Titre original : Blueberry
France, 2004
Réalisateur : Jan Kounen
Acteurs : Vincent Cassel, Juliette Lewis, Michael Madsen, Colm Meaney, Ernst Borgnine, et un peu de Vahina Giocante, Tchéky Karyo et de Djimon Hounsou
Adapté librement (c’est marqué dans le générique) de la BD de Charlier et Giraud
Durée : 2h05

L’histoire :
Suite à un incident qui lui laissera une blessure morale, Mike est recueilli par des indiens. Il en garde un lien fort avec la tribu et ses coutumes. Maintenant shérif adjoint d’une petite ville, il doit faire face à des chercheurs d’or avides qui cherchent un trésor dans une montagne en territoire indien. Mais a-t-il surmonté son passé ?

Annoncé comme étant plus une expérience chamanique et spirituelle qu'un western, Blueberry a-t-il mérité sa réputation ? Oui et non. En fait, j'ai bien peur que les fans de western ne soient un peu déçus, et que ceux qui cherchaient une expérience originale, une ouverture sur le mystique, le soient aussi. Mais tout n'est pas si noir. Citons d'abord la réalisation, assez virtuose. Il suffit de voir le plan d'ouverture, un immense travelling avant dans le désert vers des chevaux qui courent, pour s'en convaincre. La mise en scène et le montage sont peut-être un peu trop tape-à-l'oeil et maniérés, mais il s'agit de tout même d'une réalisation de très haut niveau. La reconstitution de far-west, même si un peu trop propre (ou peut-être on avait, à l'époque, un truc miracle contre la poussière sur les beaux habits de cuir noir ?), est au niveau de ce qu'on en attendait.
La distribution fait plaisir à voir, alignant des revenants (Ernst Borgnine), des seconds rôles qu'on aime bien voir (Colm Meaney, pourtant un peu sous-exploité, Djimon Hounsou, et Vahina Giocante, radieuse), et des acteurs solides pour les principaux rôles (Vincent Cassel, Juliette Lewis, Michael Madsen). On regrettera par contre leur jeu un peu monolithique, le peu de dialogue et d'action ne leur donnant pas grand chose à jouer. Rien de honteux, mais leurs personnages sont très peu attachants, et le spectateur s'investit d'autant moins dans le film.
Finalement, le film reste majoritairement un western. Un western plutôt bien fait, mais qui manque assez cruellement d'action, ainsi que d'originalité dans son scénario (à part le chamanisme, on va y revenir). Une bête histoire de chasse au trésor, de bandits méchants et de shérif héroïque, avec une jolie jeune fille dont le père n'est pas très net, tout ça sent quand même pas mal le réchauffé. Avec très peu de dialogues, très peu d'action, des grands paysages désertiques, je pense que le mot " dépouillé " (dans le bon sens du terme) s'impose. Après, c'est une histoire de goût, mais franchement l'histoire ne m'a pas intéressé plus que ça, et le suspense est totalement absent. Reste le côté spirituel du film.
Parce que quand même, c'est censé être un des points forts du film, l'expérience chamanique jamais vue à l'écran. A l'arrivée, c'est encore une fois partagé. Il y a d'abord le côté psychologie par les plantes, bois donc cette décoction, tu vas voir tes démons en face, et tu vas pouvoir les combattre. Comme en plus l'événement traumatisant du début est classique à pleurer, le tout fait un peu petit. Et pourtant c'est pas faute de nous balancer des flash-back, avec ou sans décoction, de ce qu'on a vu au début du film, avec à chaque fois plus de détails, donc plein de fois. En fait, le même trauma transposé chez Freud, et c'est un mauvais film de psychanalyse assuré. Heureusement, le côté visuel de l'expérience vaut le déplacement. Les deux séquences d'hallucination, assez longues, sont graphiquement et artistiquement très innovantes, arrivant à dessiner des formes sans les préciser, des créatures sans qu'on les voie, mêler le réel et l'irréel. Vraiment du beau boulot, vraiment du jamais vu.
A l'arrivée, même si le film est honnête, on reste déçu par ses deux aspects. Le côté western reste un peu mou, et classique, le côté chamanique finalement un peu court, même si les scènes sont réussies. On a bien du mal à s'intéresser à ce qui se passe, et, si l'on ne s'ennuie pas, on espère que le rythme va s'améliorer, que des idées originales vont surgir, qu'un peu d'humour va s'incruster. Mais finalement, la seule surprise, c'est l'absence de sous-titres sur les dernières minutes du film, quand ça parle anglais. Peut-être l'expérience visuelle était-elle censée nous faire apprendre la langue ? (en fait, avec un générique de début en anglais et un générique de fin en français, je pense qu'ils ont un peu mélangé les bobines...) Un dernier mot : le film ne plaira pas non plus obligatoirement aux fans de Blueberry, la BD, puisqu'il s'en éloigne beaucoup. A vrai dire, ça pourrait même ne pas être Blueberry, ça ne changerait pas grand chose. Et en fait, on ne prononce pas une seule fois le nom de Blueberry dans le film. Bizarre tout de même...
A voir : si vous êtes fan de western sans beaucoup d'action
Le score presque objectif : 6,5/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : -1, pas convaincu

Sébastien Keromen