plus rien à faire dans le 2. On regrettera juste un peu la disparition du personnage de Sofie Fatale, qui semblait pourtant encore présente dans l’histoire à la fin du 1. Peut-être dans une future version longue… Le cliffhanger du premier semble également un peu déplacé, et gâche une surprise qui aurait été plus grande directement dans le 2.
Arrive le moment de faire le point sur la bilogie de Kill Bill. Est-il encore besoin que je vous convainque ? A part pour ceux qui sont réfractaires à la violence (le 2 n’est pas aussi sanglant que le 1, mais comporte tout de même son lot de scènes choc), c’est un incontournable, un must en matière de réalisation et de plaisir du spectateur. Maintenant qu’on était complètement dingue du volume 1, on priait pour que Quentin n’ait pas raté le 2. Et il a entendu nos prières. Le 2 partage avec le 1 une impression trop rarement ressentie au cinéma : l’impression que beaucoup moins de temps que la durée du film s’est écoulée, signe d’un grand plaisir de spectateur. Je faisais part dans la critique du 1 de mon agacement sur le découpage en 2, le délai entre les deux films, les manipulations commerciales qu’il pouvait y avoir derrière. Et maintenant, on nous annonce pour dans quelque temps une version « recollée » des 2 films, peut-être une version longue, et même un volume 3 dans 15 ans. Devant tant d’opportunisme, criez avec moi à Quentin : « Envoie-nous tout ce que tu veux, on prend tout, encore, encore ! ».
A voir : absolument, sauf âmes sensibles
Le score presque objectif qui vaut pour le 1 tout seul, le 2 tout seul, et les 2 à la suite : 9/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : +3 pour le 1, +3 pour le 2, ça nous fait un beau +6, vite vite payez-vous-en une tranche !
Sébastien Keromen