Matrix revolutions
Titre original : The Matrix revolutions
USA, 2003
Réalisateur : Andy Wachowski & Larry Wachowski
Acteurs : Keanu Reeves, Laurence Fishburne, Carrie-Anne Moss, Hugo Weaving, Jada Pinkett Smith, Lambert Wilson, Monica Belluci
Durée : 2h10

L'histoire :
Les machines continuent leur progression vers Zion, alors que l'esprit de Neo est introuvable, et que Trinity et Morpheus croient toujours en la prophétie. Ce qui a commencé doit finir.


Résumons la situation.

En juin 1999, sortait Matrix, premier du nom. Grâce à son scénario mêlant science-fiction, philosophie, religion et superstition, grâce à ses effets spéciaux inédits, il a fait date dans le cinéma. Si je lui reconnais une importance cinématographique indéniable et des tas de qualités, j'ai toujours buté un peu sur le côté collage d'idées venant de partout, ainsi que sur la musique heavy metal qui convient aussi peu à mon goût qu'au film. En mai de cette année, sortait The Matrix Reloaded, épisode très controversé et généralement considéré comme décevant. Il faut dire qu'entre la première heure aussi vide d'action que d'intérêt, la sous-quête des clés qui ne fait pas avancer l'histoire générale de la matrice d'un pouce, et à la fin une batterie de révélations un peu trop condensée, le tout arrosé de considérations philosophiques pas très claires et de galvanisation de troupes au premier degré (et la musique qui met en transe, souvenez-vous), le tableau était entaché de pas mal de défauts. Restait la scène aux multiples Smith, impressionnante, et la scène de l'autoroute, juste réussie. En mai toujours, sortait le jeu Enter the matrix, généralement mal noté (là, je n'y ai pas joué, je fais confiance aux spécialistes), et racontant l'aventure de Niobe et Ghost. En juin de cette année, sortait (à la vente) les courts-métrages Animatrix, enrichissant le monde de la matrice par des dessins animés ou d'animation superbes. Et voici enfin venir la conclusion de tout ceci : Matrix revolutions (The Matrix revolutions). Si sans doute encore les avis seront partagés et le débat fera rage, une chose est tout de même indiscutable : mieux vaut avoir vu toutes les œuvres suscitées, ou au moins une bonne partie, pour tout suivre.



En effet, il est non seulement obligatoire d'avoir vu Matrix reloaded, mais aussi de s'en souvenir dans le détail, ce qui sera difficile chez nous, où il n'est plus à l'affiche et pas encore à la vente. Clairement, Matrix revolutions ne s'embarrasse pas à présenter les personnages, expliquer les références, ou souligner les implications de tel ou tel acte. Révisez donc Matrix, repassez-vous mentalement tous les éléments de Reloaded, un petit coup de Second renaissance et Kid's story des Animatrix, et finissez le jeu pour savoir où en sont Niobe et Ghost. Et là, Revolutions peut commencer.

Pour vous faire rapidement une idée et éviter d'en lire trop sur le film dans cette critique, je pense que l'étalon que chacun attend est : ça vaut quoi par rapport à Reloaded ? Faisons le calcul : moins de scènes d'action spectaculaires (on y reviendra), moins de blabla pseudo philosophique, moins de musique transcendante et orgiaque, moins d'aventures dans la matrice, moins de discours interminables, plus de machines, plus de bonne musique (si comme moi vous n'aimez pas le heavy metal), plus d'agents Smith, plus de rythme en général, je pose 2 et je retiens 1, j'ajoute 19,6% de TVA, et j'obtiens un film qui se situe tout de même un cran au-dessus de Reloaded. Principalement grâce à l'absence des lourdeurs de Reloaded, et au plaisir de retrouver une dernière fois tout ce petit monde. En bref, si vous avez été voir Reloaded (si c'est pas le cas, vous pouvez arrêter de lire tout de suite, vous rattraperez tout ça à la télé), ce serait dommage de ne pas finir l'histoire. Allez-y.


Voyons tout ça un peu plus en détails. L'histoire, pour commencer. Reloaded nous abreuvait d'une heure de Zion sans grand intérêt, d'une heure de matrice qui ne faisait pas avancer l'intrigue de la trilogie, et de 5 minutes de révélations passionnantes mais un peu trop rapides. Ici, il n'y a que très peu de longueurs, le film présentant la plupart du temps des scènes d'action, pas d'action grand spectacle, mais où il y a toujours quelque chose à faire. Les informations sur la matrice sont ici dispensées tout au long du film, mais n'espérez pas des réponses à toutes les questions. Ou alors elles sont bien cachées et faudra voir le film plusieurs fois. En fait, il n'y a aucune révélation du niveau de la fin de Reloaded, et les réponses aux questions qu'on se posait sont soit peu convaincantes soit peu claires, le film pratiquant un flou artistique peut-être pas si artistique, mais indéniablement flou. L'histoire du film est, elle, très réduite, puisque la grande partie concerne Zion, et se résument à : les machines attaquent, les hommes se défendent. Même si on évite l'ennui infini des tunnels de dialogue du deuxième opus, le scénario n'est pas le point fort du troisième. On aura encore droit à quelques clichés un peu lourd, comme le ralenti sur Trinity courant vers Neo, le manteau de cuir claquant au vent (j'invente rien), ou les deux jeunes femmes qui se prennent pour les filles à Rambo et descendent du robot, ou encore le p'tit jeune inexpérimenté mais qui va être à la hauteur. Mais bon, rien de très grave.

Côté personnages, le bilan est encore plus terne que Reloaded. Les héros sont toujours aussi monolithiques et peu expressifs, et on ne voit quasiment pas le Mérovingien et Persephone. Il ne reste donc que l'agent Smith pour relever le niveau, ce qu'il fait de manière jubilatoire, une fois de plus. Tous les personnages sont encore une fois définis par leurs actions plus que par leur personnalité ou leurs sentiments. Peut-être un peu aussi par leurs choix, puisque c'est un thème récurrent dans Matrix, mais ces choix ne sont guère surprenants.


Catégorie image et son, où en est l'emballage ? Côté son, surprise (et bonne), le heavy metal a quasiment disparu, pour laisser place à une musique genre chants grégoriens ou presque, mais avec en tout cas plus d'ampleur et les chœurs qu'il faut pour ajouter le côté mystique. Par contre, comme on pouvait le supposer puisque les deux films ont été tournés en même temps, l'esthétique ressemble fortement à Reloaded, avec les même vêtements classe, le même Zion tout vert tout moche, les mêmes vaisseaux qui ressemblent à des cageots entourés de pneus. Trois nouveautés tout de même. D'abord les APU, c'est-à-dire les armures gigantesques et robotisées qu'utilisent les humains (si, si, vous les avez vues dans la bande-annonce), très réussies, tant côté design qu'effets spéciaux. Ensuite, le décor avant le final, qu'on ne nommera pas pour ne pas gâcher la surprise, et qui tient bien la route aussi. Et enfin, la ville où Neo affronte Smith, également de bon niveau. Mais pourquoi y pleut-il ?

C'est vrai, ça, pourquoi il pleut pour le combat entre Neo et Smith ? Ce serait pas uniquement pour nous en mettre plein la vue ? Même si c'est effectivement réussi esthétiquement, on ne peut s'empêcher de penser que la pluie et les éclairs servent surtout à montrer à quel point ils maîtrisent les effets spéciaux, alors qu'un combat juste nocturne n'aurait rien changé à son rôle dans l'histoire. Côté effets spéciaux, on notera aussi l'attaque par les sentinelles, qui montre à l'image un nombre inimaginable et en tout cas vachement impressionnant de robots. Même si l'action est impossible à suivre tant le nombre de robots et de tirs est important, ça en jette. Le combat entre Smith et Neo est également un beau morceau, qui arrive presque (oui, presque) à ne pas rendre ridicule un combat aérien entre deux mecs. En résumé, les morceaux de bravoure font un poil moins ambitieux que Reloaded, mais assurent leur part de spectacle.


Et si on tentait d'arriver à une conclusion : bien ou pas bien ? Il y a deux réponses. Si vous cherchez un bon film d'action, alors plutôt bien. Il n'y a quasiment pas de temps mort, des scènes impressionnantes, des scènes esthétiques, même un bout de scène assez poétique, des sentiments assez balourds mais c'est pas grave puisqu'on vient voir de l'action. Si vous espériez que Revolutions relèverait le niveau de Reloaded et finirait la trilogie en beauté, le compte n'y est pas. Bien sûr, on est content d'avoir encore un film sur la matrice, mais d'une part on a surtout droit à du Zion (je pense que moins de 40 minutes se passent dans la matrice sur les 2h10 du film), et donc à un affrontement hommes machines qui pourrait se passer totalement de matrice, et d'autre part on reste sur sa faim sur ce qu'on apprend sur la matrice elle-même. En résumé : vous n'avez pas vu le 2, passez votre chemin ; vous avez détesté le 2, c'est peut-être pas la peine de tenter le 3 ; vous avez moyennement apprécié le 2, tentez le 3 et découvrez la fin de l'histoire ; vous avez aimé le 2, de toute façon vous irez voir le 3, quoi que j'en dise. Un choix personnalisé, en somme, qui se résume par l'équation simple : Matrix >> (ça veut dire très supérieur, je rappelle) Matrix revolutions > Matrix reloaded. Mais moi, ce que je préfère, c'est Animatrix. Na.



 


A voir : si vous avez vu Reloaded (indispensable) et ne l'avez pas détesté
Le score presque objectif : 7/10
Mon conseil perso : +/- 0, voyez selon votre cas

Sébastien Keromen