Crédits
photos pour Sin City : Rico Torres
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Sin
City n’est pas un film comme les autres, quelque soit l’angle
par lequel on l’analyse. Sin City c’est également
un gros film distribué en France par un petit éditeur
indépendant, Wild Side Vidéo. Attention, le terme de
petit n’est pas péjoratif, au contraire, il souligne
un ensemble d’avantages et de contraintes dans un marché
du DVD qui ne s’adresse pas uniquement aux amateurs de grosses
productions américaines. A DVDcritiques, il nous a paru intéressant
de questionner Franck George le chef de projet de ce DVD et Benjamin
Gaessler, le responsable de la communication. |
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Propos
recueillis par Bruno Orrù |
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Bonjour,
Pouvez-vous nous décrire quel type d’éditeur est
Wild Side Vidéo ? |
Benjamin
Gaessler : Wild Side vidéo est un jeune éditeur
indépendant, franco français qui a trois ans et demi.
C’est un éditeur qui s’est rapidement fondé
sur une idée d’indépendance pour faire les choses
comme nous avions tous envie de les faire, marqué sur une volonté
de faire un travail qui était peu et pas fait autour de classiques
oubliés ou peu connus. C’est notamment le travail éditorial
fait autour de notre collection Les introuvables, qui est l’une
des bases fondatrices de Wild Side vidéo et l’un de nos
fer de lance éditoriaux. |
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Ce
sont globalement des titres très éclectiques et variés
puisque ça va du Sisters de Brian de Palma à Hamburger
Film Sandwich de Landis en passant par le Macbeth de Orson Welles
ou encore le meilleur du cinéma Japonais, que l’on connaît
peu. Je pense récemment à Kwaidan ou aux travaux de
Kenji Misumi. Au total aujourd’hui Les Introuvables, ce sont
plus de 40 films. |
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Après
Les Introuvables, il y a la collection Shaw Brothers ? |
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Benjamin
Gaessler : Nous avons en effet continué de creuser
le sillon éditorial initié par Les Introuvables avec
l’avènement de notre collection autour de la Shaw Brothers,
nous proposons régulièrement les joyaux de ce studio
mythique de Hong Kong qui était le Hollywood de l’Est
jusqu’au début des années 80. Ce sont des films
de genre encore, c’est ce que nous apprécions ici, dans
ce cas plutôt des films de sabre et de Kung Fu ; un patrimoine
mondial qui était physiquement invisible depuis plus de 25
ans. Ce
sont des films que l’on n’a jamais vus comme ça,
même quand ils sont arrivés en France à l’époque
pour certains. |
Comme pour la collection
Les introuvables nous avons ce parti pris d’exigence, extrême
presque, puisque ce sont des films que l’on commence par restaurer,
que ce soit au niveau de l’image et du son, si possible à
partir des meilleurs éléments. Pour les films de la Shaw
Brothers, les films sont restaurés à partir des négatifs
originaux. Je le dis d’autant plus facilement que je n’y
suis pour rien, mais ce sont des films qui ont l’air d’avoir
été tournés il y a 5 ans au lieu de 30 ! |
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On essaie d’adjoindre les bonus les plus pertinents et en poussant
cette exigence de qualité et ce plaisir du DVD jusqu’au
packaging.Il est clair qu’au départ c’est une idée
d’artisanat, nous étions très peu et l’on
sortait beaucoup moins de choses qu’aujourd’hui. Il faut
voir que nous sommes aujourd’hui une quinzaine contre six personnes
au départ. |
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Mais
il n’y a pas que des classiques dans votre catalogue ? |
Benjamin
Gaessler : En effet, l’éclectisme et nos
différents coups de cœurs nous portent également
vers le cinéma contemporain, notamment à des premiers
films de réalisateurs ou des gens dans lesquels on croit. Cela
a été le cas assez emblématique de Old Boy de
Park Chan-Wook qu’on a sorti en salles puis en DVD avec le succès
que l’on sait. C’est aussi un autre coréen, KIM
Ki-duk que l’on suit de près, on a sorti déjà
trois de ses films. Mais nous travaillons également sur des
continents "un peu moins asiatiques". N’oublions pas
pour finir cet éventail de notre catalogue la partie des documentaires
avec notamment la collection The Blues dont nous sommes extrêmement
fiers. Nous sommes les artisans là encore du début à
la fin de l’existence de ces films en France, puisque nous sommes
le seul pays au monde où ces films soient sortis en salles.
Il y a certains pays où un ou deux films sont sortis, mais
nous avons sortis six des sept films (Clint Eastwood s’étant
toujours opposé à la sortie en salles du sien). Et puis
naturellement nous les avons sortis en DVD séparément
et très récemment nous venons de rassembler les sept
films, dans un coffret. |
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Il
y a également les films pour enfants ? |
Benjamin
Gaessler : Exactement, nous avons de belles choses avec
une volonté cousine de la collection Les introuvables, en trouvant
de vraies pépites de l’animation japonaise que l’on
a peu (ou pas) vu en France, puisque certains sont totalement inédits.
Ce sont des choses aussi diverses que Léo roi de la jungle,
qui sort en DVD ce mois de Décembre |
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C'est encore Le
serpent blanc, qui est le premier long métrage en couleur de
l’histoire de l’animation japonaise. Voilà, je pourrais
encore vous citer de nombreuses choses puisque nous approchons les 200
titres au catalogue, ce qui devient sérieux.Et puis je boucle
la boucle en disant que dans ce coté un peu niche, il y a d’autres
choses : des coup de cœur ou des occasions, qui se conjuguent pour
aboutir à des films plus du côté du « blockbuster
», même si le fond nous convient en termes de type de film.
Je parle bien évidemment de Sin City dont la sortie est imminente,
mais aussi de LAND OF THE DEAD (L’armée des morts) de George
A. Romero, que l’on sortira l’année prochaine ou
même le Combien tu m’aimes de Bertrand Blier. Voilà,
beaucoup d’éclectisme assumé ! |
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Justement,
comment un film de l’envergure de Sin City se retrouve dans le
catalogue d’un éditeur indépendant ? |
Benjamin
Gaessler : Au travers de notre maison-mère, Exception-Wild
Bunch, qui acquiert aujourd’hui de nombreux droits sur des films
d’envergure. Et ça devrait s’intensifier. |
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Vous
parlez d’une ligne directrice assumée, de choix coup
de cœurs et de localisation géographiques particulière.
Avec Sin City, film issu d’un studio américain (Miramax),
vous avez peut-être des contraintes éditoriales imposées.
Avez-vous eu des difficultés ou des obstacles pour "fabriquer"
le DVD qui vous plaisait pour Sin City, tant en termes de contenu
que de forme ? |
Franck
George : Pour le contenu cela a été très
simple puisque nous étions dépendant de ce que Miramax
allait nous envoyer et nous avons reçu un petit making-of de
13 minutes. Alors après ce constat, il a fallu plancher sur
le contenu du DVD puisque l’on ne pouvait malheureusement pas
sortir la version « Director’s cut » en temps et
en heure. On nous a longtemps dit que cette version n’était
pas prête et puis après c’était prêt,
mais il était trop tard pour que les DVD soient prêt
pour la sortie du 1er décembre car il y a avait tout le travail
de "down conversion", de restauration éventuelle,
de doublage pour les nouvelles séquences, du sous-titrage etc…nous
n'aurions jamais été dans les temps, d’autant
que nous avions déjà décidé de faire certifier
les DVD en THX. |
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Alors
effectivement la politique éditoriale sur Sin City aura été
de sortir le film sur DVD avec un master fidèle à ce
qui a été vu en salles, avec une qualité irréprochable.
Comme on a su relativement tôt que Sin City allait à
Cannes, on s’est arrangé pour mandater une équipe
pour y tourner les bonus qui sont exclusifs à l’édition
française, à savoir la Master Class de Robert Rodriguez,
Frank Miller et Brittany Murphy et la conférence de presse. |
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Là,
il y avait un peu plus de monde, avec en plus Clive Owen, Benicio
Del Toro, Jessica Alba et Mickey Rourke.Mais cela ne nous suffisait
pas, nous avons voulu faire quelque chose autour de Frank Miller.
Nous avons bien essayé de l’avoir en interview mais ça
ne s’est pas fait, nous avons donc fait appel à des spécialistes
de la BD pour dresser un portrait de Frank Miller et de donner quelques
explications sur l’homme, l’auteur, son travail etc. |
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Benjamin
Gaessler : C’est vrai, pour rebondir là-dessus,
que étions dépendants de Miramax sur le matériel
qui nous était confié, mais notre premier réflexe
a été comme d’habitude de se dire "Comment
voudrions-nous que ce DVD soit construit ?" Le résultat
qu’évoque Franck, c’est celui auquel nous avons
aboutit, mais pour reprendre presque chronologiquement les choses,
il y a des éléments sur lesquels on s’est arrêté
très tôt puisque nous avons su très en amont que
l’on disposerait des droits DVD. Nous avons donc lancé
des pistes pour produire des bonus qui soient inédits car exclusifs
à cette édition française, ce qui est de toute
façon une habitude usuelle sur le reste de nos sorties, ce
qui est évidemment un peu plus étonnant sur cette typologie
de titre dont les droits sont détenus par un studio américain.
Nous sommes dans un cas intermédiaire entre une major américaine
et un éditeur indépendant, entre un travail tout fait
et imposé et un travail à faire. Cela explique donc
le mandat à une équipe pour filmer des bonus et tenter
de passer à coté des problèmes de disponibilités,
même s’il en subsiste. |
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Après
c’est vrai que nous nous sommes focalisé sur l’idée
de proposer la version longue, puisque notre idée est toujours
de tenter de proposer le DVD le plus aboutit et le plus intéressant
sur un plan éditorial. Et puis il nous a paru logique, presque
par réflexe, vu le timing entre la date de sortie salle et celle
des éditions zone 1 de prévoir en toute fin d’année
une version longue dont l’existence était tout à
fait publique depuis un moment. A ce moment là nous étions
certains de sortir directement une édition avec cette version.
Pour l’ensemble des raisons qu’à déjà
expliqué Franck, cela n’a pas été possible,
notamment avec le calendrier de certification THX, ce qui rallonge sérieusement
le processus de fabrication des DVD, puisque cela le double (pour faire
simple). Nous avons donc aboutit à ce projet, qui est certifié
THX, et qui propose, pour le même film, trois éditions
différentes. Ce qui rend unique l’édition française
de Wild Side Vidéo, c’est à la fois la certification
THX sur les trois éditions et l’adjonction des bonus qui
nous sont propres. |
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En
tout cas, je trouve ça sympathique d’offrir la même
qualité technique pour chacun des éditions et de vous
être lancé sur un programme de certification THX. |
Benjamin
Gaessler : Pour nous c’est assez logique, c’est
même une évidence par rapport au film puisque la moindre
des choses à dire sur ce film c’est que quand on l’a
vu, on est sûr de ne jamais avoir vu ça ! Il est dans
sa forme totalement révolutionnaire, au-delà du modernisme
de son image.
Franck George : Une des composantes essentielles
de la certification THX d’un DVD, c’est qu’on certifie
carrément que la volonté du réalisateur a été
respectée, que le film, l’œuvre, n’a pas été
dénaturé.
Benjamin Gaessler : Oui, l’intérêt
de cette certification, c’est bien entendu que la qualité
image et son soit optimale, la vérification étant "militaire",
mais aussi de s’assurer du respect de l’œuvre originale.
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Pouvez-vous
justement nous décrire comme se déroule une certification
THX ? |
Franck
George : C'est un process assez long qui est présent
tout au long de la production du DVD. Dans un premier temps, après
nos vérifications des sources (D5, Beta num, DA 88 etc…),
nous les envoyons chez le prestataire d’authoring, Eclair en
l'occurrence. Eclair vérifie les sources à son tour
et donne un premier avis sur le matériel, ensuite ces éléments
sont envoyés chez THX qui passe tout cela au crible selon leur
cahier des charges.
Un premier QC (contrôle qualité) nous est envoyé
par THX, qui, après examen, nous donne un avis favorable ou
non : dans le cas de Sin city, l'avis était favorable, puisque
THX a uniquement soulevé quelques passages potentiellement
un peu délicats à encoder.
Après c'est au studio DVD d'agir et de se pencher sur les encodages
très pointilleux, qui prennent beaucoup plus de temps et demandent
plus de minutie que pour un DVD traditionnel - c'est vraiment de l'orfèvrerie
!
Les encodages effectués, ils sont envoyés chez THX pour
QC, et encore une fois, nous avons passé cette étape
sans soucis. Dans le cas contraire, la précédente étape
aurait été à refaire.
Puis une fois tous ces éléments "validés"
et les interfaces graphiques réalisées, nous pouvons
passer à l'authoring, qui une fois encore est soumis à
un contrôle-qualité de THX. Ca intervient bien sûr
après avoir que nous ayons définitivement nous-mêmes
validés les DVD-R, car il est inutile d'envoyer des DVD-R à
THX s’ils sont encore sujets à modification.
Après l'accord de THX sur ces DVD-R, nous pouvons passer à
l'étape des DLT, puis des test- pressing, qui eux aussi sont
envoyés chez THX, pour au final obtention définitive
de la certification du DVD.
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Ce
travail avec THX vous a sans doute apporté une expérience
bénéfique pour vos futures réalisations ? |
Franck
George : Cela ne m’a pas appris beaucoup de choses
pour le processus de fabrication d’un DVD, mais cela m’a
permis de constater que le travail de THX est très pointilleux,
surtout sur l’analyse des sources, et que cela n’est pas
qu’un "coup" marketing. Ce petit logo THX sur le DVD,
coûte cher et prend du temps, mais c’est vrai que l’on
a un DVD qui qualitativement est proche de la perfection. |
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Comment
justifiez-vous que chaque édition ne comporte pas le même
type de pistes sonores ? |
Franck
George : Nous avons tout simplement cherché à contenter
un maximum de consommateurs, en nous basant sur notre expérience
de la question après différents essais de DTS sur telle
ou telle version sonore. Pour exemple, le DVD du Zatoichi de Takeshi
Kitano, où nous avions opté pour le DTS sur la VF :
là, a priori, quelques consommateurs et une partie de la presse
auraient préféré la VO en DTS.
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Nous
avons donc ensuite essayé de faire différemment sur
l'édition du DVD de 2 Sœurs de Kim Jee-woon et proposé
le DTS sur la VO, mais là encore certains auraient préférés
l'inverse.Pour Sin City on a un film de deux heures, particulièrement
délicat à encoder, avec une VF extrêmement bonne
et une VO parfaite, on ne pouvait décemment pas mettre deux
flux Dolby Digital et deux flux DTS. Donc on s’est dit, on va
satisfaire tout le monde. On peut se dire que le grand public va acheter
une édition simple, par rapport à un prix, un contenu
de bonus et qu’il va vouloir un produit francophone, on va lui
faire plaisir et on va mettre le DTS sur la VF. Le fan va s’acheter
la version Collector. De toute façon, il aura une VF en Dolby
Digital et en plus on va lui mettre la VO en DTS. Comme çà,
on plait à tout le monde. En tout cas, on aura fait au mieux
;-) |
Benjamin
Gaessler : C’est
aussi une réflexion qui vient du fait que l’on achète
aussi des DVD ! Sur un tel film, c’est très tôt
que l’on se dit que l’on va tenter de satisfaire le plus
grand nombre. Du coup, c’est de là que vient cette segmentation
en trois éditions différentes de plus en plus fournies.
On n’invente rien, mais on propose trois éditions, car
on peut définir trois grands types de "profils" d’acheteurs,
qui vont être plus ou moins intéressés par un
certain nombre de choses, y compris du coté des flux sonores. |
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Vous
avez repris les mixages cinéma ? |
Franck
George : Oui bien entendu, c'est l'avantage du support
DVD, qui supporte une belle dynamique et des niveaux proches de ceux
que l'on a en projection au cinéma, contrairement aux diffusions
TV et à feu la VHS en son temps avec des contraintes de limitation
de niveaux. La bande-son de Sin City a plus que la possibilité
de faire sérieusement trembler votre caisson de basse, donc attention
aux voisins…
Merci beaucoup. |
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Pour
prolonger cette interview, nous vous invitons bien sur à découvrir
notre critique du DVD Sin City mais également de découvrir
le catalogue Wild Side Vidéo au travers de nos nombreuses critiques.
La
critique de Sin City
Lien
pour toutes les critiques Wild Side Vidéo
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vers le site officiel de l’éditeur.
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