Poison d'Avril

Mars 2002, en pleine campagne électorale, une chaîne de télévision décide de dépoussiérer son 20h. Une nouvelle équipe est mise en place et va imposer sa vision de l’information. Dans « Poison d’Avril », le réalisateur William Karel mélange fiction et images réelles de la campagne pour montrer comment les journaux télévisés ont influencé le vote. Un film, édité par Naïve Vision, qui impose une réflexion sur le pouvoir des médias.

William Karel

Né en Tunisie en 1940, William Karel fait ses études France avant d’émigrer en Israël. Il revient en France au début des années 70 où il travaille comme reporter photo chez Gamma et Sygma. Il se met au documentaire dans les années 80 et se spécialise dans le domaine historique et politique.  On lui doit des portraits de Valéry Giscard d'Estaing, François Mitterrand, Jean-Marie Le Pen, John F. Kennedy ou George W. Bush, mais aussi des films plus engagés, comme ‘Le monde selon Bush’, en 2004 qui lui donnent l’image d’un Michael Moore à la française.

En 2002, Arte lui passe commande d’un faux documentaire destiné à démontrer le pouvoir de l’image et des médias sur la façon de rapporter un évènement, cela donnera « Opération Lune : Dark side of the Moon ». Enfin, en 2007, il réalise le film « Poison d’Avril », en se basant sur son documentaire : « Le journal commence à 20h » qu’il avait tourné en 1999 pour la chaîne de télévision Arte. 

Poison d’Avril

En pleine campagne électorale de 2002, Simon Barrachet (Bruno Todeschini), journaliste offensif, prend les rênes du journal d’une chaîne de télévision et s’emploie à imposer sa vision de l’information. L’équipe du J.T. traverse alors une période de profonde transformation, tandis que les thèmes de la campagne de 2002 envahissent tous les écrans : l’absence d’enjeu électoral au premier tour et la supposée explosion de l’insécurité en France…

Critique subjective

Après avoir suivi, pendant plusieurs semaines, la réalisation d’un journal télévisé pour les besoins d’un documentaire commandé par Arte, William Karel a décidé de créer cette fiction dans laquelle il tente d’explique comment Lionel Jospin a été évincé du second tour de l’élection présidentielle au profit de Jean-Marie Le Pen. Mais ce film nous montre aussi les coulisses d’un journal télévisé et l’opposition entre ceux qui ne pensent qu’à ‘faire de l’audimat’ et les vrais journalistes qui ont à cœur de transmettre de l’information.

Après un démarrage un peu lent, le film prend de l’ampleur et retrace les grands évènements de la campagne. William Karel est sans concession avec les candidats dont il reprend certains discours marquants. On voit ainsi comment Jacques Chirac a réussi à manipuler son camp, à écarter les candidats gênants, comme Charles Pasqua, et à remettre en selle Le Pen avec l’aide bienveillante de médias. Durant des mois, les grands journaux télévisés, recherchant un maximum d’audience, se sont lancés dans la course à l’image-choc sur l’insécurité, finissant par monter le phénomène en épingle à un point jamais vu et à faire grimper le score du front national.

L’ensemble est intéressant et bien monté, même si on regrette l’importance accordée aux problèmes personnels de l’ancien responsable du journal. Le caractère des différents protagonistes est bien analysé et le but du réalisateur est atteint puisqu’on comprend bien comment « pour la première la télévision a fait basculer le cours d’une élection ».

La qualité globale est bonne, avec une image en 16/9^e appréciable sur un téléviseur moderne. Il faudra toutefois veiller à ne pas utiliser un écran trop grand qui ferait ressortir quelques défauts de compression et une colorimétrie pas toujours bien maîtrisée.

Le film est proposé au format Dolby Digital 2.0 français. Les dialogues et les commentaires sont assez clairs et généralement bien compréhensibles (à quelques rares exceptions près), ce qui est suffisant pour le sujet évoqué.

En dehors du chapitrage, l’éditeur Naïve Vision accompagne ce film de documentaires intéressants qui complètent le sujet :

« Le journal commence à 20h » - réalisation William Karel (52 minutes)
C’est le documentaire qui est à l’origine du film. William Karel y suit, pour Arté, la création du journal télévisé de 20h. Nous y voyons la façon dont se passent les conférences de rédaction, le tournage des reportages… Un documentaire édifiant pour comprendre comment est ‘fabriquée’ l’information. Mais c’est aussi un film très pédagogique qui décortique tous les aspects du travail des journalistes et on y voit les nombreuses scènes (réelles) qui seront ensuite reprises dans ‘Poison d’Avril’.

Entretien avec William Karel
Le réalisateur y explique la démarche de ce film et du documentaire qui l’a précédé. Ce commentaire est bienvenu car le réalisateur précise les éléments de fiction et les sépare bien de la véritable histoire de ces élections.

Bande annonce de ‘Opération Lune’.