Le CES 2006 ferme ses portes : la synthèse complète des technologies à venir

Le CES 2006 vient de fermer ses portes, vive le CES 2007 ! Mais dans l’intervalle, que de promesses en attente ! Le propre d’un salon est de présenter à la fois des nouveautés immédiates et des intentions de développement ou de mise sur le marché. Le cru 2006 aura été plus chargé d’intentions que de réalité matérielle. Alors que nous serrons les dernières mains et que tous les rendez-vous des mois à venir sont pris, faisons un petit constat.

 

Analyse conduite par Patricia et Bruno Orrù

 

Première partie

 

Le CES 2006 aura été un grand cru au niveau de la fréquentation, l’organisation annonçant plus de 150 000 visiteurs par jour, venus de 110 pays qui auront eu du mal à se frayer un chemin, malgré 155 000 mètres carrés de surface. Ce CES aura été parsemé de sourires, celui des fabricants et des revendeurs qui ont, dans leur grande majorité, vu leur chiffre d’affaires progresser sur un taux à deux positions. Toutefois certains de ces sourires étaient clairement de façade, il ne faut en effet jamais confondre chiffre d’affaires et résultat, capacité de vente et profit. Ces deux derniers vont souvent de paire mais pas forcément dans le même ordre de grandeur. Pour s’en convaincre il suffit d’analyser le contenu des nombreux communiqués de presse, du moins ceux qui ne sont pas liés à l’arrivée imminente de produits. Les marchés sont porteurs mais la concurrence est rude et les prix souvent tirés vers le bas, les gagnants d’aujourd’hui ne sont peux être pas ceux de demain.

Les technologies se transforment, les marchés se transfèrent

Premier gros problème, ce que l’on appelle la convergence va se traduire dans les faits par une modification profonde des marchés et des leaderships. Le 20ème siècle aura été plutôt simple dans la relation fabricant / consommateurs ; le premier propose un produit de loisir au second avec utilisation immédiate et à la fonction clairement établie. Le 21ème siècle s’affiche plus compliqué. Entre les deux protagonistes s’immiscent de nouveaux intermédiaires souvent très puissant, les diffuseurs de contenu. C’est en effet l’un des points marquants de ce CES, plus ça va, et plus les nouveautés technologiques sont liées à une relation d’abonnement avec un diffuseur ou un opérateur (abonnement pseudo gratuit ou réellement payant), les appareils étant multi fonctions et ouverts sur le monde extérieur au travers de multiples standards technologiques. Que ce soit chez soi sur des appareils de salon ou en voyage sur des appareils nomades, le physique disparaît de plus en plus au profit de flux, la fluctuation analogique vit ses derniers soubresauts au profit d’un monde binaire en mouvement constant. On achète moins des galettes (CD, DVD) et on reçoit plus de factures pour opérations de téléchargement, abonnements de radios ou télévisions par satellite, par Internet, par téléphone. Le divertissement vidéo n’est plus un espace réservé aux grands studios de cinéma, éditeurs de musique ou aux chaînes de télévision ; d’un coté il s’élargie clairement au profit des opérateurs de téléphonie et aux constructeurs de téléphones, d’un autre coté, plus flou, il doit faire avec Internet, média de plus en plus puissant mais jugé sulfureux du coté des producteurs de contenu. Une liaison de raison financière mais sans doute également pour tenter de contenir le problème du piratage.

Nokia : Un constructeur de téléphone qui multiplie les partenariats auprès des grands de l’électronique et qui diversifie ses produits avec ici un téléviseur / navigateur Internet de poche.


Compatibilités, protections et cadres réglementaires

Le piratage ! Un problème qui concerne tout le monde, des deux cotés de la caisse enregistreuse. Un souci tellement fort qu’il va irrémédiablement changer notre vie numérique des prochaines décennies. Le sujet n’aura pas été ouvertement abordé cette année bien que sous-jacent à chaque marché, à chaque produit numérique. Pour le marché du divertissement audio-vidéo, le problème semble se résumer à un sigle : HDCP. Un protocole qui n’autorisera aucune dérive dans toute la chaîne audio-vidéo et informatique sous peine d’écran noir. Cela concerne aussi bien le matériel de salon (y compris les décodeurs satellites, TNT ou autres moyens de transmission) que le matériel informatique (lecteurs, cartes graphiques, écrans). Un ensemble de protections qui met en lumière deux autres gros soucis que doivent gérer les industriels ; la compatibilité des technologies et des plateformes de distribution de contenus (le chantier est vaste et se heurte à des considérations financières presque insurmontables) et la définition d’un cadre réglementaire pour la protection des contenus mais également pour les réseaux haut débit puisque ce sont bien eux qui seront les vecteurs les plus usités dans les prochaines années. La VOD qui éclate actuellement sur tous les réseaux du monde est un exemple intéressant de cette mouvante commerciale et juridique. Des éditeurs ou des chaînes de télévision se transforment en distributeur de contenu en ligne, complément technologique et financier aujourd’hui, peut-être unique canal de distribution dans quelques années ?

Faire le bon choix

De fait, les constructeurs doivent impérativement faire les bons choix technologiques à long terme et les nouer de partenariats solides, de préférence à long terme eux aussi pour lisser les coûts financiers de plus en plus importants. On reviendra plus bas sur le cas des supports vidéo HD (HD-DVD contre Blu-Ray Disc) pour prendre l’exemple de la téléphonie ou le potentiel commercial est presque illimité. Au cours de ce CES 2006, on a abondamment discuté sur le potentiel de la vidéo en téléphonie mais, en dehors des limites liées au concept ou aux outils, le gros problème réside dans le choix de la technologie : 3G UMTS ou DVB-H (des deux sont actuellement testés en France) ou encore T-DMB qui concerne plutôt la Corée mais aussi en Europe l’Allemagne ou la Grande Bretagne. Pas fous, les plus gros jouent sur tous les terrains mais à quel prix ?

Sur le marché de l’affichage, les technologies évoluent encore. La confrontation LCD, DLP, Plasma subsiste mais deux nouvelles technologies très prometteuses apparaissent, les différentes démonstrations opérée durant le CES étant éloquentes. Il s’agit des écrans à base d’affichage OLED – Organic Light Emitting Diode et SED – Surface Conduction Electron Emitting Dispay. La supériorité en termes de fidélité colorimétrique, d’uniformité d’éclairage et de dynamique visuelle sied parfaitement aux nouvelles exigences des écrans full HD capables d’afficher une résolution de 1080 pixels. L’année 2006 sera décisive sur le portage vers le grand public de ce type de technologie.

Du sans fil et du Web dans le salon

Le sans fil est partout lorsque l’on parle d’informatique et de mobilité mais le sans fil concerne de plus en plus les transmissions audio-vidéo dans le salon. Les tentatives de proposer des enceintes surround sans fil se succèdent (un raccordement au réseau électrique est toutefois nécessaire) mais on peut noter la tentative intéressante signée LG de lier un lecteur de DVD avec un écran plat. Gadget ou tendance de fond ? Cela ne concerne aujourd’hui qu’un seul câble mais demain se pourrait être l’ensemble des liaisons qui sont concernées.

Autre immersion dans le salon, l’Internet et le multimédia. Une passerelle, un lecteur ou un enregistreur équipé pur être connecté à un réseau peu ainsi dialoguer avec un ordinateur serveur, proposer une interface agréable sur le téléviseur du salon pour piocher du contenu sur les disques dur.

Intégration maximale

L’enregistrement numérique prend également une autre dimension avec des capacités en disques dur qui doublent mais surtout par l’intégration même au sein du cadre (ou du pied) des écrans de lecteurs / enregistreurs. Plus besoin de boîtier supplémentaire, une seule interface qui se pilote d’une seule télécommande. Une intégration parfaite qui traduit également l’une des fortes volontés des constructeurs, proposer des machines complexes que toute la famille peut gérer. L’affaire n’est pas simple et la solution passe inévitablement par des solutions qui mélangent électronique, informatique et domotique.


Le royaume de l’accessoire

En dehors des grands stands se greffent de nombreux autres stands et parmi eux, des revendeurs, notamment d’accessoires audio-vidéo. Les allées du CES se transforment alors en supermarché, il est même possible dans certains cas de passer commande, les ventes sur place étant interdites. C’est la mobilité qui aura permis de remplir le porte monnaie de nombreux accessoiristes, vous savez sans doute que des dizaines d’accessoires sont disponible pour l’unique Ipod mais chaque marque propose dorénavant un large catalogue. Les plus répandus sont ces supports de haut-parleurs pour baladeurs, traduisant clairement que ces petites machines deviennent LE centre multimédia, il leur faut donc de quoi s’exprimer autrement qu’avec un casque.

De petits haut-parleurs pour accompagner les baladeurs, l’exemple est ici signé Creative.


Intel et Microsoft

Le bon choix technologique risque bien de passer encore pour longtemps par ces deux sociétés, totalement incontournables pour le secteur de l’informatique et de plus en plus pour l’électronique grand public. Leurs stratégies respectives sont solidement bâties, avec des partenariats tout aussi solides et les différentes diversions de concurrents qui se succèdent n’entament pas significativement leur forte influence. Au cours de ce CES 2006, les deux compères auront montés deux stands gigantesques, face à face, quasiment main dans la main. Deux espaces avec presque rien à toucher hormis des claviers, tout en imaginaire et en esprit logiciel. Coté Microsoft, l’actualité était épars avec toutefois deux points forts ; la future plateforme Windows Vista et la récente Xbox 360 qui ouvre la voie à l’idéologie Windows Live puisque la console de jeu devrait se placer sur un carrefour multimédia et de loisirs numériques familial. L’annonce durant le CES d’un lecteur HD-DVD externe spécifique à la console traduit même une vocation vidéo haut de gamme.


Le stand Microsoft permettait également de vérifier la mainmise du groupe sur de nombreux autres secteurs, le multimédia bien entendu mais aussi la naissante télévision IP, sans oublier la téléphonie sur Internet, Microsoft signant actuellement des partenariats (Verizon, Philips) pour placer son application Live Messenger ; ouvrez votre téléphone et vous saurez instantanément qui est en ligne ! Disponibilité annoncée au printemps en Europe. Chez Intel, la grosse actualité reposait sur la plate-forme VIIV, traduisant un concept de maison numérique. Ce concept associe matériel (dont un nouveau cœur processeur) et logiciel (dont le système d’exploitation Microsoft Windows Media Center) pour construire un environnement de divertissement et de domotique poussé. Une stratégie initiée depuis quelques années (Centrino était un prémisse technologique et commercial) mais c’est dans les deux années à venir que la puissance matérielle et logicielle nécessaire sera disponible. Là encore, le succès de la plate-forme VIIV repose sur le développement de partenariats avec des producteurs de contenu (logique) et des diffuseurs de contenu.

Accès à la deuxième partie de cette synthèse par ici.