Retour à Cold Mountain
Titre original : Cold Mountain
2003, USA
Réalisateur : Anthony Minghella
Acteurs : Jude Law, Nicole Kidman, Renée Zellweger, Natalie Portman, Brendan Gleeson, Philip Seymour Hoffman, Giovanni Ribisi, Donald Sutherland, Kathy Baker
Musique de : Gabriel Yared
Adapté du roman de Charles Frazier
Durée : 2h35

L'histoire en quelques mots :
Le coup de foudre est immédiat entre Ada et M. Inman. Mais ce dernier doit partir aussi vite pour la guerre de sécession. Arrivera-t-il à rentrer sain et sauf vers sa bien-aimée ? La bien-aimée arrivera-t-elle à résister à la milice qui recherche les déserteurs et, incidemment, fait la loi ? Leurs chemins seront semés d'embûches, bien sûr, mais se croiseront-ils enfin ?


Le point de vue de Sébastien Keromen

Un projet en or : le réalisateur du Patient anglais, Anthony Minghella, une des actrices les plus belles et les plus en vogue, Nicole Kidman, un (si ce n'est le) des acteurs les plus beaux et les plus en vogue, Jude Law. Ajoutez des tas d'acteurs confirmés ou prometteurs, comme Renée Zellweger, Philip Seymour Hoffman, Natalie Portman et Giovanni Ribisi. Embarquez tout le monde dans une épopée épique et romantique du temps de la guerre de sécession, et vous obtiendrez un superbe film. A moins que…

Anthony Minghella a tout fait pour qu'on ne manque de rien dans ce film. C'est même un de ses premiers défauts : il en fait trop. Pas une action qui ne soit sur-soulignée, pas un truc difficile qui ne soit carrément insurmontable, pas un événement désagréable qui ne soit complètement glauque. Par exemple, je comprends bien que la guerre de sécession n'était pas propre. Mais tous les soldats tombaient-ils vraiment le nez dans la boue et le sang ? Et si oui, fallait-il vraiment en faire tant de gros plans ? La ligne de la reconstitution historique est largement dépassée pour arriver à une habile sélection de tout ce qu'il y a de pire à voir. Le retour de guerre de Jude Law ressemble un peu à la collection 2003-2004 de tous les gens horribles, des sudistes qui massacrent les yankees aux yankees qui persécutent les civils sudistes, des délateurs au prêtre qui veut noyer une esclave noir qu'il a engrossée.

De même, de peur que quelqu'un n'apparaisse beau dans ce bourbier, tous les acteurs sont maquillés (ou dé-maquillés ?) pour avoir l'air le moins beau possible. Jude Law (à part la barbe et les cheveux) et Nicole Kidman y échappent à peu près, mais Renée Zellweger, Kathy Baker ou Giovanni Ribisi sont presque défigurés, et même Natalie Portman n'a pas l'air belle, appréciez la performance (et le dépit des spectateurs mâles). Restent juste les dents qui sont impeccables, et sur certains plans où ils sourient (c'est pas souvent, c'est pas un film où ça sourit beaucoup), ça fait un quand même peu bizarre, mais bon. Même affublés ainsi, les acteurs sont tout de même d'un bon niveau, mention spéciale à Renée Zellweger, qui, même avec un jeu outré au possible, arrive à faire exister son personnage. Mention spéciale également à Kathy Baker, remarquable de retenue, et à Philip Seymour Hoffman, impeccable comme d'habitude, et en plus le seul à être bien rasé dans ce film. Les deux rôles principaux s'en sortent également bien, à un problème près : faire croire à l'histoire.




Au-delà du problème de crasse et horreur excessives, le problème principal du film est la psychologie des personnages. On a un peu de mal à croire au coup de foudre entre Jude Law et Nicole Kidman, et encore plus de mal à croire que l'un et l'autre vont s'attendre. Comme le film va s'étendre beaucoup plus sur les actions que sur les pensées, on a l'impression de ne jamais connaître les personnages, et donc de ne jamais les comprendre. À part les horreurs qu'il a vues ou faites, Jude Law revient de la guerre sans évoluer, se contentant de réagir à ce qui lui arrive sur le chemin du retour. De son côté, Nicole Kidman évolue uniquement sur ses compétences manuelles, devenant une nouvelle personne, un quart Calamity Jane, un quart Nicolas le jardinier, un quart Monsieur Bricolage, et un quart Castor Junior. Mais apparemment sans changer dans sa tête.




L'absence quasi totale de psychologie rend le film creux, les personnages inintéressants, et le tout plutôt ennuyeux. La fin, encore une fois trop too much sous tous les aspects, finit d'achever le spectateur, qui se demande bien comment on vient de lui refourguer une épopée d'amour sans parler d'amour. On ajoutera un début en alternance présent/flash-back, et ceux qui me connaissent savent que les flash-back injustifiés (et c'est le cas) me gonflent grave. Restent quelques belles images, quelques beaux acteurs (Nicole Kidman est superbe dans certains plans, et Jude Law toujours aussi beau), quelques scènes tout de même fortes, une musique adaptée, et des péripéties pour occuper le terrain, mais le regret de trop côté horreur et de pas assez côté psychologie rend le film complètement bancal.

A voir ? : pour le côté époque et guerre, mais pas romance
Le score presque objectif : 6/10
Mon conseil perso (de -3 à +3) : -1, ça ne vaut pas le détour