À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego…S’il s’en sort, le rideau a une chance de s’ouvrir...
Depuis « Amours Chiennes » en 2000 et « 21 Grammes » trois ans plus, le réalisateur Aljandro G. Inarritu ne cesse de surprendre et de faire preuve d’une inventivité rare. Avec « Birdman », il pousse la barre encore plus loin en réduisant la frontière entre fiction et réalité à peau de chagrin. Ici, le réalisateur parle d’une vérité terriblement suintante au-dessus de tous les artistes qui connaissent une gloire facile et rapide, mais qui doivent ensuite vivre avec le risque de l’oubli ou celui de n’être associé qu’à un seul personnage. A une époque où les super-héros remplissent les tiroirs caisses des studios en tout genre, il signe un scénario intelligent et complexe sur la relativité de la célébrité et sur cette course effrénée parfois schizophrénique à la popularité. Au-delà d’un retour à la lumière, on suit surtout le combat d’un artiste pour sauver sa création, son œuvre ultime, celle qui redonnera un sens à sa vie, qui lui offrira un retour au confort qu’il a connu grâce au super-héros qui l’a fait connaître.
Et comme pour mieux appuyer son sujet, le réalisateur inflige à son personnage un double imaginaire incarné par son célèbre personnage, qui vient en permanence le juger, lui prodiguer des conseils nombrilistes et pervers pour mieux le faire sombrer dans le doute permanent. Très loin des caricatures qu’Hollywood nous inflige lorsqu’il parle de ses comédiens, Inarritu explore le subconscient de son personnage, creuse au plus loin pour que le spectateur ne soit pas un simple spectateur mais qu’il puisse s’identifier à Riggan Thompson (Michael Keaton). Sa mise en scène est soignée, comme toujours, sobre et en même temps d’une grande complexité, frôlant parfois avec la frontière qui sépare le drame de la caricature.
Et quoi de mieux pour interpréter son personnage que Michael Keaton (Batman) qui connut ses moments de gloire en jouant l’homme chauve souris pour Tim Burton, mais dont la carrière cinématographique prit un tout autre tournant lorsqu’il décida d’arrêter la franchise au bout de deux films. A la limite entre fantasmagorie et inspiration assumée le réalisateur et son comédien trouvent une tonalité résolument captivante pour mieux prendre dans ses filets un spectateur prisonnier de ses propres fantasmes. Loin de jouer dans la patho, Michael Keaton reste d'une grande sobriété, se laisse guider par les faits et les errances de son personnage et lui insuffle toute son expérience personnelle. Face à lui le reste de la distribution :
Edward Norton (American History X),
Emma Thompson (Gangster Squad) et
Naomi Watts (The Impossible) viennent apporter un équilibre remarquable qui font de l’ensemble un film passionnant et intriguant en même temps.