« C’est le premier film catastrophe dont les responsables et les victimes sont dans la salle »
Yann Arthus Bertrand (photographe)
Une vérité qui dérange
Changement climatique, développement durable, effet de serre, voici des mots que nous entendons de plus en plus souvent sans toujours bien saisir l’étendu de leur signification et surtout leurs implications. Dans ‘Une vérité qui dérange’ (An Inconvenient Truth), l’ancien vice-président Al Gore explique ces phénomènes avec beaucoup de pédagogie. Des mots simples, des images et des graphiques très parlants et surtout le charisme et l’éloquence du présentateur nous aident à prendre conscience de la catastrophe qui s’annonce.
C’est le réalisateur Davis Guggenheim, plus connu pour sa participation à de célèbres séries TV américaines comme ‘Alias’ ou ‘24H’, qui a imaginé de mettre en scène une conférence de l’ancien homme d’État. Al Gore a passé de longues années, avant et après son mandat de vice-président, à sillonner le monde et à alerter sur les dangers du réchauffement de la Terre. Impressionné par sa fougue et surtout par la solidité de ses arguments, acquis au contact des scientifiques les plus brillants de la planète, le réalisateur souhaitait lui donner l’opportunité de toucher un plus large public en utilisant le cinéma.
A priori, il peut sembler rébarbatif de se dire qu’on va assister à une présentation type ‘PowerPoint’ (Keynotes en fait !) durant près de 90 minutes. Pourtant, Davis Guggenheim a relevé le défi et a fait de cette conférence un véritable spectacle qui dépasse largement le cadre de la simple présentation. Pour cela, une attention particulière a été portée sur la mise en scène, avec la création d’une salle de présentation destinée à permettre à la fois une vue parfaite au public présent et une grande facilité de prise de vue par plusieurs angles sans gêner les spectateurs ‘figurants’.
L’aspect visuel a été particulièrement soigné avec la création d’un immense écran de plus de 15m de long au fond de la salle et l’ajout de deux grands écrans plasma sur les côtés pour permettre à Al Gore de pointer des éléments particuliers de ses courbes. Il restait ensuite au réalisateur et à son équipe à aider le présentateur à mettre ses diapos au niveau de la qualité graphique exigée pour un écran de si grande taille. L’ancien vice-président avait toujours diffusé ses présentations, avec son fidèle portable estampillé d’une pomme, à partir d’images reprises çà et là sur Internet ou auprès de ses amis scientifiques.
Pour le film il a fallu revenir aux sources de tous ces graphiques, films et images en cherchant les originaux en haute définition et en régularisant les droits de diffusion. Étonnement, ce travail a été grandement facilité par l’implication de nombreuses entreprises et organismes qui ont vu l’importance de ce film et qui ont donné leurs images sans demander de rétributions. Même Matt Groening, auteur de Simpsons, a fait don d’une petite vidéo sur l’effet de serre qui est l’un des clous de cette présentation. Cette participation unanime est un signe fort que les Américains ne s’identifient pas (plus ?) à la politique menée par leur président depuis sept ans !
Pour ne pas lasser le spectateur en l’inondant de chiffres, Davis Guggenheim a eu la bonne idée d’entrecouper la présentation de séquences sur la vie d’Al Gore. Petit à petit le spectateur va comprendre pourquoi cet homme politique est tellement impliqué dans la lutte pour le développement durable. Le réalisateur revient sur son enfance dans la ferme familiale où son père conciliait sa carrière politique (il était député), l’élevage du bétail et la culture du tabac. Culture qu’il abandonnera lorsque l’un des membres de la famille va mourir d’un cancer des poumons. Nous suivons ensuite les études d’Al Gore qui seront pour le jeune homme l’occasion de côtoyer de grands scientifiques précurseurs dans l’étude des modifications climatiques.
L’idée de ces flash-back a été reprise du film ‘the Last Waltz’ de Martin Scorcèse, où l’on suit le dernier concert du groupe ‘The band’, entrecoupé d’interviews des chanteurs et des musiciens qui aident à comprendre le parcours du groupe et à s’y identifier. En faisant la même chose avec la présentation d’Al Gore, Davis Guggenheim rend ce personnage plus ‘humain’ et démultiplie ainsi l’impacte de son propos. Le film a été primé deux fois aux Oscars en 2007 comme ‘meilleur documentaire’ et ‘meilleure bande-son ’.
Un DVD à ne pas manquer
‘Une vérité qui dérange’ est vraiment un film à ne pas manquer. Rarement l’explication de la menace que fait planer l’augmentation de l’effet de serre sur notre planète aura été aussi limpide. Al Gore est un formidable présentateur qui maîtrise parfaitement son sujet. Il nous surprend par son éloquence et la clarté de ses propos. Petit à petit la prise de conscience s’opère dans le spectateur, attisé par quelques pointes d’humour et les flash-back qui viennent humaniser le présentateur.
On ne sort pas indemne de la vision de cette vérité qui dérange effectivement les industriels, les lobbys du pétrole et du gaz ainsi que notre mode de vie basé sur une consommation effrénée d’énergies non renouvelable et productrices de gaz à effet de serre. Le seul reproche que l’on pourra alors faire au film est de ne pas nous donner de clefs pour lutter contre ce réchauffement à notre niveau. En effet, si le générique final donne bien des éléments, ils sont affichés en anglais et ne sont pas toujours adaptés au public français. Heureusement, l’éditeur a eu la bonne idée de reprendre dix conseils simples pour réduire nos émissions de dioxyde de carbone sur la jaquette du DVD. Paramount montre aussi que son engagement en faveur de cette lutte est sincère en ayant privilégié une jaquette sans plastique (uniquement du carton recyclable) et en ayant monté un site Internet français qui donne de nombreuses informations complémentaires sur ce sujet sur www.criseclimatique.fr. Ce site propose même une partie ‘les gestes simples’ qui explique bien, en vidéo et pour la France, l’intérêt de quelques actions faciles à mettre en œuvre.
Le film est présenté avec une belle image, bien définie et aux couleurs précises. Tout est fait pour que le spectateur bénéficie de la meilleure impression visuelle possible. La mise en scène est très travaillée et renforce l’impacte du propos tandis que les images, belles et parfois choquantes dans leurs implications, ne vous laisserons pas indifférent.
Le DVD est proposé avec deux versions : une version originale anglaise ou une version française, les deux en Dolby Digital 5.1. Le doublage est de bonne qualité et maintient convenablement la brillance du propos d’Al Gore, mais les anglophones pourront se faire plaisir en passant à la VO. La spatialisation est bien gérée, avec des commentaires qui restent sur la voie centrale avant alors que la musique, très belle et primée aux Oscars, se répandra en stéréo et en surround autour du spectateur. La dynamique est bonne et le propos est toujours parfaitement clair.
Comme indiqué plus haut, l’éditeur Paramount a été au bout de son engagement en proposant une pochette uniquement cartonnée pour ce DVD. Ne vous méprenez pas, cela ne signifie pas que l’ensemble soit de mauvaise qualité ou au rabais, au contraire. D’ailleurs, le film est accompagné de nombreux suppléments dont certains sont vraiment passionnants :
Commentaire du réalisateur Davis Guggenheim
Le réalisateur nous livre un commentaire audio assez intéressant où il développe les raisons de son travail, la façon dont il a conçu et mis la présentation en place. On y apprend que toutes les diapos de la présentation ont dû être retravaillées en haute définition, mais aussi la façon dont il est parvenu à ‘humaniser’ Al Gore en incluant des explications sur sa vie.
Commentaire des producteurs
Ce commentaire est un peu moins intéressant que le précédent. Il contient plus de petites anecdotes sur le tournage ou sur les expériences des producteurs. On y retrouve beaucoup de choses qui sont déjà présentent dans le commentaire précédent.
Une mise à jour de l’ex vice-président Al Gore
Le DVD étant sorti un an après le film, Al Gore revient ici sur un grand nombre de faits nouveaux (ou qui n’ont pas pu être mis dans le film faute de temps). Ces faits confirment la nécessité d’agir rapidement à tous les niveaux pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ce supplément est aussi passionnant que le film et montre bien que la situation évolue très vite.
Le making-of (11 minutes)
Nous suivons le réalisateur Davis Guggenheim alors qu’il conçoit et met en place la scène pour la conférence d’Al Gore. Le document nous fait suivre les répétitions, les mises au point techniques et enfin quelques extraits de la présentation que l’on ne voit pas forcément dans le film.
‘I need to wake up’
C’est le clip d’une chanson de Melissa Etheridge qui s’appuie sur des images d’ « Une vérité qui dérange ».
Lien Internet
Enfin, le menu nous indique l’accès vers le site internet www.climatecrisis.net, un site en anglais qui explique la démarche du site et donne accès à une liste d’actions réalisables pour lutter contre le réchauffement climatique. N’oubliez pas qu’une version française a été créée parallèlement sur www.criseclimatique.fr .