La découverte d'un nouveau pays est toujours une expérience intéressante, ce qui explique le succès des documentaires sur ce thème. L'éditeur Gédéon Programmes a voulu aller plus loin en proposant à des artistes de nous rapporter des "carnets de voyage " en image et en peinture. Pour chaque destination, le réalisateur a suivi un illustrateur qui va réaliser son carnet de voyage graphique sous l'oeil de la caméra.
De nombreuses destinations sont proposées et, à chaque fois, le voyageur va imposer son style et influer de manière déterminante sur l'intérêt du programme. Il en résulte que la collection n'est pas homogène : si certains illustrateurs rendent leurs voyages vraiment passionnants, d'autres sont à peine supportables et gâchent leurs documentaires.
Le Cambodge et l'Arménie (Réalisation Laurent Joffrion - Illustration par Bertrand de Miollis)
Bertrand de Miollis est vraiment le voyageur de cette collection qui se rapproche le plus de l'idée que l'on se fait du "routard voyageur super sympathique". Simple, rapidement proche des gens, Bertrand de Miollis fait facilement des rencontres riches et passionnantes. Il part à la découverte de deux pays peu connus et qui ont, chacun, connu une histoire difficile. Pour ses deux voyages, l'illustrateur sort des sentiers battus et se concentre surtout sur les populations, cherchant à comprendre leurs coutumes, leurs désirs, leurs problèmes et montrant toujours la joie de vivre et l'espoir. Avec son trait rapide et son ouverture d'esprit, il se lie avec tous ceux qu'il rencontre, nous faisant découvrir des recoins insoupçonnés de ces deux pays.
Ces deux documentaires sont à acheter en priorité, car ils constituent les joyaux de cette nouvelle collection.
La Namibie et le Guatemala (Réalisation Yan Proefrock - Illustration par Elsie Herberstein)
Elsie Herberstein est à l'exacte opposée de Bertrand de Miollis. À travers ces deux documentaires, elle incarne vraiment l'image d'Épinal de la "Parisienne " en vacance, et ce, jusqu'à la caricature. On sent très vite qu'Elsie Herberstein a une haute estime de sa supériorité, allant jusqu'à s'énerver contre la foule d'enfants qui se met autour d'elle alors... qu'elle dessine justement cette foule, venue là pour un jour de fête. Avec ces deux documents, oubliez le dépaysement pour un monologue autosatisfait sur les impressions personnelles de la voyageuse dont les talents artistiques ne rachètent pas l'antipathie.
Malgré l'intérêt qu'on peut porter à ces deux pays, ces documentaires sont donc vraiment à éviter.
Le Cap-Vert (réalisation Philippe Crnogorac - Illustration par Anne Steinlein)
Connu surtout pour les pages de sable fin de ses îles du sud, la véritable richesse du Cap-Vert vient de ses habitants, métissés par les influences de sa position stratégique entre l'Afrique et l'Amérique. Anne Steinlein nous en livre une vision riche et vivante, allant au plus près des gens, nouant le contact par ses dessins. Elle n'hésite jamais à prêter ses crayons ou ses brosses à un enfant ou à donner une peinture à l'un de ses hôtes. Cette proximité enrichit le dialogue et nous aide à comprendre le mode de vie des autochtones.
Voilà encore un documentaire qui vaut le détour. On notera que la même illustratrice a également couvert l'Islande (que l'éditeur ne nous a pas fourni pour ce test).
Cuba (Réalisation Marc Temmerman - Illustration par Carla Talopp)
Peu conventionnelle dans ses dessins et dans la vie, Carla Talopp n'hésite pas à joindre des Polaroïds à ses peintures et à y coller des objets trouvés çà et là. Liant facilement le contact avec la population, elle se comporte véritablement en "artiste", se laissant guide davantage par son instinct et ses envies que par un guide touristique. Cela rend son carnet de voyage d'autant plus intéressant qu'elle est loin des clichés maintes fois vus et revus sur Cuba. Si un court passage l'emmène chez un opposant au régime, c'est plus pour lui parler d'art que politique. Voyageant en stop, comme le reste de la population, elle finit par s'intégrer au pays en lui restituant ce qu'elle en a reçu à travers une exposition de son carnet de voyage dans les rues de Santiago.
Un beau documentaire, original et surprenant qui mérite un achat. Carla Talopp a également fait un voyage en Inde (que l'éditeur ne nous a pas fourni pour ce test).
Enfin, la collection comprend aussi un carnet de voyage sur le Japon (illustré par Olivier Martin) et sur l'Écosse (illustré par Damien Roudeau). Ces deux documentaires ne nous ont pas été fournis pour le test et il convient donc d'être prudent quand on voit le résultat des films sur la Namibie et le Guatemala.
En dehors de ces deux échecs, ces carnets de voyage sont globalement une réussite et une très bonne idée pour renouveler le genre du documentaire de découverte du Monde.
La qualité est généralement très belle, avec des couleurs saturées et des vues magnifiques sur les paysages, les monuments et surtout les habitants rencontrés. Mais ce qui surprend le plus ce sont les incrustations des dessins du carnet de voyage dans l'image. Parfois ce sont simplement de petits extraits de peintures qui vont aller agrémenter un mur uni en arrière plan, plus loin ce sont des paysages qui e transforment lentement en aquarelle. Ces effets sont toujours intégrés avec beaucoup de goût et donne une approche vraiment originale à l'ensemble. À travers elles, on a vraiment l'impression de vivre le carnet de voyage et on comprend mieux les choix graphiques du voyageur. Celui-ci nous explique d'ailleurs souvent sa vision, contribuant à rendre le tout très vivant. Enfin, on notera le travail remarquable qui a été effectué sur le générique de chaque émission.
Pour chaque DVD, une seule piste sonore est proposée, avec une excellente qualité d'ensemble. Les commentaires sont parfaitement clairs et la musique d'accompagnement est toujours inspirée et colle parfaitement à l'image. L'ensemble contribue réellement au dépaysement du voyage, même si les musiques sélectionnées ne sont par forcément typiques de la région visitée.
Les DVD sont proposés avec des menus animés et sonorisés avec des extraits du programme principal. Sur les disques, le seul supplément proposé est un extrait du catalogue de Gedeon Programmes. Il n'y a pas de chapitrage pour les films.
La version commerciale de cette collection devrait également être accompagnée par un livret de huit pages reprenant le carnet de voyage de l'illustrateur et ses impressions.