Biotiful Planète

Le développement durable est une préoccupation de plus en plus importante pour notre civilisation. La France, avec ses DOM-TOM qui représentent un dixième de la surface de la métropole, mais autant d’espèces endémiques (qui n’existent qu’en un seul lieu) que toute l’Europe, a une réelle responsabilité dans la préservation de ces biotopes uniques.
C’est pour mettre en valeur ce patrimoine, mais aussi pour nous alerter sur les abus et le manque de moyen, que la fondation WWF s’est lancé dans une mission de sensibilisation à travers ces documentaires. Précédemment diffusés sur la chaîne “Planète”, ils ont été réalisés avec le soutien du secrétariat d’État à l’outremer et du ministère de l’écologie et du Développement durable. Pour autant, il n’y a pas de parti pris ou d’indulgence excessive, mais simplement une présentation de la situation de ces territoires de la façon la plus impartiale possible.

Six DVD sont disponibles pour le moment, achetable séparément ou en collection complète (auprès de l’éditeur) :

Océan Indien
Présenté par Séverine Ferrer
Survol spectaculaire de l’île volcanique de la Réunion, bout de terre émeraude aux reliefs vertigineux. Les îles de l’archipel des Mascareignes, dont la Réunion fait partie avec Rodrigues et Maurice, sont très arrosées. Avant l’arrivée de l’homme, il y a environ 400 ans, elles étaient couvertes de forêts tropicales humides. Aujourd’hui, la forêt ne couvre plus que 20 % de l’île de la Réunion et elle est reléguée aux zones de haute altitude … Mais les acteurs locaux se mobilisent : plusieurs aires protégées ont été créées tandis que des initiatives de lutte contre les espèces envahissantes voient le jour. Le projet de « Parc national des Hauts de la Réunion » pourrait couvrir une superficie de 100 000 hectares, soit près de la moitié de la surface de l’île. A Mayotte, l’expédition passe du vert au bleu avec l’exploration d’un des plus beaux massifs coralliens au monde. Magnifique et en danger ! Sur cette île très peuplée, la déforestation occasionne une sédimentation qui étouffe les coraux. La pollution urbaine liée à la croissance démographique ajoute à la menace. Le phénomène de blanchissement des coraux, lié au réchauffement climatique, fait des ravages tandis que la prolifération d’une étoile de mer épineuse asphyxie les coraux. Toute l’énergie des scientifiques, élus ou simples citoyens sont nécessaire pour inverser la tendance.

Les Antilles
Présenté par Jéromine Pasteur
Le voyage débute sur les contreforts de la montagne pelée en Martinique, au royaume de la forêt, celle des premiers Amérindiens. Pourquoi couper ce trésor de la biodiversité ?
La mygale endémique de l'île fait l'objet d'un trafic avec l'Europe.
En Guadeloupe, gros plan sur l'envol et la capture des chauves-souris la nuit.
Sur l'île, en recensant la faune aquatique, on s'aperçoit que les rivières et les sols sont contaminés à haute dose par un poison du nom de chlordécone. Maintenant, la population l'est à son tour et personne n'ose en parler.
Jéromine nous fait découvrir aussi une réserve d'iguanes, ainsi que la réserve d'oiseaux du Grand Cul-de-Sac Marin.

Saint-Pierre et Miquelon
Présenté par Jéromine Pasteur
St Pierre et Miquelon a vécu pendant des décennies d'une seule ressource qui paraissait inépuisable : la morue. Avec sa disparition, des quotas stricts ont été mis en place. Résultat : l'économie s'est effondrée et la population cherche à mettre en place des voies alternatives.
Sur les îles c'est le royaume de la forêt boréale. Avec l'introduction du cerf de Virginie pour des raisons cynégétiques, ce trésor de biodiversité est menacé de disparition.
Note plus optimiste, l'unique colonie de phoques d'Europe se porte bien. Les îles sont le royaume des pétrels, macareux moines, pingouins à tête noire qui nichent par centaines.
Dans cet épisode, il est aussi question du traitement des ordures. Dans cet espace restreint par nature, c'est un véritable défi. Il concerne tous nos territoires insulaires.

Nouvelle-Calédonie
Présenté par Séverine Ferrera
Nouvelle-Calédonie est un des hauts lieux de la biodiversité terrestre.
80 millions d’années d’évolution et un isolement protecteur ont permis à la nature d’accomplir des merveilles. 75 % de la flore sont endémiques et une bonne partie est restée identique depuis les origines. Cette île unique garde ainsi en mémoire des pages très anciennes de l’histoire de la Terre. Pourtant, les activités humaines marquent l’île de façon irrémédiable. Elles sont dues à l’extraction du nickel, activité économique en Nouvelle-Calédonie. En un peu plus d’un siècle, l’exploitation du minerai a bouleversé les paysages et désertifié une partie du territoire. Un vrai défi à relever pour les futurs projets miniers. Le feu est également un véritable fléau sur l’île : chaque année une végétation unique part en fumée. L’érosion s’accélère et les ruisseaux se transforment en
lits de pierres. Seul le plus grand lagon du monde semble relativement épargné par ces deux siècles de présence humaine: un véritable joyau, mais pour combien de temps encore?

Polynésie
Présenté par Jéromine Pasteur
En Polynésie, destination Tetiaroa, un atoll désert colonisé par les oiseaux. L'objectif : classer l'endroit en réserve naturelle, mais y adjoindre malgré tout une résidence hôtelière, labellisée 100% écologique...
L'île de Tahiti souffre, elle, d'un mal chronique. Elle est colonisée aux deux tiers par une peste végétale, le Miconia. L'arrachage manuel ne sert à rien, la flore endémique disparaît progressivement de l'île. Dans tous les atolls, le corail souffre de la présence humaine. A Mooréa, c'est l'occasion de faire une séance de reef check, un état des lieux des massifs coralliens.
Ensuite, cap sur les îles australes, à Tubuai, où la pêche au bénitier commence à s'intensifier. Or la ressource n'est pas inépuisable et une gestion des stocks risque de voir le jour, au grand dam des pêcheurs.
Puis direction Fakarava pour assister à la naissance d'une "réserve de biosphère intégrale" mise en place autour de 7 atolls. Cette réserve a le mérite de placer l'homme au milieu d'une nature respectée et préservée. Elle devrait s'étendre à toute la Polynésie.

Guyane Française
Présenté par Séverine Ferrer
Forêt tropicale luxuriante, savanes littorales, plages sauvages et fleuves généreux,…
La Guyane propose une extraordinaire diversité de paysages et une richesse naturelle à préserver.
Séverine Ferrer nous entraîne à travers le territoire guyanais à la rencontre des acteurs locaux dont le travail consiste à étudier l’évolution de l’environnement, et à protéger les espèces menacées d’extinction.
C’est le cas des tortues-luth qui viennent pondre chaque année sur les plages de Guyane. Les oeufs de ces tortues sont très prisés et les prédateurs nombreux. Chaque année les bénévoles des associations se relaient jour et nuit pour surveiller les sites de pontes. Mais la Guyane française est également connue pour la diversité de la flore et de la faune de son immense forêt amazonienne. Cette forêt connaît aujourd’hui un accroissement des pressions. La construction d’infrastructures comme les routes, fragmente les milieux et ouvre la voie aux braconniers.
Mais la véritable menace actuellement en Guyane reste l’orpaillage : les centaines de mines d’or en activité causent d’importants dégâts tels que la déforestation (600 000 hectares) et la pollution des cours d’eau par le mercure et les boues d’extractions.

Critique subjective

Il semble important de préciser d’abord que la série Biotiful Planète n’est pas une brochure  publicitaire audio-visuelle destinée aux voyagistes, même si la beauté des paysages présentée peut inciter à choisir certaines de ces destinations pour vos prochaines vacances. Ici on ne présente pas les lieux touristiques, les plus belles plages ou les clubs à la mode, mais plutôt la face ‘cachée ’ de l’outremer, avec ses habitants aux modes de vie différents des nôtres et surtout la nature sauvage et menacée.
Chaque documentaire est découpé en petites séquences qui s’enchaînent sans jamais lasser le spectateur. Le réalisateur, Philippe Tourancheau, nous montre des images magnifiques des DOM-TOM, mais le propos est surtout d’insister sur ce qui ne va pas, essentiellement du fait de l’homme, et sur les actions possibles (et parfois déjà entamées) pour améliorer la situation. Ce dernier aspect est d’ailleurs essentiel, car il ne s’agit pas ici de pointer du doigt les habitants qui saccagent leurs petits bouts de paradis, mais bien de montrer qu’il est possible d’améliorer la situation et de corriger les erreurs en changeant de comportement et à l’aide d’actions simples.
On apprend ainsi qu’il est finalement très facile de replanter la mangrove victime de la déforestation, simplement en plantant, à la main et sans aucun outil, le fruit d’un arbre encore vivant. Ou encore que certains habitants s’efforcent, avec un certain succès malgré leurs faibles moyens, de stabiliser les terres mises à nu par le brûlis à l’aide de la plantation d’espèces qui peuvent s’adapter à des sols très pauvres.
Mais ces messages d’espoirs ne voilent pas toujours des situations réellement dramatiques, comme les incursions des orpailleurs illégaux en Guyane, qui saccagent la forêt et polluent les rivières et les habitants avec leur mercure, ou encore le scandale de la chlordécone aux Antilles qui relègue la crise de la vache folle au rang d’anecdote !
Reste à espérer que ces émissions parviendront à faire prendre conscience au plus grand nombre de la richesse des territoires d’outre-mer et de l’importance de sauvegarder ce patrimoine unique. En cela, la série Biotiful Planète a mis tous les moyens possibles en oeuvre et mérite donc largement de figurer sur nos étagères.
On regrettera juste que l’éditeur n’ait pas décidé de sortir l’ensemble sous la forme d’un coffret unique, car ces documentaires sont faits pour se compléter et se regardent comme un tout.