En pleine tourmente hivernale, Ursus, un forain haut en couleurs, recueille dans sa roulotte deux orphelins perdus dans la tempête : Gwynplaine, un jeune garçon marqué au visage par une cicatrice qui lui donne en permanence une sorte de rire, et Déa, une fillette aveugle. Quelques années plus tard, ils sillonnent ensemble les routes et donnent un spectacle dont Gwynplaine, devenu adulte, est la vedette. Partout on veut voir ‘L’Homme qui rit’, il fait rire et émeut les foules. Ce succès ouvre au jeune homme les portes de la célébrité et de la richesse et l'éloigne des deux seuls êtres qui l’aient toujours aimé pour ce qu’il est : Déa et Ursus.
Déjà adapté plusieurs fois à l’écran, « L’homme qui rit » est une œuvre magistrale et complexe de Victor Hugo, qui fut aussi l’une de ses plus grandes blessures, car le roman ne reçut pas un accueil chaleureux lors de son édition. Pourtant, ce roman reprend toutes les clés de l’œuvre d’Hugo : Une peinture acerbe de la société du XIXème siècle, des personnages rongés de l’intérieur par un mal qui ne peut se guérir, et affublé d’un handicap qui les font se retrouver en marge d’une société qui a peur de la différence. Le roman est une occasion pour Victor Hugo d’offrir une réflexion philosophique sur la beauté intérieure et les digressions d’une société qui ne progresse qu’à travers les signes extérieurs, qu’ils soient de beauté ou de richesse.
Il apparaissait donc logique que le cinéma et la télévision s’intéressent à cette œuvre d’une grande richesse visuelle et narrative. La première adaptation datait de 1928, l’acteur principal y avait souffert un martyre pour se fondre sous les traits de Gwynplaine, un jeune homme handicapé par une cicatrice qui lui fut faite lorsqu’il était enfant et qui donne l’impression de le voir rire en permanence. Il se dit même que les auteurs du DC Comics « Batman » se seraient inspirés du héros de « L’homme qui rit » pour créer « Le Joker ». Une preuve encore une fois de l’importance mondiale de l’œuvre de Victor Hugo.
Pour son adaptation, jean Pierre Ameris, a donc souhaité garder une sorte de mystère autour de cette histoire , sans l’ancrer dans un pays particulier, il a voulu que l’époque puisse être intemporel, faire de son adaptation comme un conte de fée des Grimm ou de Perrault, avec des châteaux perchés, une brume épaisse qui masque parfois le sol, des personnages qui bougent et articulent comme des acteurs de théâtre pour mieux appuyer l’image de la tragédie qui se cache derrière un décor de champ de foire d’antan. De ce point de vue, là, le film est une réussite car, il mêle des répliques parfois contemporaines à celles directement sorties du livre. Le spectateur se laisse aisément entraîner dans une ambiance qui rappelle en bien des points le cinéma de Tim Burton, notamment « Edward aux mains d’argent » ou « Sleepy Hollow ».
Malheureusement, le réalisateur a tendance à privilégier l’ambiance, l’atmosphère de l’ensemble et la narration des acteurs est parfois un peu trop académique pour toucher son but, ce qui perd un eu le spectateur en cours de route et rend le film, certes intéressant, mais un peu en retrait par rapport aux attentes que l’on pourrait avoir. Ainsi, il n’est pas rare de s’entendre dire :" bon et bien voilà on arrête là". En voulant cibler son attention sur le personnage de Gwynplaine, à la différence d’Hugo qui prenait ses distances parfois dans le roman pour s’intéresser à l’environnement des personnages, le réalisateur a pris le risque d’ne vider le contenu de référence qui permettrait au spectateur de mieux s’impliquer dans les aventures de ses héros.
En conclusion, on notera tout de même les prestations remarquables de Marc-André Gondrin (C.R.A.Z.Y.) et dans une autre mesure de Christa Théret (LOL), quand à Gérard Depardieu ‘Cyrano de Bergerac), sa prestation laisse un arrière-goût de loupé. L’acteur ne se présente pas sous son meilleur jour et semble même parfois absent, notamment dans les scènes les plus tragiques.