L’histoire :
Années soixante-dix. Espagne. Régime du général Franco. Connaissant des difficultés financières, Gloria emménage avec sa fille chez Ana, une amie gynécologue.
Critique subjective :
Parmi les réalisateurs sélectionnés pour participer à l’aventure Peliculas para no dormir, on retrouve des noms évoquant la jeune garde du cinéma fantastique espagnol (Jaume Balaguero, Mateo Gil, Paco Plaza, …) mais aussi celui d’un vétéran : Narciso Ibanez Serrador. S’il est aujourd’hui davantage connu pour ses activités à la télévision (on lui doit notamment la série
Un dos tres), il ne faut en aucun cas oublier que l’homme fut l’un des pionniers de l’étrange dans le septième art espagnol (
La résidence,
Les révoltés de l’an 2000). Le réalisateur est également le parrain de
Peliculas para no dormir, une anthologie affichant explicitement sa filiation avec
Historias para no dormir, ce programme TV qui dura de 1966 à 1982 et dont Serrador fut l’un des plus illustres artisans.
La faute (La culpa) est un huis clos fantastique à forte portée symbolique. Espagne, années soixante-dix. En raison de difficultés financières, Gloria et sa fille Vicky emménagent chez Ana Torres, une amie gynécologue qui, parfois, rend service à des femmes lorsque la nuit est tombée et que les volets sont clos. Toute l’intrigue se déroule dans un même lieu, la maison / cabinet du docteur Torres. Dans la rue, la pesanteur du régime dictatorial fait l’effet d’une chape de plomb. Depuis la demeure contiguë, habitée par deux sœurs bigotes, c’est la religion qui gratte à la porte mitoyenne. Dans le grenier, le passé dort sous une épaisse couche de poussière. Au rez-de-chaussée, le cabinet médical est synonyme de vie (les photographies des bébés qu’Ana a aidé à venir au monde) et de secret (suppression clandestine des fœtus encombrants). Le film fonctionne également sur la dissimulation de tabous, des interdits (avortement, homosexualité) qui, dans le régime franquiste, peuvent coûter extrêmement cher.
Dans La culpa, le fantastique, de nature essentiellement suggestive, se fait discret. On sent tout le poids du secret, des non-dits et le scénario laisse une large part à l’interprétation. Rompu aux exigences du petit écran (même si l’on parle ici d’une production dont la qualité est toute cinématographique), Narciso Ibanez Serrador compose parfaitement avec la courte durée impartie (un peu moins d’une heure un quart) et gère avec brio la cadence de son histoire. Si le rythme est posé, volontairement lent, un élément vient toujours relancer l’intérêt au moment opportun, avant que l’ennui n’ai eu le temps de poindre. Simple, le procédé n’en permet pas moins de toujours maintenir l’attention du spectateur.
Verdict :
A plus de soixante-dix ans, Narciso Ibanez Serrador démontre qu’il est encore un réalisateur capable en signant une œuvre fantastique élégante et efficace. Manque toutefois un petit quelque chose qui aurait permis au métrage de rester durablement inscrit dans les mémoires.