Née pour danser, Neneh est une petite fille noire de 12 ans qui vient d'intégrer l'école de ballet de l'Opéra de Paris. Malgré son enthousiasme, elle va devoir redoubler d'efforts pour s'arracher à sa condition et se faire accepter par la directrice de l'établissement, Marianne Belage. Cette dernière est en effet la garante des traditions et porteuse d'un secret qui la relie à la petite ballerine.
Il est difficile de parler d’un monde que le commun des mortels regarde toujours avec un certain respect et une certaine défiance notamment pour son aspect rigide et egocentrique. L’Opéra de Paris, c’est un univers qui est longtemps resté centré sur lui, fermé comme une sorte de sanctuaire à destination d’un très petit nombre d’élu. Depuis un certain nombre d’années, cette institution s’est ouverte au monde en laissant pénétrer son « Saint des Saints » pour que le public comprenne à quel point il est nécessaire de s’investir complètement dans le travail du corps, de la grâce, des gestes et mental que demande l’excellence de l’Opéra de Paris, parfois au prix de nombreuses privations, de douleurs physiques et morales.
En emmenant sa fille au conservatoire, le réalisateur a eu l’idée de parler de ce monde et surtout de la manière dont les élèves y entrent et la rigueur, parfois jugée excessive, qui leur est demandé. En s’appuyant sur une documentation fournie et précise : le film de Françoise Marie « Graine d’étoile » en 2011 ou alors une thèse de Sociologie sur la Danse au sein de l’Opéra de Paris et bien d’autres encore, le réalisateur s’est lancé dans l’écriture d’un scénario qui suit les premiers pas d’une petite fille dans cet univers de grâce et de beauté. Et si le scénario est précis et utilise des termes et des références précises à la danse au sein de l’institution, le réalisateur tente d’y opposer de façon de voir les choses, et rate sa cible, notamment parce que l’on ne parvient pas à cerner totalement les messages ou le sujet qu’il veut aborder.
Et notamment, de par le choix de l’angle de narration, le réalisateur se perd parfois dans des considérations un peu convenues. Il est alors impossible de ne pas penser à la série « L’Opéra » diffusée sur la plateforme OCS de Cécile Dubrocq et Benjamin Adam, qui, sans être une référence absolue, et malgré ses imperfections aborde quasiment sous le même angle, le sujet de l’abnégation et du rapport au corp que peuvent avoir les danseuses et les danseurs. Mis avec un peu plus de précision et de matière que dans le film de Ramzi Ben Sliman. Dans « Neneh Superstar », le réalisateur semble vouloir aborder plusieurs sujets sans les assumer totalement.
Et du coup sa mise en scène s’en ressent fortement avec une distance un peu trop perceptible avec son sujet et même s’il a mis un point d’honneur à poser son propos sur des faits avérés, la mise en scène manque de corps et si l’on prend, par exemple, la scène où les petites danseuses s’en prennent à l’héroïne, la position très proche de la caméra, censée nous plonger au cœur de la situation, nous noie au contraire et nous empêche d’en percevoir toutes les nuances. Et c’est le problème de « Neneh Superstar » que d’être un film qui se tient un peu trop à distance et même si l’on peut lui reconnaître l’envie de lever un voile sur cette institution, il ne parvient jamais totalement à nous embarquer. Notamment parce qu’il va utiliser tous les poncifs du genre : La famille de la petite fille prête à tout pour qu’elle réussisse, elle forcément d’un autre milieu que les autres danseuses, issues de bourgeoisie locale, etc…
Le problème de « Neneh Superstar » réside justement dans ces poncifs du genre qui nous poussent à l’extérieur du cercle de ceux qui voudraient se sentir intégré dans l’histoire. Le réalisateur, par exemple, ne va jamais totalement dans le sujet de la diversité, encore l’un des grands maillons faibles de l’Opéra de Paris (Même si de nombreux efforts ont été faits dans ce sens), ou encore le rapport au corps qui, en l’absence de tabou, reste l’élément majeur qui pousse parfois, les plus fragiles, vers des pathologies extrêmes. Ramzi Ben Sliman semble avoir eu envie de lever un voile sur ‘l’Opera, mais a manqué de courage ou s’est perdu dans une narration trop légère et naïve de la vie de ces danseuses et danseurs.