Thief

Série née il y a bien des années sur PC, Thief fait son grand retour. Développé par les équipes d'Eidos Montréal, à qui l'on doit l'excellent reboot de Deus Ex, ce nouvel épisode apparaît pour la première fois sur consoles de salon. Attendu au tournant par les fans de la première heure, Thief se montrera-t-il à la hauteur des attentes alors que Dishonored à bousculé toutes les règles préétablies par son aîné ?

Le jeu nous place aux mains de Garrett, célèbre maître voleur de profession et antihéros par excellence. Autrefois référence du genre infiltration, ce reboot se devait de placer la barre plus haute. Malheureusement pour lui, Thief a souffert d'un développement chaotique dont les effets se font ressentir passer la première heure de jeu. L'histoire prend part dans la Cité, ville rongée par la maladie, la violence, la haine et dirigée d'une main de fer par le Baron. Le scénario justement, parlons-en. Loin d'être inintéressant, il faut reconnaître que le déroulement de l'histoire révèle de belles qualités d'écriture, toutefois, elle ne laisse pas un souvenir impérissable et se montre même en dessous de ce à quoi nous nous attendions pour un jeu de cette trempe, la faute à un mélange des genres assez douteux et des rebondissements que l'on voit arriver de très loin.

Techniquement tout d'abord, Thief est loin d'être aussi réussi qu'espéré, si l'on ne peut que saluer le travail opéré sur la direction artistique et une belle habileté à jouer sur ombres et lumières, difficile de passer outre des textures à la qualité très moyenne, des chutes de framerate inexplicables et des temps de chargement longuets. Malheureusement ce même constat s'applique aussi à la bande-son peu inspirée.

Manette en main, Thief alterne entre le chaud et le froid. Le jeu offre deux axes d'approche, s'infiltrer, voler et neutraliser ses assaillants dans le silence le plus absolu, ou alors de jouer la carte de l'action, une approche qui n'a finalement peu d'intérêt au regard des attributs de Garrett. Loin d'être un as du corps à corps, la plupart des situations imposent de la jouer fine. L'arsenal de Garrett est seulement composé d'un arc, une arme qui aura plusieurs utilités, il permet de neutraliser les ennemis qui barrent votre chemin, éteindre les sources de lumière pour faciliter sa progression et se faufiler plus facilement dans les ruelles de la ville ou pouvoir assommer un garde. Garrett dispose également d'un pouvoir « Concentration » pour voir les ennemis à travers les murs et mettre en surbrillance les objets avec lesquels il est possible d'interagir. Accessoirement, pendant ce court laps de temps sa rapidité et sa puissance sont décuplées.

Un pouvoir très utile en situation, un peu trop même, puisqu'il facilite encore un peu plus une progression suffisamment balisée et une intelligence artificielle loin d'être vierge de tout reproche. Car c'est justement là le problème de Thief, le sentiment d'être systématiquement pris par la main est criant, d'ailleurs, chaque mission comporte un seul et même chemin, ici pas de place à l'improvisation il n'y a qu'une seule méthode pour mener à bien sa mission. Un constat qui s'applique également aux actions, trop  répétitives et qui limites de ce fait une fois encore un peu plus notre liberté de mouvement, voire même l'envie de mener à bien les quêtes annexes tant la construction des niveaux révèle une logique très aléatoire... Et nous n'avons même pas abordé l'intelligence artificielle mal équilibrée, à la limite du passable dans certains cas, alors qu'elle sait parfois se montrer redoutable.

Heureusement pour lui, Thief conserve quelques atouts. Le jeu impose un minimum de réflexion avant de passer à l'action sous peine de se retrouver acculé face à une horde d'ennemis, et prendre le risque d'un game over assuré. Cela impose de surveiller les déplacements des gardes, observer la construction des pièces et leurs zones d'ombres (ou en créer), et fouiller les moindres recoins de chaque pièce pour assouvir la kleptomanie de Garrett. Le vol d'objets de valeur permet ainsi d'investir plus tard dans diverses améliorations ou acheter du matériel. Il faudra également surveiller à se déplacer dans le silence le plus total, marcher debout provoquant plus de bruit qu'en position accroupie, de même que marcher sur des pavés provoque moins de bruit que sur un parquet ou un point d'eau. Même chose pour lors du crochetage d'une serrure, phases d'ailleurs très réussies, chaque essai raté occasionne une bruit détectable par les ennemis situés à proximité. Preuve que tout n'est pas à jeter.

Un bilan contrasté

Car, qu'on se le dise, Thief est loin d'être un jeu à attacher au pilori. Malheureusement pour lui, Dishonored est passé par là il y a deux ans et l'attente n'en fut que décuplée. Pour ceux qui n'y auraient pas mis la main dessus, Thief apparaîtra comme un bon jeu, tandis que pour les autres qui attendaient là une nouvelle référence du genre infiltration, seront amèrement déçus de ses promesses non tenues et son manque de liberté. Chacun choisira son camp, pour autant ne le condamnez pas trop vite, un public peu regardant sur ses défauts pourrait même se laisser attirer par les habiles tours de passe-passe de Garrett.

Esthétiquement le jeu alterne entre le bond et le moins bon. Le travail opéré sur la direction artistique est à saluer, tout comme les effets d'éclairage et le rendu de la plus. Cependant, la qualité des textures est bien trop moyenne pour un jeu nouvelle génération, ce que nous aurions pu plus facilement lui pardonner s'il n'y avait pas eu de telles chutes de framerate et des chargements trop répétitifs... Tout juste de quoi récolter la moyenne.

La bande-son de Thief est loin de répondre à nos attentes. Les musiques sont peu inspirées, tout comme le sound-design, et il n'est pas rare d'avoir à tendre l'oreille pour entendre certains dialogues, alors que les protagonistes sont au premier plan, et au contraire avoir l'impression qu'ils sont juste à côté alors qu'ils sont à une bonne dizaine de mètres. Heureusement, la qualité des doublages est au rendez-vous, c'est déjà ça de pris.

Pour prolonger la durée de vie, Thief propose plusieurs challenges. Cela passe par les quêtes annexes, une liste d'objets à collectionner et des défis en ligne qui permettront de comparer ces scores avec ceux des autres joueurs. De quoi prolonger un petit peu plus une durée de vie, plutôt bonne d'ailleurs (15 heures environ), pour ceux qui souhaitent prolonger l'aventure jusqu'au bout.