Ils sont de toutes origines et ont vécu près d’un siècle. Ils ont traversé les bouleversements de l’histoire. Ils sont drôles, émouvants, rebelles. Ils nous surprennent et nous émerveillent. Pourtant, on entend rarement leur voix. Ce film est une invitation au voyage, à travers la France, à leur rencontre : les Vieux.
Voici un sujet que l’on a bien du mal à aborder tant il nous inquiète ou nous fait espérer. « Les Vieux » c’est avant tout un documentaire qui donne la parole à ceux, qui d’habitude ne l’ont plus, ceux que l’on met dans un coin d’une pièce ou dans un établissement qui s’occupera mieux d’eux que nous : « Les Anciens », « Les Doyens », « Les Vieux » quoi ! Sous ce titre que l’o peut aisément juger irrévérencieux, il y a en fait beaucoup d’amour, beaucoup de tendresse, face à ceux qui ont traversé tellement d’épreuve : La seconde guerre mondiale et les différentes crises et qui sont encore là pour raviver les mémoires et faire que nous n’oublions pas ce qu’il s’est passé dans les années 40, pour ne pas reproduire les même schémas (C’est assez mal parti !). Mais ce documentaire n’est pas un énième film sur Mamie Marguerite qui a connu les rafles, ou sur Papy Jean qui se souvient que c’était mieux avant.
Non, « Les Vieux » c’est avant tout un documentaire qui laisse parler ces personnes, qui leur donne la parole, ne les aiguille pas. Le réalisateur les laisse s’exprimer, parler de la vie avant, de celle maintenant, de ce qui les a gardés debout de la solitude et de la mort bien sûr. Un choix narratif qui se veut payant, car même s’ils gardent constamment le sourire (Hormis, un que l’on sent touché par l’émotion de se confier) certains viennent nous transpercer le cœur par une phrase ou par un sourire : « J’avais des frères et sœurs, ils sont tous morts, j’avais des amis ils sont tous morts, il ne reste que moi ! », dit l’un d’eux par exemple sans se départir de sa gouaille, ni de son sourire ou de son regard perçant. Comme une évidente fatalité, ou une résignation qui fait que chacun attend son tour sereinement, mais surement sans pour autant l’appréhender.
Ce qui est surtout touchant dans ce documentaire, c’est que les témoins viennent d’horizons différents, de milieux différents mais qu’ils se rejoignent tous sur le même point. La vie n’a pas fait de cadeau, mais il n’y a aucun regret, chacun a vécu comme il l’a entendu avec les armes qu’il a pu trouver. Certains sont seuls, d’autres vivent encore en couple et l’on sent cette complicité qui a dépassé depuis longtemps les frémissements de l’amour mais qui a qu’ils ont créé un lien si fort que l’on peut percevoir que ce qui effraye c’est de ne pas partir avant l’autre et d’avoir a souffrir de son absence qui semble insurmontable. Il y a cette phrase très belle de cette femme parlant de son mari : « Je crois que je suis devenue dépendant de lui. Son absence me pèse et ça me fait peur ! »
Mais lorsque le réalisateur aborde le sujet inévitable de la mort, tous répondent qu’ils ne la craignent pas et qu’elle arrivera sans prévenir, mais que cela signifiera qu’ils ont fait leur temps. Pour certain, c’est même une attente, comme cette grand-mère qui dit dans un sourire plein de tendresse : « J’en ai marre, j’ai fait mon temps, je suis inutile maintenant ! On ne devrait pas vivre si longtemps ! ». Qu’ils approchent les 90 ans ou aient dépassé les 100, il sort une énorme leçon de vie, de force, de tendresse et de courage dans chacun des mots de ces personnes âgées qui s’expriment sans filtre et sans haine. Une véritable douceur ressort de ce documentaire, comme pour dire que « Les Vieux » ont encore des leçons à nous donner et qu’il faut l’accepter avec toute l’humilité que cela demande.